Magazine Le Mensuel

Nº 3010 du vendredi 17 juillet 2015

Confidences Liban

Confidences Liban

Le leadership de Mikati inquiète Hariri
Conclusion d’une entente entre le président Saad Hariri et le député Mohammad Safadi. L’ex-Premier ministre a finalement réussi à regagner la sympathie du député de Tripoli mettant fin à une rupture qui remonte à la formation du cabinet Mikati. Ce qui n’est pas le cas avec l’ex-ministre Fayçal Karamé qui reste attaché à ses particularités, c’est-à-dire à des relations équilibrées avec Najib Mikati et Saad Hariri. Selon des sources qui ont suivi de près les rencontres de ce dernier à Jeddah, avec les responsables du Moustaqbal, qui étaient en grande partie consacrées à Tripoli, les derniers sondages d’opinion menés auprès des Tripolitains ont montré que Mikati est le leader numéro un de la ville, sans compter l’extension de son influence à Dennié, Minié et dans le Akkar. Ce qui constitue une source de forte inquiétude pour Saad Hariri. L’unification des divers courants du Moustaqbal au Nord a pour but principal de réduire l’influence du président Mikati dans la région.

Différend sous contrôle
Tension entre le président Nabih Berry et le général Michel Aoun. Mais le différend qui oppose les deux hommes reste sous contrôle. Derniers indices de la tension: la polémique déclenchée entre Berry et Aoun et l’absence des ministres d’Amal (Ali Hassan Khalil et Ghazi Zeaïter) de la réunion du ministère des Affaires étrangères qui a regroupé les ministres du CPL, des Marada, du Tachnag et du Hezbollah… Les milieux du président de la Chambre indiquent que les deux ministres d’Amal n’ont pas été conviés à cette réunion, ce qui signifie que le mouvement de Berry ne figure pas sur la liste des alliés de Aoun.

 

Où se situe Berry?
Ceux qui adhèrent aux thèses aounistes vont jusqu’à dire que «le président Nabih Berry, à travers son accord avec le Moustaqbal et le président Tammam Salam sur la tenue d’un Conseil des ministres et l’ouverture d’une session extraordinaire du Parlement, fait désormais partie du problème. Surtout qu’il sait très bien que le général Michel Aoun est attaché à ses positions et qu’il est impossible de lui imposer une solution comme un fait accompli. La seule sortie de crise acceptable passe par une entente qui satisfait tous les acteurs politiques».

Les Kataëb se positionnent
A l’issue de sa visite au président Tammam Salam, le chef des Kataëb, Samy Gemayel, a condamné tout blocage du gouvernement. Il aurait fait savoir au président du Conseil qu’il faudrait poursuivre le débat sur l’ordre du jour et reconduire le mécanisme de prise de décision par consensus entre les divers membres du cabinet. Il a aussi informé le Premier ministre que les Kataëb sont opposés à l’ouverture d’une session extraordinaire.
Des sources informées résument la position des Kataëb en cinq titres:
– Prise de décision dans le respect de l’égalité entre toutes les composantes du gouvernement sans exception.
– Eviter de prendre le consensus pour prétexte dans le but de paralyser le cabinet. Les craintes qui méritent d’être prises en considération doivent être explorées. Mais si l’idée est de bloquer la prise de décision, on pourra recourir au vote à la majorité.
– Le recours à cette modalité ne se décide pas à l’avance mais au moment du débat sur chaque sujet inscrit à l’ordre du jour et pas avant.
– La nécessité de réduire les dépenses publiques et d’adopter une politique de transparence dans un pays où la dette publique a atteint son plus haut plafond.
– Les nominations sécuritaires et militaires doivent être examinées dans les délais prévus par respect pour les institutions.

Hale prévoit une explosion
L’ambassadeur des Etats-Unis, David Hale, aurait mis en garde les personnes rencontrées contre une grande explosion politique en septembre. Mais des diplomates américains ont prévu, en revanche, une décrispation en octobre à la suite d’un règlement politique global au Liban incluant la présidence de la République. Le sultanat d’Oman aurait un rôle à jouer dans ce dénouement.
Le sultanat, révèlent ces diplomates, sera chargé de renouer le dialogue rompu entre Riyad et Téhéran, en même temps que prendront fin les arrangements sur le terrain, ce qui explique la bataille de Zabadani qui déterminera la situation dans le jurd du Qalamoun et de Ersal avant la fin de l’été.

