Magazine Le Mensuel

Nº 2854 du vendredi 20 juillet 2012

Société

La polygamie. Quand l’amour se conjugue au pluriel

La religion musulmane permet aux hommes qui le souhaitent de prendre pour épouses deux, trois ou quatre femmes, à condition qu’ils soient équitables envers toutes. La polygamie reste quand même une exception. Magazine a recueilli le témoignage de femmes qui voient leur mari ramener au foyer conjugal une seconde épouse.  

La polygamie est un type de mariage dans lequel un homme est légalement uni à plus d’une femme. En islam, la polygamie est limitée à un maximum de quatre épouses. Dans un verset du Coran, il est dit: «Il est permis d’épouser deux, trois ou quatre parmi les femmes qui vous plaisent. Mais si vous craignez de n’être pas juste envers celles-ci, alors une seule».
En fait, dans la réalité, la polygamie n’est pas une règle, plutôt une exception. Une écrasante majorité d’hommes musulmans n’ont qu’une seule femme légitime, surtout dans les milieux modernes et éduqués. Ceux qui décident d’avoir une seconde épouse arguent du fait que beaucoup d’hommes ne se suffisent pas d’une seule femme et prennent alors une ou plusieurs maîtresses en cachette et délaissent la couche conjugale. Par ailleurs, disent-ils, lorsque par exemple une épouse est en période de menstruation ou d’accouchement, selon le Coran, elle ne doit pas être approchée par l’homme. Comment donc doit faire un bon musulman, s’il est gagné par le désir sexuel, sachant que l’islam interdit l’adultère? La polygamie est considérée à leurs yeux comme l’issue idéale à de telles situations.
«La polygamie, dit Mohsen, préserve la dignité de l’homme et sa vertu, à condition toutefois qu’il soit équitable entre ses femmes et capable de prendre en charge femmes et enfants». Et si la femme ne souhaite pas partager son époux aimé, comment lui infliger cette souffrance, cette blessure? «Au début, les choses peuvent être en effet difficiles, poursuit Mohsen. Mais lorsque le mari est juste et équitable, lorsqu’il ne fait pas de différence entre ses femmes, elles finissent pas voir le bon côté des choses», croit-il savoir. Le bon côté? «Oui, dit-il. La femme est sûre que son mari n’a pas de maîtresses, qu’il n’a pas une double vie qu’il mène en cachette et n’a pas non plus recours aux services d’une prostituée. Et puis, ajoute Mohsen, elle apprend avec le temps à apprécier cette autre qui partage sa demeure et à devenir complice avec elle. Elles partagent du bon temps ensemble. Elles se tiennent compagnie et échangent leurs petites histoires», poursuit-il.
Sa femme partage tout à fait son avis. «Celle qui n’accepte pas de partager son mari, insiste-t-elle, fait preuve d’un égoïsme certain. Elle oublie son devoir de compassion envers ses sœurs célibataires qui sont en détresse du fait de leur solitude. Avec Mariam, la seconde épouse de Mohsen, je partage tout». La jalousie ne la taraude-t-elle pas de temps en temps? «Non, assure-t-elle. L’homme est de nature polygame. Il ne peut pas se contenter d’une seule femme. Là, au moins, je sais de qui il s’agit et la promiscuité nous rend si complices qu’il n’y a pas de place pour de tels sentiments», confie la jeune femme.
«Si les sentiments de mon mari sont déséquilibrés, dit pour sa part Salma, c’est-à-dire quand son cœur prend un penchant net pour sa seconde épouse, je demande à lui parler et lui rappelle le verset du Coran qui dit qu’il faut être équitable avec ses femmes. Immanquablement, il rectifie le tir et rééquilibre les deux relations».
«Nous nous considérons comme deux amies très proches, confie Marwa, plutôt que des rivales. Nous échangeons nos petits secrets, nos recettes de beauté, nos adresses de lingerie sexy… Une entente harmonieuse nous lie. Cela serait dû au fait que, depuis notre plus jeune âge, nous sommes habituées, Alia et moi, à voir deux épouses dans une même demeure. Mon grand-père et mon père sont polygames; et il en est de même pour elle. Mohammad est parfaitement équitable entre nous. Chacune a sa propre chambre, la même somme pour son argent de poche et le même temps passé avec lui dans l’intimité. Tant que cela perdurera, il n’y aura pas de place pour le moindre malentendu», affirme Marwa.

