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Nº 2932 du vendredi 17 janvier 2014

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Concessions mutuelles et détente régionale. Cabinet: la dernière ligne droite

Après l’accord de principe conclu par Nabih Berry et Fouad Siniora sur leur participation à un gouvernement rassembleur sur la base de la formule des trois huit, reste au Hezbollah et au Courant du futur de convaincre leurs alliés chrétiens d’accepter la rotation des portefeuilles et le report des discussions sur la déclaration ministérielle. L’affaire de quelques jours?
 

Le chef de la diplomatie iranienne, Mohammad Jawad Zarif à Beyrouth et les responsables saoudiens qu’a rencontrés Waël Abou Faour à Riyad, ont livré le même message. L’Iran et l’Arabie saoudite ont donné le feu vert à la formation d’un gouvernement d’union. Au moment où s’ouvrent coup sur coup la première séance du Tribunal spécial pour le Liban (TSL) à La Haye jeudi et la conférence de Genève II mercredi prochain, l’heure est à la stabilisation régionale. La parenthèse pourrait ne pas durer, c’est pourquoi Nabih Berry et Walid Joumblatt se sont si rapidement engouffrés dans la brèche. Les deux conciliateurs se sont distribué les rôles. Au leader du PSP, le rapprochement des points de vue; au président du Parlement, les négociations concrètes. Pendant que le premier obtenait, auprès du président Michel Sleiman et du Premier ministre désigné Tammam Salam, un délai de quelques jours, le deuxième entamait ses discussions avec le leader parlementaire du Courant du futur, l’ancien Premier ministre Fouad Siniora, poussé dans cette voie par Saad Hariri qui, en début de semaine, a donné son accord définitif à la participation de son parti à un gouvernement dans lequel le Hezbollah serait présent.
Mercredi, tous les voyants étaient au vert. Concerné au premier chef, le Premier ministre démissionnaire, Najib Mikati, qui effectuait donc au Koweït son dernier déplacement officiel, a fait part «d’une détente régionale qui a permis des avancées». Dans les colonnes d’as-Safir, Nabih Berry a fait part d’un «optimisme prudent». Tautologie qui sanctionnait alors le fait que si, comme l’a indiqué Tammam Salam, «les points relatifs à la forme du gouvernement – la formule des trois 8 sans tiers de blocage, rotation des portefeuilles ministériels, prérogatives du président de la République et du Premier ministre désigné quant au choix des candidats – ont été établis», le dossier ne serait clos qu’une fois signé le décret de formation du gouvernement. Un rappel élémentaire que les coups de fil de félicitations, que reçoit Salam depuis le milieu de la semaine, viennent effacer.
Cette accélération soudaine des discussions en a déboussolé plus d’un, et notamment Samir Geagea qui, en quelques heures, a vu le Courant du futur passer du refus catégorique de s’asseoir à la table de ceux qui font la guerre en Syrie et ont tué Mohammad Chatah, à la répartition de portefeuilles ministériels au sein d’un gouvernement d’union. Une surprise que le chef des Forces libanaises a vertement exprimée au cours d’un premier entretien téléphonique durant le week-end avec Saad Hariri. Quelques heures auparavant, il indiquait au cours d’une émission télévisée que son parti «n’avait pas encore décidé d’une éventuelle participation à un gouvernement de trois 8». Mais lundi, Geagea infléchissait son discours. «La formation d’un gouvernement homogène et capable de prendre des décisions qui ramèneraient un minimum de sécurité aux Libanais et sortiraient le Liban de l’abîme devient une nécessité. Un tel gouvernement ne peut être qu’un gouvernement tiré par un seul cheval, mais dans la bonne direction. Appelez-le comme vous voulez». «Nous voulons tous un gouvernement le plus tôt possible, mais pas un gouvernement de contradictions», déclarait-il, en s’adressant au chef de l’Etat, Michel Sleiman, et au Premier ministre désigné, Tammam Salam.
 

