Magazine Le Mensuel

Nº 2920 du vendredi 25 octobre 2013

Confidences Moyen-Orient

Confidences Moyen-Orient

Règlements de comptes en Libye
La ville libyenne de Benghazi sombre dans le chaos depuis la chute du colonel Mouammar Kadhafi. Raisons de cette situation, l’absence totale des forces de l’ordre gouvernementales, qui laissent les milices armées imposer leur loi sur la population locale. Chaque jour, d’anciens révolutionnaires sont victimes de règlements de comptes, sans que les coupables ne soient inquiétés. Dernière victime, le colonel Saad el-Faytouri, dont le corps décapité a été retrouvé à l’intérieur de la ville après une attaque par des hommes armés. Le colonel avait joué un rôle primordial dans la révolution libyenne et avait même commandité une opération secrète pour assassiner Kadhafi. Moustafa Abdel-Jalil, ancien président du Conseil transitoire, a regretté cette disparition, ajoutant que Faytouri «était le gardien des secrets de la révolution». C’est peut-être la raison pour laquelle il a été liquidé.  

 

Le slogan est mort
Selon l’ancien président iranien Hachémi Rafsandjani, le slogan phare de la révolution islamique de 1979 «Mort à l’Amérique» n’a plus raison d’être. Le leader réformateur a enfoncé le clou en prétendant que l’imam Khomeiny avait fini par se lasser de ce slogan et aurait demandé à ses proches de ne plus le répéter. Fureur parmi les Gardiens de la révolution, qui se présentent comme les gardiens de la doctrine et refusent toute réconciliation avec Washington. Mohammad Ali Jaafari, un des leaders les plus intransigeants des gardiens, a ainsi rétorqué que «le peuple iranien ne croira jamais ceux qui prétendent que l’imam Khomeiny s’opposait à ce slogan».


Abdallah II, roi de Jordanie, vient de prendre une décision historique en interdisant le jugement des civils devant les cours martiales. Le gouvernement s’est réuni sur-le-champ pour rédiger une proposition de loi dans ce sens avant de l’envoyer au Parlement, qui l’a adoptée sans difficulté. Depuis plusieurs années, la société civile jordanienne demande l’introduction de cette réforme, considérée primordiale pour la construction d’un Etat moderne. Alors que les partis d’opposition nationalistes et laïques ont salué ce geste, les islamistes ont préféré garder un silence absolu à ce sujet. Il est clair que les Frères musulmans ne sont toujours pas prêts à négocier avec le régime, malgré toutes les tentatives du palais de tourner la page afin d’éviter un scénario à l’égyptienne.

Mechaal persona non grata
Après avoir quitté Damas en 2011, le leader du mouvement palestinien islamiste Hamas, Khaled Mechaal, ne trouve pas un pays prêt à l’accueillir d’une façon permanente. Abou el-Walid avait fui la capitale des Omeyades pour se démarquer du régime syrien, avec lequel son mouvement s’était allié depuis le début des années 90. Seul Doha avait alors accepté de le recevoir provisoirement, et Mechaal espérait pouvoir faire du Caire son nouveau QG. Mais la chute de Mohammad Morsi a compliqué la situation et toutes les tentatives déployées auprès des autorités turques, jordaniennes et soudanaises ont échoué. Mechaal, fera-t-il son mea-culpa pour que le président Bachar el-Assad lui permette de regagner Damas?

 

Saadoun el-Dulaimi ministre irakien de la Culture et ministre de la Défense par intérim, ne fait pas vraiment l’unanimité au Pays des deux fleuves. Dans certains milieux artistiques et culturels, on se plaint de ce ministre encombrant qui ne comprend rien à l’art. Ainsi, Dulaimi refuse que son ministère supervise ou finance tout événement musical et toute pièce de théâtre. De telles activités, selon lui, «nuisent aux valeurs islamiques». Seules les célébrations d’ordre politique ou religieux sont encouragées, ce qui pousse les intellectuels irakiens à réclamer la démission immédiate du ministre rétrograde. 

 

Les Chébbab tirent leur dernière cartouche
Le mouvement somalien des Chébbab, qui proclame haut et fort son alliance avec l’organisation al-Qaïda, avait réussi en 2006 après l’invasion éthiopienne, à contrôler la plus grande partie du pays. Auparavant, le mouvement dénombrait plus de dix mille combattants et jouissait même du soutien de la population qui refusait l’intervention d’Addis-Abeba dans les affaires internes du pays. Mais les choses ont bien changé. Désormais, une partie infime du sud de la Somalie est contrôlée par les Chebbab, qui se sont mis à dos la population à cause des exactions et des exécutions sommaires. C’est probablement la raison pour laquelle les jihadistes ont mené leurs opérations terroristes au Kenya voisin, afin de prouver qu’ils sont toujours présents et qu’ils ne sont pas prêts à rendre les armes.

