Magazine Le Mensuel

Nº 2937 du vendredi 21 février 2014

Presse étrangère

Les guerres de l’ombre

Le Liban, tel que décrit cette semaine dans la presse étrangère, est le théâtre d’opérations souterraines qui vont de pair avec une activité diplomatique accrue.   

AL-HAYAT
Région: Moyen-Orient.
Pays: Arabie saoudite.
Périodicité: quotidien.
Diffusion: 130000 exemplaires.

Dans les colonnes du quotidien panarabe, le journaliste saoudien Ahmad Adnan salue l’initiative du royaume sur la question des ressortissants mêlés aux activités terroristes et appelle les autorités à traiter le Hezbollah de la même façon.
La prise de conscience par les autorités de la nécessité de la lutte contre le terrorisme ne doit pas exclure le Hezbollah au Liban de ce champ. Le parti est accusé de l’assassinat du Premier ministre Rafic Hariri et de ses compagnons martyrs de la révolution du Cèdre, et refuse de déférer les suspects au Tribunal international chargé de juger cette affaire. Si nous voulons lister les crimes commis par le Hezbollah, un article ne suffirait pas, il faudrait un livre; pareil pour les crimes du parti hors des frontières du Liban. La bonne approche pour résoudre ce dilemme commence par un accord arabe sur la lutte contre le terrorisme. Comme le Liban, tous les pays arabes sont touchés par celui-ci.
Il est demandé à la Ligue arabe et au Conseil de coopération du Golfe, d’acter explicitement et sans équivoque du fait que le parti de Dieu est une organisation terroriste. Il devient alors obligatoire d’isoler l’aile militaire de l’organisation de sa machine politique, dont la présence au Parlement et au gouvernement fait d’elle un partenaire officiel au sein de l’Etat libanais.  

EL PAIS
Pays: Espagne.
Périodicité: quotidien.
Diffusion: 370000 exemplaires par jour.

Le quotidien espagnol de référence s’est intéressé à un Algérien, Saïd Sahnoune, qui a effectué des missions pour le compte du Mossad sur des cibles libanaises. Explications:
Il a été contacté par le Mossad, pour la première fois, en 1998, après qu’il eut publié un article sur le Premier ministre israélien Yitzhak Rabin. Ce premier contact a été le véritable départ d’une longue relation entre le journaliste algérien et le Mossad. En usant de sa qualité de journaliste, il espionnait pour les services de renseignement israéliens à Abidjan en Côte d’Ivoire. Il était chargé de la surveillance de la colonie libanaise chiite en Afrique de l’Ouest. Sahnoune espionnait également en Tunisie, mais surtout au Liban après le retrait d’Israël du sud du pays qu’il occupait jusqu’en 2000. Selon le journaliste algérien, le Mossad s’intéressait à un Libanais qui avait travaillé pour l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), ainsi qu’à un ancien ambassadeur du Liban, un militaire et un couple de chiites dans le Sud.
Selon une source digne de foi, les services de renseignement algériens sont sur les traces de cinq agents du Mossad qui, selon la même source, se seraient infiltrés de façon «régulière» sur le territoire algérien, via des aéroports nationaux. Mieux, la même source, bien informée sur le dossier, indique qu’il s’agit d’espions de nationalités syrienne et libanaise qui se font passer pour des hommes d’affaires désireux d’investir dans le marché algérien.

LE FIGARO
Pays: France.
Périodicité: quotidien.
Diffusion: 360000 exemplaires.

Dans le quotidien français, Georges Malbrunot s’est intéressé aux nouvelles activités de Jamil el-Sayyed.
Voilà une affaire qui va soulever des vagues entre Paris et Beyrouth. Dans la plus grande discrétion, le général Jamil el-Sayyed, ancien patron de la Sûreté générale et l’un des principaux architectes de la mainmise syrienne sur le Liban, cherche à se faire nommer délégué représentant des îles Marshall auprès de l’Unesco à son siège parisien. Grâce à l’immunité diplomatique dont il disposerait, l’ancien maître espion éviterait d’éventuelles poursuites du Tribunal spécial pour le Liban (TSL). L’Unesco, qui n’a pas les moyens de s’opposer à cette nomination dès lors qu’elle émane d’un Etat souverain, est embarrassé.
Selon nos informations, les minuscules îles Marshall, peuplées de 60000 âmes dans le nord de l’océan Pacifique, ont bien notifié à l’Unesco la candidature du général Sayyed pour les représenter. «Cela crée un vif émoi au sein de l’organisation, constate un diplomate arabe. Le général libanais n’a pourtant pas toujours été infréquentable. Pendant des années, ce petit homme au regard perçant a activement coopéré avec les services de renseignement français, mais aussi américains, dans la lutte antiterroriste.

