Magazine Le Mensuel

Nº 3080 du vendredi 4 août 2017

general

Walid Abboud. Journaliste presque par hasard

Rédacteur en chef du JT et présentateur du talk-show politique Bi mawdouyia sur la MTV, rien ne prédestinait Walid Abboud à devenir le journaliste qu’il est aujourd’hui.  

Il aurait voulu être écrivain, dans la même lignée que son grand-père, le grand écrivain Maroun Abboud. Walid Abboud se destinait à l’enseignement des Lettres arabes et souhaitait se consacrer à la recherche, après l’obtention de son doctorat. Le destin en a décidé autrement. Alors qu’il est en première année d’université et qu’il étudie simultanément la littérature arabe et le droit, auxquels il ajoute, en deuxième année, le journalisme, il fait ses débuts à Dar el-Sayyad. «J’ai beaucoup aimé cette expérience, ça me permettait d’épater mes amis à l’université», confie en souriant Walid Abboud. Le jeune homme obtient en parallèle trois licences: Lettres arabes, droit et journalisme et s’implique de plus en plus dans ce dernier domaine. Trois fois inscrit pour le doctorat d’Etat, ses fonctions l’empêcheront toutefois de s’y consacrer. Il écrit dans la revue al-Massira et dans le quotidien al-Hayat et s’occupe de culture et de littérature.

Proche de Gebran Tuéni
En 1990-1991, il débute à la LBCI en tant que producteur de documentaires et de programmes société: Kibarouna, Marhaba Hadara, Kell chaher wa antoum bi kheir. En 1995, il se charge de produire Fakhamet el-Raïs, présenté par Gebran Tuéni. «Face au succès rencontré par cette émission, nous avons enchaîné avec Ri’assiyyat». Persuadé que sa manière de prononcer le «r» constituait un handicap pour apparaître à l’antenne, Walid Abboud se consacre entièrement à la production. En parallèle de ses activités télévisées, il prend en charge, en 1992, la page culturelle du quotidien Nida’ al watan. L’année suivante, Gebran Tuéni lui propose de devenir le rédacteur en chef de Nahar el-chabeb, une fonction qu’il occupera jusqu’à la fermeture du journal en 2001.
Ce n’est qu’en 2006, après l’assassinat de Gebran Tuéni, que le supplément reparaîtra. En 1998, Abboud est approché par la MTV pour produire l’émission présentée par Elie Nacouzi, Sajjil maw’af. Il y restera jusqu’en 2001, lorsque la LBCI lui propose de rejoindre le département des informations.

Qualité d’écoute
Ce n’est finalement qu’en 2003 que Walid Abboud apparaît pour la première fois à l’écran, dans l’émission Nharkom saïd, présentée à l’époque par Dolly Ghanem, May Chidiac et Shada Omar. «Avec le départ de Shada Omar pour la nouvelle chaîne al-Hayat LBC, on m’a proposé de la remplacer. C’est May Chidiac qui fut à l’origine de cette idée. Sur le plan politique, c’était une période en or avec la naissance de la rencontre de Kornet Chehwan, l’adoption de la résolution 1559, le début de la vague des assassinats, l’assassinat de Rafic Hariri, la révolution du Cèdre…».
En 2009, avec la reprise de la MTV, Walid Abboud quitte la LBC où il «ne pouvait plus se réaliser pleinement». Il devient alors rédacteur en chef du journal télévisé de la MTV et présentateur du talk-show politique hebdomadaire de la station Bi mawdouyia. «Le poste était prestigieux. Une manière de contribuer aux décisions».
Figurant aujourd’hui parmi les présentateurs phares de talk-shows politiques, comme Marcel Ghanem ou Georges Salibi, Walid Abboud rejette le concept du numéro 1. «Aucun de nous ne peut faire une émission réussie à lui seul. Nous n’avons pas de notoriété individuelle et nous profitons du rayonnement des chaînes dans lesquelles nous travaillons, car elles sont les plus importantes sur le plan politique et au niveau de la programmation. Notre importance vient de celle de la chaîne». Walid Abboud estime qu’il faut évaluer chaque émission en elle-même. «La télévision peut rendre vaniteux mais aucun présentateur ne peut réussir son émission avec un invité de seconde catégorie. On est en compétition chaque semaine pour être le premier».
Toujours poli et courtois, Walid Abboud sait écouter son interlocuteur et rebondir dans ses questions, selon les déclarations de son invité. Toutefois, il reconnaît être impulsif et passer parfois d’un extrême à l’autre. «Je respecte toujours mon invité. Il m’importe peu d’être la star. J’aime valoriser la personne que je reçois. Je deviens une star si mon émission a été un succès». Certaines interviews ont marqué sa carrière. Walid Abboud se souvient encore de sa première entrevue avec Samir Geagea après sa sortie de prison, qui a eu un grand impact. Il a été aussi très marqué par la première interview réalisée avec May Chidiac après l’attentat dont elle a réchappé, ou encore de ses dernières interviews de Gebran Tuéni et de Georges Haoui.
Pour Walid Abboud, un journaliste ne s’arrête jamais. Il poursuit sa quête de l’information. «Plus on avance dans ce domaine, plus les défis augmentent. L’important n’est pas d’être le premier mais de conserver sa place. Il est beaucoup plus difficile de garder son rang que de se battre pour se faire une place». A l’heure du règne de l’image, Walid Abboud estime que l’apparence physique est importante, mais ce qui compte plus, c’est d’avoir de la personnalité. «Il faut avoir quelque chose de plus à présenter aux gens, afin de susciter un impact, positivement ou négativement. La pire des choses est de passer inaperçu à la télévision».
Des leçons, Walid Abboud n’aime pas en donner. L’idée du «héros» ne le séduit pas. «Les héros m’ennuient. Je préfère la théorie de l’antihéros, elle m’attire davantage». Lorsqu’on évoque sa réussite, il répond, avec un sourire empreint de modestie: «J’ai peut-être réussi, mais je n’ai rien fait d’exceptionnel».

En chiffres

37
La durée, en années, de sa carrière dans les médias.

416
En huit ans, il a déjà présenté 416 épisodes de son émission Bi mawdouyia.

7
L’analogie qui existe entre sa date de naissance le 7 avril 1961 et le retour de la MTV le 7 avril 2009.

Joëlle Seif

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