Magazine Le Mensuel

Nº 2850 du vendredi 22 juin 2012

En Couverture

Baalbeck. Une adresse évasion

 

Où aller en été?
Des vacances différentes

Carte du Liban en main, il est temps d’aller fouiner dans les arrière-cours des sites touristiques habituels du Liban. Magazine vous propose d’ouvrir les yeux sur le parcours qui mène au plus impressionnant des sites archéologiques du Liban, Baalbeck.

«Rien ne sert de courir, il faut partir à point», pourrait conseiller Jean de la Fontaine. Et il aurait bien raison. Pour aller jusqu’à Baalbeck de Beyrouth, il faut emprunter la chaotique route de Damas, où poids lourds, voiturettes et Hummer se font la course pour savoir qui aura le maillot à pois rouge du meilleur grimpeur. Et les prévisions de bison futé sont catégoriques d’avance. Pour sortir de Beyrouth jusqu’aux environs de Baabda, il faudra vous armer de patience pour défier les embouteillages et travaux centenaires qui permettent de commencer par un petit rallye cette expédition dans la Békaa. Au niveau de Jamhour, le bâtiment de l’ancienne chocolaterie Président, détient encore, paraît-il, toutes ses machines à l’intérieur, de quoi rêver d’une reprise des activités de la marque qui évoque à plus d’un Libanais une nostalgie gourmande. Bientôt, Aley apparaît suivi de Bhamdoum où l’actuelle autoroute internationale, passe juste devant le bâtiment de la gare des chemins de fer de la ville. Curiosité des plus intéressantes: la synagogue de Bhamdoun et son escalier magistral, où se sont invitées une pléthore de marguerites, recouvrant la pierre d’un manteau blanc, et des inscriptions hébraïques pratiquement effacées sur des stèles en pierre à même le mur, permettent de certifier l’origine du bâtiment. A l’intérieur, on y décèle encore des tonalités de jaune, bleu et de rose.
Aley et Bhamdoun étaient jadis des villégiatures très appréciées en été par la bourgeoisie beyrouthine, en recherche d’air frais dans les hauteurs. De part et d’autre de la route, malheureusement, la Guerre civile a laissé son lot de drames humains. Beaucoup d’anciennes maisons restent abandonnées. Et dans la trilogie des villes estivales préférées par les Beyrouthins, Sofar accompagne les deux premières. Une petite rue à double sens la traverse, s’assimilant plus avec ses platanes, à une route de sud de la France qu’à la route internationale qui mène à Damas. De vieilles villas, rénovées ou délaissées, sont positionnées de chaque côté de la petite rue. Au centre du village, le grand hôtel de Sofar, propriété de la famille Sursock, majestueux de présence, suscite l’intérêt. Impossible de ne pas être surpris par ce bâtiment qui a des allures d’académie européenne. Gravement endommagé par un incendie, seul son rez-de-chaussée est encore accessible en partie. Du faste d’antan, il reste certainement l’emplacement d’un ancien café aux grandes portes vitrées, où errent quelques tables pour joueurs de cartes et des chaises en bois empilées dans un coin. Des affiches laissées à même le sol à l’effigie du Super night club «The Monkey Bar», laisse imaginer des jours passés enjoués dans ce lieu de mémoire. Dans la cuisine, une grande étagère en bois supporte encore des services à thé et des vieilles factures des années 60 jonchent également le sol.
Mais il est temps de rejoindre Zahlé et effectuer quelques premiers pas dans la Békaa. Tout au début de la ville, les caves «romaines» de Ksara accueillent les curieux de passage ou les connaisseurs de vins pour leur faire déguster quelques-uns de leurs cépages et faire le tour du propriétaire, cela en échange d’une dose de bonne humeur. Un Château Ksara, hérité par les Pères Jésuites en 1857 avec ses 25 hectares de terre, qui se voit rapidement devenir un vignoble. Comme souvent dans les lieux d’exception, l’histoire des Caves de Ksara est peu commune. En 1898, l’anecdote raconte que l'hiver étant particulièrement froid, et le travail de la vigne