Magazine Le Mensuel

Nº 2863 du vendredi 21 septembre 2012

Affaire Déclassée

Le mystère d’Antoine Ghauche. Un marin disparu en mer

Il y a treize ans, le marin libanais Antoine Ghauche se perdait en mer. Sa famille a remué ciel et terre pour le retrouver, mais son sort est toujours inconnu.

Le 10 septembre 1999, Antoine Ghauche fait ses adieux à son père et à ses trois frères avant de quitter le domicile à Chekka pour rejoindre son premier poste de marin à bord du cargo Mary, relevant d’une entreprise de transport maritime appartenant à Ibrahim Kfouri et qui se dirigeait vers l’Espagne. Première escale du cargo, la Grèce, puis la Russie où il passe cinq jours pour embarquer des cargaisons d’Espagne. Il partait la tête pleine de grands rêves. Il promettait à sa famille, de situation modeste, des jours meilleurs.
Le 6 octobre 1999, quand le cargo accoste au port de Wilba en Espagne, Antoine est introuvable. Réunie à l’hôpital, dans l’attente du nouveau-né de l’un des frères, la famille est avertie de sa disparition sans aucune explication. Certains ont prétendu qu’il avait disparu avant l’accostage, d’autres affirment qu’ils l’ont vu après l’arrivée. Toujours est-il qu’Antoine est depuis porté disparu.
Sa famille a remué ciel et terre pour connaître son sort. Se serait-il noyé? Hypothèse qui n’est pas retenue, vu que certains témoins ont affirmé l’avoir vu à l’accostage. Alors, tué ou caché? Personne ne peut le dire, mais sa famille tient à connaître son sort.  Elle a œuvré durant près de deux ans pour qu’une enquête soit lancée, mais en vain.
Selon des témoins, Antoine aurait disparu à Wilba avant que le bateau ne jette l’ancre. Toutes ses affaires se trouvaient encore à bord du cargo. Des témoins affirment qu’il n’était pas sorti sur le pont à l’heure de l’accostage. D’autres au contraire disent l’avoir vu en train de laver le pont du bateau en compagnie d’autres marins.
La police espagnole, prévenue de la disparition du jeune marin, n’a malheureusement pas poussé ses investigations se contentant de constater les faits. Elle aurait cherché aux alentours du port la présence d’un probable noyé, sans résultat.
Le capitaine du cargo Mary, quant à lui, s’est limité à signaler la disparition du marin Antoine Ghauche affirmant que le cargo est arrivé à 18h15 le 6 octobre au port de Wilba. C’est là qu’il aurait constaté la disparition du marin qui se trouvait à bord du cargo jusqu’à ce moment. Un des marins aurait vu Ghauche dans sa cabine à 19h10 dix. C’était la dernière fois que quelqu’un affirmait l’avoir vu.
Interpol Liban est intervenu et a lancé un mandat de recherche international. Mais les documents parvenant en Espagne sont erronés. Il y a d’abord une erreur sur le nom, c’est Fadi et non Antoine Ghauche qui est mentionné. Deuxième erreur: on recherche une certaine Antoinette Ghauche. La réponse de la police espagnole ne se fait pas attendre. Il n’y a pas d’Antoinette Ghauche en Espagne.
En 2000, la famille demande que lui soit fournie la liste des noms des marins qui se trouvaient à bord du bateau. Requête refusée d’abord par la Sûreté générale. Elle ne la reçoit que quelques années plus tard. Il est dès lors prouvé qu’Antoine était bien à bord du cargo. L’enquête est ouverte de nouveau. La famille intente un procès contre le propriétaire du cargo, ainsi que contre le capitaine. Pour elle, ils sont responsables du sort du marin perdu. L’affaire est devant la justice depuis le 22 septembre 2010 sans marquer le moindre progrès.
Charbel, frère d’Antoine, a sonné à toutes les portes, celles du  président de la République, du ministre de la Justice et du patriarcat maronite, sans réussir à faire bouger le dossier. La nouvelle enquête permettra-t-elle à sa famille de connaître son sort?

A.K.

 

Disparu à 28 ans
Antoine Ghauche avait 28 ans quand il s’était embarqué au port de Chekka. Il voulait devenir pilote d’avions, survoler des pays. Mais la situation financière de la famille ne lui avait pas permis de prendre des cours de pilotage. Sa mère est décédée très tôt à trente et un ans, suite à une erreur médicale. Antoine s’est engagé dans l’armée, mais il voulait une situation meilleure. Il a cherché un autre travail, et a fini par trouver ce poste de marin sur le cargo Mary.

Related

Morts suspectes en 1959. Une année noire de la médecine

La fuite de Abdel-Hamid Sarraj. La Syrie accuse le Liban

Tensions entre Damas et Beyrouth. L’épisode Der Kaloustian

Laisser un commentaire


The reCAPTCHA verification period has expired. Please reload the page.