Mutations diplomatiques françaises
Le nouvel ambassadeur de France, Emmanuel Bonne, débarque au Liban durant la première quinzaine d’août, alors que Patrice Paoli s’envolera pour Paris où il sera en charge de la gestion des crises au Quai d’Orsay. Le directeur de la région Moyen-Orient et Afrique du Nord aux Affaires étrangères, Jean-François Girault, a été accrédité, quant à lui, comme ambassadeur de France au Maroc où il se rendra après les vacances d’été.
Le successeur de Girault est un diplomate connu. Il s’agit de l’actuel ambassadeur de France en Espagne, Jérôme Bonnafont, qui fut le porte-parole officiel de la présidence sous le mandat Chirac. Il avait visité le Liban à plusieurs reprises en 2005, lors de l’assassinat du président Rafic Hariri. Bonnafont a également occupé le poste de directeur du bureau de l’ex-Premier ministre et ministre des Affaires étrangères, Alain Juppé, à la fin du mandat Sarkozy.

Les quatre étapes de la bataille
La bataille du général Michel Aoun pour l’accession à la présidence se fera sur quatre étapes selon un politique chevronné:
– Première étape: il était le candidat le plus fort au point que tout le monde avait admis qu’il était impossible de l’ignorer.
– Deuxième étape: il est devenu l’électeur le plus fort, ayant le pouvoir de nommer qui il veut contre le renoncement à sa propre candidature.
– Troisième étape: Aoun n’est plus ni le candidat le plus fort, ni l’électeur le plus influent. Il est devenu l’opposant numéro un qui détient le droit de veto. Nous sommes actuellement à cette étape.
– Quatrième étape: si Aoun laisse passer l’occasion qui s’offre à lui de participer au choix du futur président, il perdra même son droit de veto. Comme en 2008, le président lui sera imposé.
 

Le Hezbollah calme les aounistes
Le Hezbollah, comme le rapportent ses milieux, est tranquille quant aux développements en cours, conscient que la situation a besoin de temps pour se décanter. Mais il estime qu’au bout du compte, elle évoluera dans l’intérêt de l’axe de la résistance. En attendant, le parti chiite œuvre sur la scène libanaise sur deux lignes parallèles: le dosage de la frénésie du général Michel Aoun au niveau interne, et la sauvegarde des éléments de force militaire à la frontière.
La priorité est de domestiquer les ardeurs parce qu’il ne faut pas brûler les étapes susceptibles de déclencher un grand incendie que le Hezbollah cherche à empêcher. Le conseil donné à Aoun est d’éviter tout effondrement de la structure interne qui assure quand même un minimum de stabilité.
Tant que ce plafond est respecté, le parti de Nasrallah est prêt à soutenir les revendications aounistes, mais il estime que la gestion des provocations du Moustaqbal doit être menée avec patience sans se laisser entraîner à commettre des erreurs. Il faut savoir tenir et conserver ses atouts jusqu’à ce que les dossiers régionaux soient mis sur la table, ce qui nécessite une gestion rationnelle de la bataille avec le Moustaqbal dont les éclats ne doivent pas atteindre le président Nabih Berry.

 

Le feu couve au camp de Chatila
La querelle qui a eu lieu au camp de Chatila, dimanche soir, et qui s’est soldée par un mort n’était pas surprenante. L’incident avait été précédé par un accrochage armé, passé sous silence, qui remontait à deux semaines plus tôt. Les tirs avaient atteint les quartiers voisins. Des sources palestiniennes signalent que les milieux du crime organisé et du terrorisme islamiste s’entremêlent dans les camps dans l’indifférence des forces politiques. Surtout qu’il existe des affinités entre les éléments terroristes et certains mouvements palestiniens dont le Hamas qui est accusé d’exploiter ces éléments pour étendre son hégémonie sur l’ensemble des camps du Liban. Les sources citent le cas du takfiriste Fadi Saleh du camp de Aïn el-Heloué. Saleh a failli reproduire l’expérience du cheikh Ahmad el-Assir dans le camp en créant un lieu de prière (Moussala el-Makdissi) vers lequel il a commencé à attirer les jeunes. Avec l’argent qui a coulé à flots, il a fait une mosquée avant de prendre le contrôle du quartier en empêchant les «hérétiques» du Fateh d’y pénétrer. Hamas, qui entretenait d’excellentes relations avec Saleh, a organisé sa fuite lors de l’accrochage qui a eu lieu entre ses sympathisants et les éléments du Fateh. Aujourd’hui, c’est le Hamas qui maîtrise la mosquée et le quartier.

