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Nº 2858 du vendredi 17 août 2012

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Sanctions contre le Hezbollah, revirement de Joumblatt…

L’arrestation de Michel Samaha, ancien ministre et homme de confiance de la Syrie au Liban a provoqué une véritable onde de choc sur la scène politique locale. La Syrie serait-elle en perte de vitesse au Pays du Cèdre? Analyse.

Le paysage politique a été bouleversé par trois événements majeurs ces deux dernières semaines: L’arrestation de Michel Samaha, suivie de l’annonce de nouvelles sanctions américaines contre le Hezbollah et un véritable séisme provoqué par le énième revirement politique de Walid Joumblatt qui s’est lancé dans une sévère diatribe contre ses partenaires politiques au gouvernement.
C’est l’arrestation, le 9 août de Samaha qui aura donné le coup d’envoi à cette nouvelle phase politique, nettement en défaveur des alliés de la Syrie au Liban. Côté Hezbollah, l’événement passe quasiment sous silence, mis à part, les déclarations du député Mohammad Raad. Une situation qui étonne les analystes politiques comme Andrew Tabler du Washington Institute for Near East Policy, un centre de réflexion américain.
«On assiste clairement à un changement de l’équilibre des forces dans la donne politique libanaise. Cela se traduit par un repositionnement des factions politiques et par une réactivation du rôle des forces sécuritaires comme les FSI (Forces de sécurité intérieure ayant procédé à l’arrestation de Samaha) ainsi que dans la justice libanaise (ayant inculpé l’ancien ministre) qui semblent avoir repris une certaine dose de courage», souligne Paul Salem, directeur du centre de réflexion américain Carnegie. «On a l’impression que l’Etat tente de recouvrer en partie sa souveraineté», précise le chercheur.
Le gouvernement actuel, formé en 2011, est considéré à tort ou à raison comme proche de l’axe irano-syrien. La révolte en Syrie a toutefois radicalisé les différents pôles du gouvernement, se traduisant par une absence de consensus autour des questions d’ordre stratégique et une érosion progressive de l’Etat.

Discours radicalisés
Ces bouleversements, selon Salem, se reflètent directement sur les différents acteurs politiques dont les prises de position en flèche se démarquent du discours ordinaire très conciliant vis-à-vis de la Syrie. Ainsi, cette semaine, au cours de sa tournée dans la région du Akkar, Mgr Raï a exprimé pour la première fois un appui explicite aux réfugiés syriens, tout en dénonçant «les mains du mal et les consciences mortes», derrière les tentatives d’attentat.
Najib Mikati, ami personnel du président Bachar el-Assad, est sorti de sa bonhommie habituelle, en évoquant de possibles sanctions contre la Syrie au cas où son implication dans les attentats terroristes se confirmerait. «La justice ira jusqu’au bout dans ses investigations sur l’affaire de la tentative de déclencher des troubles au Liban, d’y semer la discorde et de poser des explosifs dans plusieurs régions», a déclaré le Premier ministre. «A la lumière des données et des résultats de l’enquête, nous prendrons la décision politique adéquate pour préserver la souveraineté du Liban et son indépendance et pour empêcher quiconque de mettre la sécurité des Libanais en danger».

