Magazine Le Mensuel

Nº 3026 du vendredi 6 novembre 2015

Semaine politique

Blocages institutionnels. Le Liban n’est une priorité pour personne

Il est clair, selon des sources bien informées, qu’on ne peut pas parler du Liban sans évoquer la Syrie en raison des multiples impacts de la crise syrienne sur le pays du Cèdre, en particulier à la lumière de l’intervention militaire russe.

Citant une source diplomatique, des milieux bien informés confient qu’«on entre aujourd’hui dans une nouvelle phase de la guerre en Syrie puisque les Russes ont pris l’initiative sur le plan militaire. Théoriquement, cela les met en position de force, mais aussi les expose beaucoup». Il est connu que lorsque les militaires déclenchent une action, ils ne la terminent que lorsqu’elle a atteint ses objectifs. «Personne ne peut croire que cette intervention s’achèvera en trois mois, comme l’ont déjà mentionné les Russes, ne serait-ce que parce que la crise dure depuis quatre ans. Ce qu’il faut aujourd’hui, c’est un débouché politique pour ne pas créer un autre Afghanistan. Personne ne souhaite l’enlisement des Russes, mais il faut définir un agenda international commun pour mettre un terme à la guerre en Syrie», poursuit cette source.
Bachar el-Assad a fait le choix rationnel de se battre. Selon la source susmentionnée, «tout le monde a sous-estimé sa volonté de lutter jusqu’au bout. Il se bat encore. Pourtant, les conditions de la sortie de crise restent les mêmes qu’en 2011, mais dans des circonstances beaucoup plus graves».
S’il faut isoler les extrémistes et ramener le calme dans le pays, il est impératif de rassembler les Syriens. Cela n’est possible qu’avec ceux qui sont en mesure de participer à une forme de transition politique. Daech est un produit de la crise et non un fait générateur, selon la source. Interrogés sur les négociations de Vienne, ces milieux indiquent qu’il n’y aura pas de réponse complète à Vienne, mais la mise en place d’une nouvelle dynamique. Les Russes, qui sont sous pression, souhaiteraient qu’il y ait un consensus international. Les Européens y ont intérêt puisqu’ils sont exposés, de manière grave, aux effets de la crise syrienne à travers les attentats et le flux des réfugiés.
Interrogée sur la possibilité de séparer le Liban de la crise syrienne et l’éventualité d’une élection présidentielle avant le règlement de la guerre en Syrie, la source a estimé que l’impact sur le Liban était très fort, et ce, à plus d’un niveau: économique, sécuritaire, humanitaire… La solution à la crise libanaise est fortement conditionnée par l’apaisement de la situation en Syrie qui, lui seul, dissuadera les Syriens de quitter le Liban et convaincra le Hezbollah d’y rentrer. Selon cette source, tout le monde a bien compris qu’on ne pouvait pas attendre la fin de la crise syrienne pour faire fonctionner les institutions libanaises et qu’on ne peut pas lier le destin du Liban à celui d’un pays qui va de plus en plus mal. Si un président est élu, il faut une plateforme suffisamment solide pour que le Premier ministre puisse former son gouvernement. La crise libanaise devrait être fractionnée en plusieurs volets, celui de l’élection d’un président, la formation d’un gouvernement, la déclaration gouvernementale et les négociations d’une nouvelle loi électorale. Il y aurait ainsi un espace de négociation, mais les conditions d’un accord politique ne sont pas encore remplies.
Selon les milieux informés, «le Liban n’est aujourd’hui une priorité pour personne. La solution, plus que par le passé, appartient aux Libanais et ceci n’est pas un slogan. Auparavant, quand il n’y avait pas de compromis possible au Liban, on allait en trouver sur la scène régionale, à Genève, à Taëf ou à Doha. Il y a encore moins de compromis et de consensus possibles sur la scène régionale qu’il y en a au Liban. C’est la responsabilité des Libanais qui doivent se mettre d’accord entre eux. Si un accord intervient entre Michel Aoun et Saad Hariri, ou entre les autres parties libanaises, il n’y a pas de raison que Riyad ou Téhéran s’y opposent», conclut la source précitée.

Joëlle Seif
 

Que veut Poutine?
L’intervention des Russes suscite beaucoup d’interrogations, affirment des milieux bien informés. «Nous ne savons pas exactement ce que veulent les Russes. Le président Vladimir Poutine avait déclaré à la télévision russe que son pays était intervenu, car il voulait empêcher la chute du régime Assad. Mais les conditions de la sortie de crise n’ont pas été expliquées», souligne la source.

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