 

C’est l’enfer!
Ces avis ne sont pas partagés par une grande part de premières épouses. Elles considèrent que partager l’homme aimé avec une seconde femme est insupportable et porte atteinte à leur intégrité et à leur dignité. Certaines tombent quasiment malades et développent des maladies telles que l’ulcère, la tension, la dépression.
«L’amour, le vrai, ne peut pas être partagé, s’insurge Bahia. Il n’est pas compatible avec la pluralité. A mes yeux, il n’y a pas pire pour une femme que de vivre, sous son propre toit, avec une autre qui partage la couche de son mari. J’ai vécu un enfer lorsque ça m’est arrivé». «Notre maison, poursuit-elle, ressemblait à un champ de bataille. Des conflits permanents éclataient entre mon mari, sa seconde épouse et moi. Tout était bon pour nous pour marquer notre territoire. Elle et moi avions recours aux vengeances les plus perverses pour nous défouler de cette jalousie qui nous rongeait. Amer ne pouvait plus vivre dans cette ambiance infernale. Il a fini par craquer. Il s’est éloigné pendant quelques semaines pour voir plus clair et a décidé, en fin de compte, de rester avec moi. Notre mariage est désormais très réussi et nous vivons dans la parfaite harmonie», conclut Bahia.
«Nous vivions très heureux mon mari et moi, raconte Dina, jusqu’à ce qu’après six ans de mariage, Chafic rencontre, chez des amis, une femme dont il tombe amoureux. Il décide alors de la prendre pour épouse. La nouvelle m’est tombée sur la tête alors que j’étais enceinte de notre troisième enfant. J’ai fait une dépression nerveuse. Je refusais de manger. Je dormais mal. Je dépérissais à vue d’œil. Mais Chafic tenait à sa seconde épouse comme à la prunelle de ses yeux. Je suis restée, parce que je n’avais pas les moyens financiers nécessaires pour partir et parce que j’aimais profondément mon mari. Mais ma vie ressemble à un enfer», avoue-t-elle.
L’expérience de Alia n’est pas meilleure. «J’ai sombré, dit-elle, dans une dépression profonde quand Ahmad a pris une seconde épouse. Rien n’y faisait, ni les promesses d’équité qu’il me faisait, ni les gentillesses qu’il continuait d’avoir à mon égard. Elle était plus jeune que moi de 20 ans et se pavanait dans la maison avec des airs hautains. Cela me rendait malade. Cerise sur le gâteau, elle a eu un garçon, et moi je n’avais que des filles. Cela m’a terrifiée. Voir mon mari qui rêvait d’avoir un héritier masculin fondre devant lui, ne lui refusant aucun caprice! J’ai fini par développer un cancer et je suis convaincue que ma maladie est due à toutes ces souffrances morales que j’ai subies. J’ai pris ma revanche, quand il l’a obligée à prendre soin de moi», ajoute-t-elle sans remords!

Danièle Gergès

   

 

Droit de femme
La femme a-t-elle le droit de refuser la polygamie de son mari? La femme musulmane a toujours la possibilité de poser ses conditions dans son contrat de mariage et refuser à son mari le droit à la polygamie sans qu’il n’obtienne son accord. Lui, de son côté, se doit de mettre sa première épouse au courant de ses secondes noces. En revanche, si une femme refuse catégoriquement ce fait et que son mari y tient, elle peut divorcer et retourner chez sa famille initiale.

 


 

Un CD-Rom éducatif
Pour gérer les dangers

 

Apprendre à gérer les différents dangers, qui menacent chaque citoyen dans sa vie quotidienne, c’est le but du jeu électronique distribué dans les écoles libanaises, publiques et privées, dans le cadre d’un programme euro-méditerranéen de prévention, de préparation et de réponse aux catastrophes naturelles et d’origine humaine.