Sanctions contre le Hezbollah
Mais l’affaire Samaha n’est pas la seule à infliger un revers à la coalition du 8 mars, intouchable jusqu’à présent de par son alliance avec Damas. En effet, au lendemain de l’emprisonnement de l’ancien ministre, le département du Trésor américain a annoncé de nouvelles sanctions contre le Hezbollah qui figure, depuis octobre 2001, sur la liste noire des organisations terroristes aux Etats-Unis, pour son rôle central dans la répression menée par le régime Assad en Syrie. Dans son communiqué, le Trésor américain a accusé le Hezbollah de «fournir de l’entraînement, des conseils et du soutien logistique» au gouvernement syrien dans sa répression du soulèvement populaire depuis mars 2011. Le Trésor estime également que le parti de Hassan Nasrallah a facilité la formation des forces gouvernementales syriennes par les Gardiens de la révolution iraniens et d’avoir joué un rôle important  dans l’expulsion d’opposants syriens du Liban.
«La tournure du texte publié par le trésor est particulièrement intéressante puisqu’elle dénonce l’implication directe du Hezbollah dans les événements en Syrie. Ces sanctions auront, sans aucun doute, des répercussions importantes sur l’économie libanaise et notamment sur le secteur bancaire, elles sont extrêmement sérieuses», estime Tabler. Le crédit bancaire au secteur privé représente près de 80% du PIB libanais. Les banques libanaises possèdent également près de 140 milliards de dollars de dépôts. Des sanctions sur ce secteur considéré vital seraient certainement désastreuses.
Mais en fin de compte c’est Walid Joumblatt qui, le weekend dernier, finira par asséner un ultime coup  au camp pro-syrien en mettant en cause son allié, le Hezbollah. «Il n’y a de place que pour un Etat unique, seul habilité à disposer de la décision de guerre et de paix afin de défendre le Liban et seulement le Liban», a-t-il dit, faisant allusion au Parti de Dieu. «Il n’est pas possible de continuer, sous le slogan «armée-peuple-résistance», à perpétuer ce partenariat confus aux dépens de l’Etat, de l’armée, de la sécurité, de l’économie et du destin», a ajouté le chef du Parti socialiste progressiste (PSP). «Je peux me tromper, mais j’affirme que si le camp adverse, c’est-à-dire le 8 mars avec ses anciens et nouveaux alliés, remporte les élections, il n’y aura de place ni pour le centrisme, ni pour le pluralisme ni pour la variété; pas de place pour la décision centrale de guerre et de paix au Liban hors de l’axe iranien et de ce qui reste du régime syrien. Il n’y aura pas de place pour l’Etat de droit et le monopole exclusif de la force aux mains de l’armée et des FSI, pas de place pour une justice indépendante, un président indépendant et une armée indépendante», a-t-il mis en garde.
Ces multiples déflagrations politiques auront très certainement des répercussions sur l’opinion publique et la scène locale. Comment se traduiront-elles sur les élections de 2013? «Cela dépendra de plusieurs facteurs et notamment des forces locales au niveau des circonscriptions», argumente Salem. Une possible chute du régime Assad aurait également une incidence sur la capacité du 8 mars à maintenir son hégémonie politique mais sans toutefois l’affaiblir complètement. Donc pas de changement drastique à court terme, à part une éventuelle mise en péril du gouvernement actuel qui pourrait être amené à démissionner.
«Aucune faction n’est toutefois en mesure de contraindre le Hezbollah à abandonner la formule «Etat-Résistance» qu’il défend. Les réunions de dialogue, dans ces circonstances, seront toujours torpillées par le problème des armes, et le Hezbollah s’accrochera sans doute au statu quo actuel», conclut Salem.

Mona Alami

Les déclarations de Joumblatt
C’est au cours d’un iftar à Semquaniyé, dans le Chouf, que. Joumblat a lâché la bombe. Dans son discours, le chef du PSP a dénoncé «la barbarie du régime (syrien) face aux hommes et à la pierre, face à l’homme syrien et à la civilisation unique de Syrie qui a dépassé toutes les limites de l’imagination. Pour ce qui est de la Résistance, le député a reconnu le droit du Liban de libérer les fermes de Chébaa et les collines de Kfarchouba, mais «après la délimitation et le tracé de la frontière dans ces régions et ailleurs» tout en ajoutant: «Non à la libération pour le plaisir de la libération, au service d’autres pays que le Liban ou même aux dépens du Liban. Le leader druze a également insisté sur le fait que l’Armée libanaise ne manquait pas de compétence et de professionnalisme pour intégrer les armes de la Résistance de façon progressive.

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