impossible, Jean Gharios, un orphelin travaillant pour les Jésuites, obtient la permission de la part de Frère Guichard d'aller à la recherche de galeries qu'une fable locale décrivait. En voulant enfumer un renard dans un trou, Gharios et ses amis découvrent alors des galeries souterraines datant de l'époque romaine. Depuis, Ksara a changé de propriétaire, et ses vins sont parmi les plus appréciés du marché local. Un apéritif bien senti avant de se rendre dans la vieille ville de Zahlé pour déjeuner dans le fief de la gastronomie libanaise et goûter aux fameux kebbé zahliotes à côté des rives du Berdawni, où une tripoté de restaurants se disputent les promeneurs.
Avant de reprendre la route et parcourir les derniers 30 km pour arriver à Baalbeck, une promenade digestive s’impose avec les quelques mezzés délectés auparavant. Encore peu connu des circuits touristiques et pour cause, puisque le site est officiellement interdit d’accès, il est pourtant inévitable d’aller faire un tour du côté du centre névralgique du chemin de fer libanais du début du XXe siècle, Rayak, et tenter sa chance auprès des gardiens pour savoir s’ils vous accorderont le précieux sésame en vous accompagnant dans la visite impressionnante du site. Ici, plus que dans n’importe quel autre lieu du Liban, vous aurez l’impression d’être dans un musée à ciel ouvert. Des dizaines de locomotives ou wagons sont éparpillés ici et là, sur des rails, dans des dépôts troués de toutes parts ou dans l’atelier en attente de réparations. Le lieu est à ne pas manquer.
«A l’horizon, un groupe immense de ruines jaunes, la merveille du désert, la fabuleuse Baalbeck qui sortait tout éclatante de son sépulcre inconnu, pour nous raconter des âges dont l’histoire a perdu la mémoire», dépeint Alphonse de Lamartine dans Son Voyage en Orient alors qu’il arrive de Beyrouth en caravane. Le site est effectivement le plus étonnant du Liban du point de vue de l’héritage antique. Sa construction serait d’ailleurs plus mystérieuse que l’édification des pyramides d’Egypte. Chaque été, les ruines de Baalbeck reprennent vie grâce au Festival de Baalbeck qui accueillera cette année, entre autres, en juillet, le chanteur Zucchero, la diva Jessye Norman ou encore l’emblématique groupe libanais, Mashrou’ Leila. A quelques mètres de l’entrée du site, la carrière romaine, moins visitée, expose un monolithe de 1000 tonnes que les romains voulaient utiliser comme Podium pour le temple de Jupiter, finalement jamais achevé.
En revenant vers Zahlé, il est possible alors de ne plus se confronter à l’autoroute montagneuse en direction de Beyrouth et préférer une petite nationale serpentant dans la montagne. Débutant dans les hauteurs de Zahlé, elle se dirige vers le Bois de Boulogne, autre lieu anthologique des années d’or du Liban, dont l’abondance des pins parasols était le principal atout pour passer l’été au frais. Cette jolie route traverse des villages parsemés de vieilles demeures et propose des paysages magnifiques, jusqu’à retrouver la banlieue de Beyrouth à Jal el-Dib. Un parcours à emprunter sans modération! Delphine Darmency

Quelques mots d’Histoire
Les temples de Baalbeck furent construits sur un tell dont les origines datent du IIIe millénaire avant J.C. L’élaboration des temples romains commencèrent à la fin du Ier siècle avant J.C. sous l’empereur Auguste, puis au IIIe siècle après J.C., alors que le christianisme devint religion officielle, les travaux en cours furent arrêtés. Un siècle plus tard, l’empereur Théodose mettait fin aux cultes païens en détruisant leurs symboles les plus sacrés, à savoir les autels de la grande cour, en les remplaçant par une basilique. En 636, lors des conquêtes arabes, les temples furent transformés en citadelle. La première mission archéologique de prospection et de restauration du site a eu lieu en 1898 par les Allemands.

 


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