 

Apprendre à éviter les risques en jouant. Tel est l’objectif d’un projet de conscientisation, le premier en son genre, qui vise à toucher le plus grand nombre de citoyens, notamment les enfants. Disponible sur le site Web de la Défense civile libanaise, le jeu électronique a pour but d’apprendre à éviter et à réagir à la plupart des risques qu’un enfant peut avoir à affronter. Le jeu éducatif est distribué aux écoles libanaises à près de 125000 exemplaires par la Défense civile libanaise et a été choisi pour son côté interactif.

Le Liban est une terre sujette aux tremblements de terre, tsunamis, inondations ou feux de forêt. Sans oublier les épidémies, les accidents domestiques, etc. Pour faire face à ces catastrophes potentielles et parfois même les prévenir, la Défense civile qui intervient généralement en situation de crise, a décidé de sensibiliser une tranche importante de la société, à savoir, les enfants de 7 à 10 ans. Le but ultime étant la création d’une culture de protection civile axée sur la prévention et la gestion des risques. Cette initiative permettra aux enfants d’appréhender les risques et les catastrophes et les aidera également à transmettre les connaissances acquises à leurs familles.

 

Un jeu efficace
Pour le concepteur du CD, Karim Abi Saleh, le jeu est plus efficace pédagogiquement. Il estime que le côté interactif rend l’information plus attractive pour l’enfant, beaucoup plus qu’un support classique comme le livre ou le film documentaire. Pour lui, résoudre les problèmes du jeu, permet de développer des réflexes adéquats dans la vie de tous les jours. Le but est de savoir gérer les différents dangers et les accidents qui peuvent survenir à la plage, à la montagne, à la maison, sur la route et même les catastrophes d’ordre naturel comme les séismes ou les incendies. Le jeu est divisé en plusieurs étapes de plus en plus difficiles. Pas moyen de passer à une nouvelle étape sans avoir gagné la précédente. Pour stimuler les enfants, une phase ultérieure du programme devrait permettre de s’inscrire en ligne sur le site de la Défense civile libanaise et de partager son score avec les autres joueurs. Les gagnants peuvent décrocher une récompense symbolique en guise d’encouragement. «Grâce au CD, je sais maintenant qu’il faut se mettre sous le porche de la porte en cas de tremblement de terre», relève un jeune écolier. Pour les dangers liés à la plage ou à la piscine, les jeunes ont beaucoup appris. «Il faut s’hydrater régulièrement et ne pas oublier la crème solaire», avertit Maria, une jeune élève. «Les petits ont besoin de la surveillance d’un adulte pour descendre à la piscine», dit-elle. Mettre la ceinture de sécurité en voiture, éviter de sortir le bras hors du véhicule et encore de placer le radiateur électrique loin d’objets inflammables, sont autant d’actions que les jeunes ont appris ou apprendront à travers ce jeu. Les parents se sont déclarés ravis que leurs enfants découvrent ce CD qui leur permet à la fois de s’amuser et d’apprendre à se protéger. Conçu en arabe, en français et en anglais, le CD a été distribué sur tout le territoire libanais. Les jeux peuvent être téléchargés gratuitement sur Internet, et les enfants peuvent en faire des copies. On estime que près de 250000 enfants bénéficieront de ce jeu. Un bon moyen pour les écoliers de partager leurs découvertes et leurs exploits avec leurs parents et amis, mais surtout d’apprendre à être plus vigilants et plus responsables et de mieux gérer les dangers qui les menaceront au cours de leur vie.

Nada Jureidini

 

Un CD libanais
La spécification du CD est son caractère libanais et le choix de l’environnement. Une ville coincée entre la mer et la montagne, avec ses immeubles modernes et ses maisons traditionnelles. Les personnages du CD ont des noms arabes afin qu’ils puissent être compatibles avec la culture des enfants. Pour info: www.lebanesecivildefense.com

 

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