Détails évacués en force
Un discours qui a visiblement plu à Saad Hariri, qui a rappelé le leader des FL pour l’occasion. Quelques heures plus tard, le leader naturel du Futur s’est entretenu par téléphone avec le député phalangiste Sami Gemayel qui, lui aussi, a exprimé sa surprise quant au changement de pied du parti sunnite. La réponse de Hariri a été claire. Lorsque les deux responsables chrétiens du 14 mars ont expliqué les réticences de leurs partis respectifs, l’ancien Premier ministre a indiqué, magnanime, qu’il ne rentrerait dans ce gouvernement qu’à la condition que toutes les composantes de la coalition l’acceptent.
Deux autres points restent à éclaircir, clairement identifiés par Samir Geagea. S’adressant à Sleiman et Salam, et sans doute au Courant du futur, il dit: «Quelle serait la teneur de la déclaration ministérielle? Qu’allez-vous faire du triptyque armée, peuple, résistance, alors que l’autre partie refuse d’afficher clairement sa position à ce niveau?». Sur le premier point, Nabih Berry, les alliés du Hezbollah et, de manière plus subreptice, les locataires de Baabda et du Grand sérail, ont indiqué que le texte de la déclaration ministérielle devra être étudié par le comité gouvernemental de rédaction, soit après la formation du gouvernement. Sur la question du triptyque, alors que le Hezbollah et Walid Joumblatt ont expliqué que la langue arabe était assez riche pour passer cet obstacle, face à la volonté du 14 mars de la substituer par la déclaration de Baabda, Nabih Berry a indiqué que la mention armée, peuple, résistance était, pour lui, indépassable.
Tammam Salam pourrait très bientôt sortir de sa position confortable d’observateur des antagonismes locaux et régionaux pour arborer son nouveau costume de Premier ministre, à la tête d’un Exécutif plongé au cœur du grand jeu international. 


Julien Abi Ramia

Les noms qui circulent
La formule des trois huit induit-elle que les prérogatives de nomination de Tammam Salam et de Michel Sleiman, qui ont couché une liste d’une vingtaine de noms lorsqu’ils étudiaient la possibilité de former seuls le gouvernement, vont être réduites à la part qui leur est attribuée, à savoir huit noms? Le chef de l’Etat devrait intégrer son conseiller militaire, le général chiite Abdel Mouttaleb Hannaoui, et semble avoir coché le nom de Samir Mokbel qui resterait au gouvernement et celui d’un autre de ses conseillers, Khalil Hraoui. Salam pourrait faire confiance à Mohammad Machnouk et à l’ancien ministre Adnan Kassar et Walid Joumblatt à Waël Abou Faour. Le casting des ministres ne fera que peu de vagues dans les rangs du Courant du futur, du Hezbollah et du mouvement Amal. Comme de tradition, c’est dans les rangs chrétiens que la course à l’échalote sera la plus disputée. Du côté du CPL, qui a le plus à perdre dans la restructuration du 
gouvernement, on reste résolument attaché aux ministères convoités dirigés par Gebran Bassil et Nicolas Sehnaoui. Dans les rangs chrétiens du 14 mars, on se contentera de la portion congrue, à moins qu’ils monnayent cher leur entrée au gouvernement. La 
rotation prévue des portefeuilles promet des négociations serrées…

Zarif, le stabilisateur
A Beyrouth, le ministre iranien des Affaires étrangères, Mohammad Jawad Zarif, s’est efforcé de livrer trois types de messages destinés à expliquer la politique extérieure de Téhéran. D’abord, le soutien à la Résistance. Avant de rencontrer le secrétaire général du Hezbollah Hassan Nasrallah, Zarif a déposé, lundi, une gerbe de fleurs sur la tombe d’Imad Moghnié, un hommage dénoncé à 
Washington comme «un mauvais message». Autre priorité du ministre, la clarification de la position de son pays à la veille de la conférence de Genève II. Les remerciements du ministre au gouvernement libanais sur sa gestion «efficace» du dossier Majed el-Majed et l’appel lancé aux pays de la région «à unir leurs efforts pour faire face au takfirisme» posent la lutte contre le terrorisme islamiste comme justification de la politique iranienne en Irak ou en Syrie. Le troisième message a été lancé à Baabda. Au cours de son entretien avec le président Sleiman, Zarif a souligné «l’utilité du dialogue et des bonnes relations entre l’Iran et les pays arabes pour préserver la stabilité au Moyen-Orient». Des déclarations positives qui n’ont pas suffi au 14 mars pour dépêcher l’un de ses représentants au dîner donné par le ministre à l’hôtel Phoenicia auquel Walid Joumblatt, lui, était présent.

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