Magazine Le Mensuel

Nº 2932 du vendredi 17 janvier 2014

Presse étrangère

L’identité fracturée du Liban

A intervalles réguliers, l’actualité libanaise vue de l’étranger sort des territoires géostratégiques pour s’intéresser à d’autres petites histoires qui ouvrent d’autres horizons.

CARNEGIE
FONDATION POUR LA PAIX INTERNATIONALE.

Pays: Etats-Unis.
Genre: think tank, spécialisé en politique étrangère.
Publication: Foreign Policy.

L’un des plus puissants cercles de réflexion et d’influence de Washington publie une analyse du radicalisme sunnite au Liban.
La pauvreté, le désespoir et les rivalités communautaires ont fait le terreau de quelques cheikhs devenus extrêmement influents. Bien que concentrés autour de Tripoli, ces leaders ont essaimé dans le Nord, à Saïda dans le sud, ainsi que dans les camps de réfugiés palestiniens disséminés sur l’ensemble du pays. Ces éminents cheikhs salafistes peuvent être divisés en deux camps; entre ceux qui ont utilisé leur chaire pour diffuser leurs discours et ceux qui se sont concentrés sur la lutte armée.
Zakaria Abdel-Razzaq el-Masri et Salem el-Rafeï sont deux des dignitaires qui appartiennent à la première catégorie. Le premier, responsable de la mosquée Hamza à Tripoli, est un guide spirituel pour de nombreux combattants sunnites dans le pays. Le deuxième est considéré comme la figure salafiste la plus importante de Tripoli.
Dans l’autre catégorie, on retrouve le cheikh Ahmad el-Assir, alias le lion sunnite de Saïda, qui a noué des liens à Aïn el-Heloué et avec l’Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL). D’autres, comme Houssam Sabbagh, gravitent allégrement entre ces deux mondes.

THE SYDNEY MORNING HERALD
Pays: Australie.
Périodicité: quotidien.
Diffusion: 200000 exemplaires par jour – première publication du pays.

Le journal australien de référence, qui traite régulièrement de l’actualité libanaise, publie cette semaine une tribune intitulée Le Liban fracturé traverse une crise d’identité.
Le Musée national de Beyrouth abrite l’une des plus grandes collections préhistoriques du monde. Vous ne retrouverez aucun objet, aucune œuvre datant d’après le Moyen Age. Le Liban moderne y est tout simplement absent. En fait, le seul héritage de l’histoire récente que l’on peut remarquer sur l’édifice, c’est l’immense impact de canon qui a éventré son fronton sur lequel est exposée une impressionnante frise byzantine.
Au Liban, vous avez des zones sunnites, chiites ou chrétiennes. Aucune zone nationale. Généralement, les Etats font de grands efforts pour véhiculer une propagande mythologique nationale. Le Liban n’en prend même pas la peine. Le pays n’a ni de monuments à la gloire de l’indépendance, ni de pères fondateurs ou de héros nationaux. On ne trouve même pas de photos surdimensionnées des dirigeants, comme on en voit dans tout le Moyen-Orient. Au Liban, les héros modernes sont sectaires; les symboles nationaux de l’époque sont tragiques et incarnent le conflit par excellence.

DER SPIEGEL
Pays: Allemagne.
Périodicité: hebdomadaire.
Diffusion: un million d’exemplaires par semaine – Premier site d’information du pays.

L’une des publications les plus lues d’Allemagne – avec le quotidien Bild – propose un portrait de Rola Sleiman, la première femme pasteur au Liban, élue à la tête d’une petite communauté presbytérienne de Tripoli.
La forte présence militaire dans et autour de la ville rappelle la récente flambée de violence qu’a connue la capitale du Nord. «Nous ne pouvions pas aller à l’église dimanche dernier. Des protestataires lançaient des cocktails Molotov sur les soldats de l’armée depuis le toit de l’église», explique Rola. Depuis 2005, cette femme de 38 ans est chargée de la gestion de l’Eglise évangélique de Tripoli. Elle s’est élevée à un rang équivalent à celui de prêtre, bien qu’elle ne puisse pas effectuer de sacrements. Pour Sleiman, le conflit syrien a mis une pression supplémentaire sur sa petite communauté chrétienne – trente-trois familles – déjà fragmentée. Elle ajoute que ses fidèles essaient de rester neutres dans ce conflit, bien que les gens aient peur.
Aujourd’hui, environ vingt paroissiens ont assisté à la messe. C’est une bonne audience, dit Sleiman. Pendant les vacances, ils peuvent être jusqu’à 80. Inspirée par les récents affrontements, Rola a décidé d’articuler son sermon sur le thème de la réconciliation.

