Magazine Le Mensuel

Nº 2870 du vendredi 9 novembre 2012

Spectacle

Paladini di Francia. Des marionnettes vivantes pour conter la vie

Les planches du théâtre Monnot ont accueilli, les 3 et 4 novembre, le spectacle Paladini di Francia de la troupe italienne Teatro Koreja. Un spectacle de marionnettes vivantes qui s’effeuille au fil de ses différentes interprétations poétiques.

Paladini di Francia. Un spectacle pour le moins étrange, novateur pour un public libanais peu habitué à ce genre de représentations. Paladini di Francia de Francesco Niccolini est un spectacle de marionnettes vivantes, plus précisément d’acteurs déguisés en «pupi» siciliens, qui mettent en scène l’histoire des paladins de Charlemagne, depuis l’arrivée de la belle Angélique jusqu’à la bataille de Roncevaux, le massacre de Roncevaux, «cette décharge absurde et ensanglantée dans laquelle tous ces corps moururent et furent abandonnés, les yeux vers le ciel, à se demander ce que c’est les nuages», selon le concepteur du spectacle, Francesco Niccolini.
Paladini di Francia plonge ses racines au cœur de la culture italienne. Tout d’abord le théâtre de marionnettes «pupi», dit «Opera dei pupi», né au début du XIXe siècle en Sicile et classé dans le Patrimoine immatériel de l’humanité de l’Unesco, à travers lequel, comme le signale le site de l’organisation internationale, «les marionnettistes racontaient des histoires inspirées de la littérature chevaleresque du Moyen Age et d’autres sources telles que la poésie italienne de la Renaissance, la vie des saints ou des histoires sur des bandits célèbres». Ensuite, l’hommage rendu à l’un des artistes italiens les plus controversés, Pier Paolo Pasolini, puisque le spectacle est dédié à C’est quoi, les nuages? de Pasolini. Che cosa sono le nuvole? est un sketch réalisé par Pier Paolo Pasolini, dans le film Caprice à l’italienne (Capriccio all’italiano) de 1967, qui consiste en six sketchs, chacun par un réalisateur différent. Celui de Pasolini exploite une représentation d’Othello en marionnette. Et finalement, la référence aux paladins, les seigneurs de la suite de Charlemagne, dans la tradition des chansons de geste.

Entre amour et guerre
Dans la note de présentation, Niccolini explique: «Etant jeune, je haïssais ces personnages-là, prototypes de conquérants. En revanche, j’aimais, avec tendresse et battements de cœur, leurs représentations mortes, ces marionnettes taillées en pièces, liées à un ciel de carte déchiré. Après vingt ans, quand je vois des hommes et/ou des marionnettes mourir sur les champs de bataille, je comprends que tous méritent de la compassion et que leurs corps sont à respecter. L’histoire comique et tragique des paladins de Charlemagne conte la beauté et la cruauté de la vie».
La scène du théâtre Monnot est plongée dans le noir. De part et d’autre, se trouvent des espèces de tringles en bois sur lesquelles sont disposées les fameuses marionnettes «pupi». Et voilà que les comédiens, Francesco Cortese, Carlo Durante, Antonella Lallorenzi, Silvia Ricciarellise, enfilent les marionnettes, discrètement, et se glissent tour à tour dans la peau de Roland, Astolphe, Bradamante, Fiordiligi, Orlande, Angélique, personnages issus des chansons de geste. Qu’ils chevauchent leurs chevaux, qu’ils se battent en duel, qu’ils tombent amoureux, qu’ils aillent par-delà la lune au secours de leur ami… Ils se prêtent sur scène à des jeux d’enfants, à des jeux de guerre. Et c’est là que réside toute la force du spectacle Paladini di Francia, mis en scène par Enzo Toma. Entre humour, sourires et larmes, entre amour et guerre, voix tonnantes, mimiques, visages grimés de blanc, traits dessinés au crayon noir, pommettes rehaussées de rouge, armure, lances, épées, créées dans un mélange de métal et de matériaux en toc, le jeu de scène épouse le jeu de guerre, le jeu des enfants celui des hommes, dans toute la dualité de l’humanité.

Nayla Rached
 

www.teatrokoreja.it

El orb3a bNoss el Jom3a
Après Who is Claire Zahnassian?, Eyyem bteswa Franco, Ekher beyt bel Gemmayzé, Betty Taoutel présente El orb3a bNoss el Jom3a, une nouvelle pièce originale qui sera jouée à guichet ouvert et au profit d’associations caritatives, à partir du 9 novembre au théâtre Monnot. L’action se déroule à un croisement de rues, où des fiancés, une future mariée, une maman, un divorcé, des vieux mariés et des afficheurs de panneaux publicitaires évoquent leur vécu et leurs histoires différentes. Une pièce tragicomique, inspirée de l’autodérision de la condition humaine libanaise.
Informations: (01) 202422.

 

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