Magazine Le Mensuel

Nº 2952 du vendredi 6 juin 2014

Confidences Moyen-Orient

Confidences Moyen-Orient

Un ambassadeur syrien qui gêne
La décision du gouvernement jordanien d’expulser le très médiatique et flamboyant ambassadeur de Syrie à Amman a créé la surprise, car contrairement aux pays voisins du Golfe, les Jordaniens préféraient maintenir des relations normales avec tous les belligérants syriens. Toutefois, les positions du représentant du gouvernement syrien, l’ancien général Bahjat Suleiman, ont, selon des sources bien informées à Amman, agacé les sphères les plus hautes du pouvoir. Mais comme le diplomate syrien est hautement apprécié par le président Bachar el-Assad, le roi Abdallah a rapidement sauvé la mise en interdisant l’accès au royaume hachémite à Nasser Hariri, membre influent de la Coalition nationale, principal mouvement d’opposition. En réponse aux critiques saoudiennes, les Jordaniens se sont défendus en révélant qu’ils n’appréciaient guère l’annonce unilatérale faite par l’opposition syrienne de nommer l’homme d’affaires Mohammad Almrouh pour la représenter en Jordanie.

 

Deux gouvernements pour un seul pays!
La Libye se trouve dans une situation inédite. A la suite d’une crise à la fois ministérielle et parlementaire, deux hommes prétendent occuper en même temps le poste de Premier ministre: Abdallah el-Thinni et Ahmad Maiteg. Entre-temps, le pays est gouverné par des milices islamistes qui sèment la terreur et imposent leur loi par la force, alors que les provinces est ont déclaré leur indépendance et gèrent leurs affaires sans rendre de comptes à Tripoli. Cette situation chaotique a poussé la France et la Grande-Bretagne, les deux principaux pays concernés par la campagne militaire qui a abouti à la chute de Mouammar Kadhafi, à tenter de trouver une solution durable.

Benyamin Netanyahu le Premier ministre israélien, fait pitié à ses pires ennemis. Bibi, qui rêvait d’amender la Constitution pour accorder des pouvoirs élargis au président de la République, un poste qu’il convoite lui-même, a dû jeter l’éponge. Il a alors suivi une route encore plus périlleuse en tentant de convaincre son ennemi de toujours, l’actuel président Shimon Peres, de prolonger son mandat de neuf mois. Refus catégorique du président, forçant ainsi Bibi à trouver un nouveau poulain. Il a donc annoncé son soutien à la candidature de Silvan Shalom, avant de se rétracter 24 heures plus tard pour soutenir David Levy, et se rétracter à nouveau. En fin de compte, c’est Reuven Rivlin, qui devrait occuper le plus haut poste du pays, malgré les réticences de Netanyahu à son sujet.

Adly Mansour le président égyptien sortant, a surpris par son honnêteté et son dévouement envers son pays, sachant qu’il est rare dans les pays arabes de voir un chef d’Etat céder sa place sans rien tenter pour la garder. Cet ancien magistrat, qui a succédé à Mohammad Morsi dans des conditions très difficiles, a réussi tout au long de son année au pouvoir à ramener la confiance dans les institutions de l’Etat, sans jamais se prendre la grosse tête comme l’ont fait de nombreux dirigeants de l’Egypte avant lui.

En pointillé…
La charia islamique, en place depuis 1983 au Soudan, et renforcée depuis la prise du pouvoir par le général Omar Hassan el-Bachir, rend impossible aux citoyens de se convertir à une religion autre que l’islam. Résultat, Miriam Yehya, née musulmane, a été condamnée à mort pour s’être convertie au christianisme par amour pour son futur mari chrétien. La jeune femme de vingt-sept ans avait été arrêtée bien qu’elle soit enceinte. Elle vient d’accoucher dans sa cellule. Les autorités en place ont rejeté toutes les demandes de grâce, assurant avoir accordé un délai de trois jours à Miriam pour revenir à la religion de Mahomet et qu’elle avait refusé de saisir cette opportunité. Pire encore, la victime a dû subir cent coups de fouet sur ordre d’un imam.

Tunisie: élections en danger
La Tunisie fait face à une situation pour le moins surprenante. Le mandat présidentiel de Moncef el-Marzouki prend fin dans quelques semaines sans qu’aucune date ne soit encore fixée pour organiser un nouveau scrutin. Des sources à Tunis rapportent que le mouvement islamiste Ennahda n’a toujours pas décidé s’il présenterait son propre candidat ou s’il soutiendrait une personnalité proche. Cette incertitude a poussé le président de la commission électorale, Mohammad Sarsar, à mettre la classe politique en garde contre la possibilité de voir les scrutins présidentiel et législatif reportés. Selon lui, sa commission doit préparer en avance ces deux rendez-vous. D’où la nécessité pour les parlementaires de s’accorder sur une nouvelle date pour éviter le scénario catastrophe, jamais connu auparavant, même sous le règne de Zein el-Abidine Ben Ali. Les partis laïques, quant à eux, préfèrent attendre, craignant qu’au cas où les deux scrutins sont tenus simultanément, comme le réclament les islamistes, le pays de Bourguiba ne tombe définitivement sous la dictature d’Ennahda.
 