THE WALL STREET JOURNAL
Pays: Etats-Unis.
Périodicité: quotidien.
Diffusion: 2400000 exemplaires par jour.

«Le trilinguisme confus du Liban sous-tend sa crise d’identité», titre cette semaine le journal économique.
Le refrain «Hi! Kifak? Ça va!» est une vieille plaisanterie qui moque le trilinguisme confus qui règne au Liban. Récemment, le mot «indépendance», imprimé sur les nouveaux billets de banque, a été l’objet d’une polémique à ce sujet. Pour les Libanais, la question de la langue usitée a longtemps été source de confusion, pour les investisseurs ou les concepteurs de campagnes politiques. Incapable de lire l’arabe, une grande partie des Beyrouthins ont l’anglais comme langue première. Dans le Nord et le Sud, c’est l’arabe qui prédomine, alors que dans les montagnes, le français garde encore une forte place.
En raison des inégalités économiques du pays, Beyrouth et Tripoli, séparés de 80 km seulement, semblent être dans deux continents différents. Les affiches publicitaires en anglais à la gloire d’une marque de vêtements dans la capitale chic tranchent vraiment avec celles des quartiers défavorisés de la capitale du Nord, où les rares publicités en arabe font la promotion de biens ménagers de base comme les détergents.
Pia Bou Khater a créé Buzzle en 2012, un puzzle en langue arabe destiné aux enfants. «Certaines personnes étaient vraiment ravies, en disant qu’enfin il y a un jeu pour les enfants en arabe. Les autres m’ont demandé pourquoi il n’était pas en anglais».

THE CHRISTIAN SCIENCE MONITOR
Pays: Etats-Unis.
Genre: site Internet.
Diffusion: 50000 visiteurs uniques par jour.

«Quel rôle pour Obama dans le fossé qui se creuse dans le monde islamique?», se demande le site Internet.
Avec sa prochaine visite en Arabie saoudite et l’ouverture de nouvelles négociations avec l’Iran, le président Obama va pouvoir poser les pierres de la réconciliation entre les deux géants musulmans.
En général, les présidents américains ne se mêlent pas des querelles religieuses. Pourtant, en tentant de retisser les liens avec l’Iran et l’Arabie saoudite, Barack Obama s’invite dans la querelle historique qui oppose les chiites aux sunnites. S’il pouvait, au minimum, préparer le terrain à une réconciliation entre les deux pays, il pourrait aider les deux principales branches de l’islam à combler un immense fossé.
Le temps est venu pour Obama de réussir. La guerre civile en Syrie, où l’Iran, avec à ses côtés ses alliés chiites, affronte l’Arabie saoudite et ses militants sunnites, est devenue une catastrophe humanitaire à l’échelle mondiale. La guerre s’étend dans les pays voisins, menaçant d’une crise régionale à grande échelle.
Ni l’Arabie saoudite ni l’Iran ne peuvent se considérer des ennemis pour toujours. Les progrès dans les technologies de guerre, notamment sur la question nucléaire, étayent le souhait. Tout comme les aspirations croissantes de paix et de progrès au sein des nouvelles générations dans ces deux pays. Le système de pouvoir en vigueur dans ces pays, qu’il soit théocratique ou monarchique, a atteint ses limites dans le monde globalisé d’aujourd’hui.

Julien Abi Ramia

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Cette semaine, dans la presse internationale, l’actualité libanaise se résume principalement à l’évolution de la situation sécuritaire du pays, décrite à coups de dépêches d’agence ou d’analyses succinctes, qui vit au rythme de la montée des tensions entre le terrorisme islamiste et le Hezbollah. La presse française remet sur le devant de la scène l’affaire dite Dassault, du nom du maire de Corbeil qui aurait utilisé les circuits financiers libanais pour des opérations illégales d’achats de voix. 

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