En pointillé…
Le Premier ministre irakien, Nouri el-Maliki, ressemble de plus en plus à l’ancien président Saddam Hussein. Non seulement il refuse de céder sa place, mais de plus il arrête et harcèle tous ceux qui s’opposent à lui. Alors que Saddam était le champion de la communauté sunnite, Maliki se présente comme le défenseur des chiites et non comme un véritable homme d’Etat. Cerise sur le gâteau: le chef de l’Exécutif semble imiter le tyran même dans ses plus mauvais choix, puisqu’il vient de propulser son fils Ahmad à l’avant-plan. Ce fils prodige est désormais le «policier» de la Zone verte et ses ordres sont appliqués à la lettre bien qu’il ne jouisse d’aucun titre officiel. Tel un Ali Abdallah Saleh ou un Hosni Moubarak, Maliki confond Etat et famille.

 

Museveni enterre la hache de guerre
Les relations entre Khartoum et Kampala étaient au plus bas depuis de nombreuses années à cause du soutien apporté par le régime du président Yoweri Museveni aux rebelles séparatistes du Sud. Mais tout cela pourrait être oublié, Khartoum étant désormais prêt à ouvrir une nouvelle page avec son meilleur ennemi depuis la rencontre à Addis-Abeba du président Omar Hassan el-Bachir avec son homologue ougandais. Une rencontre durant laquelle Museveni aurait promis de couper l’assistance apportée au mouvement de libération du Soudan, convaincu que les Soudanais devraient résoudre leurs propres problèmes. Khartoum a, de son côté, promis d’expulser les chefs de l’Armée de résistance du seigneur, une mouvance ougandaise qui mène une guerre sans merci contre le gouvernement. Si tel est le cas, ce serait une très bonne nouvelle, Joseph Kony, chef des rebelles, étant poursuivi par la Cour de justice internationale pour crimes de guerre.

Rohani persiste et signe
Le président iranien Hassan Rohani, sévèrement critiqué par les conservateurs après sa communication téléphonique avec le président américain Barack Obama, ne se laissera pas intimider. Il poursuit le programme qu’il avait promis d’appliquer en y apportant plus de démocratie et de droits au peuple iranien. Son dernier projet: annuler toutes les restrictions imposées aux chercheurs et académiciens qui voudraient participer à des conférences internationales. «Tout gouvernement devrait avoir honte si ses instituteurs et élèves se trouvent incapables d’exprimer librement leurs opinions. Voilà pourquoi mon gouvernement ne cèdera pas aux pressions et aux menaces à ce sujet». Rohani a appelé les services de renseignement de son pays à avoir plus confiance dans les professeurs d’université, rappelant que ceux-ci représentaient la moitié des membres de son cabinet.

Le plan Bouteflika trébuche
Les analystes à Alger n’arrivent plus à déchiffrer les messages codés qui proviennent de l’entourage du président Abdel-Aziz Bouteflika. Chaque semaine, un nouveau scénario se dessine pour les présidentielles de 2014, empêchant l’opposition de mettre en place un contre-plan. Ces mêmes analystes assurent que le projet de prolonger de deux ans le mandat présidentiel, présenté en grande pompe, est tombé à l’eau à cause de l’opposition de l’armée et des principaux leaders du Front de libération nationale. Ceci a forcé le chef de l’Etat à se rétracter, sans pour autant révéler s’il serait candidat à sa propre succession ou non. La piste la plus probable est l’élection de Bouteflika pour un quatrième mandat, malgré son état de santé qui ne lui permet même pas de prendre part à la campagne présidentielle. En contrepartie, le Premier ministre Abdelmalek Selal, apprécié par le parti majoritaire et les généraux, verrait ses pouvoirs élargis, devenant ainsi le véritable homme fort du pays.

92000 policiers tunisiens sont aujourd’hui actifs, alors que leur nombre ne dépassait pas les 40000 en 2010. Or sous Ben Ali, les condamnations se multipliaient contre l’Etat policier qui limitait les libertés de la presse et d’expression. Des plaintes surtout déposées par les islamistes du mouvement Ennahda qui, une fois au pouvoir, y ont remédié en doublant le nombre d’effectifs de la police! Ce développement inquiète les observateurs qui relèvent que sous l’ancien régime, les opposants politiques étaient emprisonnés ou forcés à l’exil, tandis que sous Ennahda et alors que le nombre de policiers a augmenté, les opposants sont abattus en pleine rue. Pire encore, les 50000 nouvelles recrues sympathiseraient avec Ennahda, exécutant sans hésitation les ordres du chef du mouvement cheikh Rached Ghannouchi. Le Pays de Bourguiba se trouve ainsi pris en otage par les islamistes qui ont su étendre leur filet sur toutes les institutions de l’Etat en toute discrétion, à l’opposé de leurs confrères égyptiens. Faut-il s’étonner si Moncef Marzouki n’est qu’un figurant?  

1749 est l’année durant laquelle le clan Bousaïd a pris le pouvoir à Mascate. Depuis, le pouvoir se transmet de père en fils, permettant à Qaboos Ben Saïd Al Saïd d’accéder au trône en 1970. A 73 ans, il n’a pas d’héritier, puisque son premier et unique mariage avec sa cousine Kamila n’a duré que quelques mois. A son décès, la famille Saïd fera face à un difficile dilemme: Qui lui succédera? Une situation qui pourrait dégénérer, la rue à Oman bouillonne sans que le pouvoir n’arrive à mettre fin à la grogne sociale. Personne dans sa famille ne jouit de son autorité et de sa notoriété, ce qui pourrait mettre en danger 300 ans de règne. Affaire à suivre.        

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