Cheikh Tamim n’accepte pas les leçons
Malgré les nombreuses médiations menées par plusieurs pays voisins, Doha est bien déterminé à continuer son bras de fer avec son grand frère saoudien. Après les demandes répétées de Riyad et d’Abou Dhabi à l’émir du pays, cheikh Tamim Ben Hamad Al Thani, d’expulser le flamboyant prédicateur musulman Youssef el-Qaradaoui, le nouvel émir a décidé de répondre de la même façon, en envoyant aux deux pays des listes de personnalités dont l’expulsion est requise par Doha. Fureur dans les médias saoudiens et émiratis, qui accusent Tamim de ne pas tenir parole et de se comporter en prince capricieux. Après ces derniers développements, l’été sera très chaud entre les pays du Golfe, qui devraient pourtant rester unis devant la montée en puissance de l’Iran.


Touche pas à mon drapeau
Les autorités égyptiennes ont adopté une mesure sans précédent, en interdisant, par décret, toute tentative de brûler le drapeau du pays. Une loi qui ressemble de près à celle en vigueur aux Etats-Unis, où les brûleurs de drapeaux sont jetés en prison. Mais les responsables égyptiens ont ajouté leur ingrédient personnel à la sauce, en annonçant qu’il était interdit de ne pas se mettre debout pendant l’hymne national. Les peines sont sévères en cas d’infraction. Elles peuvent atteindre un an de prison ferme. Ces mesures ciblent les islamistes, qui avaient choqué le pays lorsque leurs députés au Parlement, qui a vu le jour après la révolution, avaient refusé de se lever pour l’hymne national. Selon les disciples d’al-Banna, seule l’identité islamique doit être prise en compte.

Irak: Téhéran fait pression sur ses alliés
Les relations entre l’Iran et le Premier ministre irakien, Nouri el-Maliki, sont au beau fixe. Le soutien apporté par ce dernier à Damas dans sa guerre contre la rébellion armée a convaincu les leaders iraniens de la nécessité de voir Maliki reconduit pour un troisième mandat. Or, les leaders chiites irakiens tels Mouktada el-Sadr et Ammar el-Hakim ne veulent pas entendre parler d’un tel scénario et tentent le tout pour le tout pour convaincre Téhéran de lâcher le Premier ministre. Résultat, les tractations battent leur plein et le clan anti-Maliki s’est vu renforcé par les critiques à peine voilées du Grand Ayatollah Ali el-Sistani au chef de l’Exécutif. Mais les Iraniens maintiennent la pression et menacent leurs alliés qu’au cas où ils ne soutiendraient pas leur champion, les chiites pourraient perdre le poste de Premier ministre.

Un général iranien au pays de l’Oncle Sam
Le général iranien Ali Reza Asghari, qui avait disparu sans laisser de trace, serait, selon un livre qui vient de paraître, sur le sol américain. D’après le très respecté journaliste d’investigation Kai Bird, l’ancien chef des Gardiens de la révolution et vice-ministre de la Défense aurait fait défection en 2006, alors que George W. Bush occupait la Maison-Blanche, révélant à l’Administration américaine les secrets les mieux gardés du programme nucléaire iranien. Un plan bien orchestré par la CIA, qui avait aidé le général et sa famille à fuir par la Turquie, où il s’était rendu sous prétexte de vouloir y passer des vacances de fin d’année. Il faut rappeler que le président iranien de l’époque, Mahmoud Ahmadinejad, avait accusé le Mossad et la CIA d’avoir assassiné ce haut responsable du régime.

20 milliards de dollars est le montant des investissements et des revenus attendus sur l’île de Chypre si un accord de paix est signé entre les gouvernements grec et turc chypriotes. C’est du moins ce qu’assure une étude menée par des experts norvégiens, selon laquelle le seul moyen pour les habitants de l’île de sortir de la crise économique qui déchire le pays depuis près de deux ans, serait de conclure un accord mettant fin à la division qui règne depuis 1974. Mieux encore, les experts ont noté que si ce rêve venait à se réaliser, chaque citoyen bénéficierait d’un supplément de 12000 euros de revenus annuels sur une période de vingt ans. C’est surtout une bonne nouvelle pour les quelques milliers de chypriotes du Nord, qui vivent dans des conditions déplorables et ne survivent que grâce à l’aide financière turque, car leur pays n’est reconnu par aucun autre Etat. Mais l’économie n’a jamais été le point fort de Recep Tayyip Erdogan qui s’obstine à refuser toute solution pacifique.

144 milliards de dollars est le total des pertes subies par l’économie syrienne, selon un centre de recherche syrien qui a effectué une étude en collaboration avec les Nations unies. Les trois années de guerre auraient détruit à ce jour une grande partie des infrastructures du pays, alors que la main-d’œuvre s’est réfugiée dans les pays voisins. Pire encore, la guerre a fait des Syriens les citoyens les plus pauvres du monde, avec 75% de la population vivant sous le seuil de la pauvreté. L’étude a aussi révélé que près de trois millions de personnes ont perdu leur travail, leurs entreprises et leurs usines fermées, pillées ou détruites. Plus de 60% de la population active est au chômage, alors que ce chiffre ne dépassait pas les 28% en 2010. Des chiffres catastrophiques.

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