LIBÉRATION
Pays: France.
Genre: quotidien national.
Diffusion: 125000 exemplaires par jour.
Sixième journal du pays, derrière Le Parisien, Le Figaro, Le Monde, l’Equipe et Les Echos.

Le premier journal français de gauche s’intéresse aux réseaux libanais de Serge Dassault, sénateur UMP et dirigeant de la société aéronautique qui porte son nom, inquiété par la justice française pour plusieurs motifs.
La tirelire du «système Dassault» était-elle au Liban? Les juges ont mis à jour le montage financier offshore utilisé par le sénateur UMP et ancien maire de Corbeil-Essonnes pour verser 3,2 millions d’euros, en juillet 2011, à deux de ses agents électoraux présumés, Younès Bounouara et Mamadou Kébé. Tout a commencé quelques mois après l’élection municipale de décembre 2010. L’homme qui a réalisé le montage est un avocat libanais, Joseph Khoury Hélou. Neveu de l’ancien président de la République Charles Hélou, il a ses entrées sur la scène politique libanaise. Dassault le contacte au printemps 2011. Après plusieurs rencontres à Paris, il lui demande de créer la société Iskandia s.a.l. Offshore, que Khoury Hélou immatricule le 14 avril. Officiellement, Dassault veut s’en servir pour acheter d’occasion un jet privé.

LA LIBRE BELGIQUE
Pays: Belgique.
Périodicité: quotidien.
Diffusion: 55000 exemplaires par semaine – deuxième quotidien francophone du pays avant Le Soir.

La Libre Belgique consacre cette semaine un article qui pose la question de l’écologie marine.
La police danoise a accusé vendredi les marins d’un navire libanais d’avoir jeté dans la mer Baltique des vaches mortes pendant une tempête dans l’Atlantique, qui ont échoué sur les plages de Scandinavie. La police suédoise d’abord puis la danoise enquêtaient sur l’origine de quatorze cadavres de ruminants parvenus depuis le 31 décembre sur le rivage du sud de la Suède et de l’est du Danemark. Ce sont les Danois qui ont indiqué que le mystère avait été résolu. La police «soupçonne à présent que les vaches proviennent d’un navire libanais qui a transporté du bétail vivant vers l’Europe depuis un port américain», a-t-elle expliqué dans un communiqué. Les vaches avaient été éventrées dans l’espoir qu’elles restent au fond, et leurs oreilles coupées pour compliquer l’identification. Certaines avaient été abattues par arme à feu et elles avaient les pieds liés probablement pour être soulevées plus facilement. Le seul bâtiment libanais dans la Baltique était un transporteur de bétail amarré à Klaipèda (Lituanie). Son armateur, le libanais Khalifeh Shipping Line, n’était pas joignable.

L’HUMANITÉ
Pays: France.
Périodicité: quotidien.
Diffusion: 46000 exemplaires par jour.

L’ancien organe de presse du Parti communiste français s’est intéressé à un livre de Cathie Barreau.
Donatienne savait qu’on ne prend pas la main d’une femme dans les rues de Beyrouth. Elle ne s’attendait pas à ce geste de Jad, mais ne manifesta aucune surprise. Seule revenait sans cesse une pensée «comme une question qui n’a aucun sens mais qui persiste»: «Comment fait-on l’amour pendant la guerre?». La question se pose ici, à Beyrouth, en 2009. Elle se pose à Nantes, quelque temps plus tard, quand Jad viendra rejoindre Donatienne. Elle s’est posée à tous, de tout temps. Donatienne, qui a rencontré Jad, un journaliste libanais, à l’occasion d’un congrès d’écrivains, a pris à bras le corps cette question. Le roman de Cathie Barreau va donc avancer en une série d’allers-retours. Entre Nantes et Beyrouth, entre les moments où les amants sont réunis et ceux où ils pensent l’un à l’autre, se souviennent, s’écrivent, attendent des nouvelles, s’inquiètent. C’est la question que pose avec insistance ce roman d’une grande finesse, chronique d’une guerre amoureuse dont l’écriture sort toujours victorieuse.

Julien Abi Ramia

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En tête des occurrences du dossier libanais dans les moteurs de recherche les plus fréquentés de la Toile, le thème de l’embrasement, repris notamment par Paris Match et l’ensemble de la presse arabophone qui s’intéresse à l’importation sectaire de la guerre en Syrie et ses conséquences sur le plan du terrorisme. Vient ensuite, dans la presse française, le volet libanais de l’affaire dite Dassault, puis la vie libanaise d’Ariel Sharon, décédé dans la semaine.

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