 

Les interdits qui s’imposent
La confrontation interne restera ouverte, de l’avis des proches d’une haute instance politique, parce que les circonstances actuelles ne sont pas propices à un règlement du litige. Il existe cependant des interdits qui s’imposent à tous les acteurs de cette confrontation. Sont interdits, le renversement du gouvernement et l’effondrement politique (la liberté d’expression et de protestations est autorisée à condition de respecter le maintien de la stabilité). L’adoption d’une ligne de conduite consensuelle au sein du gouvernement vise à protéger l’Etat et son action. Ces milieux estiment aussi que la signature de l’accord sur le nucléaire aura des effets positifs sur la scène interne sans que cela veuille dire que toutes les solutions seront trouvées comme par miracle pour mettre fin aux divergences politiques. Le consensus, conclut cette instance, implique le report de la prise de décision sur le mécanisme d’action gouvernementale, tout comme l’attachement à l’apaisement et au respect de la fonction du président Tammam Salam.

 

Les militaires otages sont à Ersal
Les otages militaires, retenus par le Front al-Nosra, sont au nombre de 15. Ils seraient quelque part à l’intérieur du village de Ersal et non dans le jurd, comme on le dit, et placés sous le contrôle du cheikh M. H, membre du Comité des ulémas musulmans et ex-combattant dans les rangs d’al-Qaïda en Afghanistan. Quant aux douze otages qui sont à la merci du mouvement Daech, ils seraient retenus dans le jurd de Ersal et, plus précisément, dans un abri sous terre qu’une organisation armée non libanaise avait creusé à la fin du siècle dernier. Ces informations sont véhiculées par des milieux de Baalbeck qui révèlent, par ailleurs, trois tentatives d’arrestation ratées du responsable d’al-Nosra dans le Qalamoun, Abou Malek Tallé, qui se déplace d’un endroit à l’autre pour échapper aux forces de l’ordre. De nouveaux rapports indiquent que Tallé a nommé des commandants pour le remplacer, parce qu’il projette de s’éloigner de Ersal pour se diriger vers les régions du sud-ouest du jurd. Mais l’accélération des développements militaires sur le terrain, la poursuite des rivalités entre l’EI et al-Nosra et aussi le blocage des passages de Toufail entre le nord et le sud des montagnes de l’Anti-Liban ont serré la vis à Tallé et ses adeptes. Tous ces développements, poursuivent ces sources, peuvent précipiter les négociations sur le sort des militaires. En contrepartie de la libération des otages, les combattants d’al-Nosra obtiendraient une issue sécurisée pour quitter la région.

 

Espionnage financier
A la suite de la publication de rapports faisant état de l’implantation d’espions dans les milieux bancaires et financiers à la solde d’organes de sécurité américains, un expert militaire explique que les opérations d’espionnage à travers le monde ne se sont jamais limitées aux seuls domaines politique, militaire et sécuritaire. Les relations internationales entre pays, amis ou ennemis, ont toujours connu ce qu’on appelle l’espionnage économique qui couvre les secteurs de production et de services. Le Liban ne fait pas exception à la règle. Les forces de sécurité ont découvert parmi les réseaux d’agents à la solde d’Israël, des espions de ce genre. Le développement du cybermonde a facilité les infiltrations politiques et sécuritaires dans plusieurs directions. Des quotidiens israéliens rapportent les aveux de certains responsables qui reconnaissent que des activistes libanais ont réussi à infiltrer leurs ordinateurs pour en extraire des documents de haute importance. Sur le plan local, d’autres rapports ont pointé des agents qui font parvenir des informations, aux organes américains, relatives à des opérations financières réalisées dans nombre de banques. L’espionnage financier est à l’origine des mesures prises par le Trésor américain à l’encontre de deux institutions bancaires libanaises au cours des trois dernières années.

 

 

 

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