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Nº 2881 du vendredi 25 janvier 2013

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Ni Elie Ferzli ni Rustom Ghazalé. Waël Kheir est le père du projet orthodoxe


La proposition de loi, présentée par la Rencontre orthodoxe, n’a pas été enfantée par l’ancien député Elie Ferzli, encore moins par les cadres du 8 mars ou par Rustom Ghazalé. En réalité, elle a été remise au goût du jour par un professeur d’université, militant des droits de l’homme, Waël Kheir.

Waël Kheir n’a rien d’un politicien rompu à la castagne. Il n’a aucun fief à défendre, aucune campagne à mener, aucun électeur à séduire. Cet homme trapu et jovial, à la moustache bien fournie, a un parcours reconnu par l’ensemble du tissu associatif du pays. Oui, ce professeur à l’Université américaine de Beyrouth (AUB) est un militant, mais un militant des droits de l’homme. Une façon de brandir le flambeau de son oncle Charles Malek, un des rédacteurs de la Déclaration universelle des droits de l’homme. Il dirige la très active Fondation des droits de l’homme et du droit humanitaire (FDHDH). Le champ d’action de la fondation se veut très large. Elle est active sur le front des détenus libanais en Syrie, sur celui de la liberté des journalistes et sur celui de l’état déplorable des prisons libanaises, autant de sujets qui défient les droits de l’homme. C’est cet homme qui a pensé et rédigé la proposition de loi promue par la Rencontre orthodoxe.
Lorsqu’on évoque le débat autour de sa proposition, il sourit. D’abord pour souligner de manière sarcastique les épithètes qui lui ont été adossées par ses détracteurs. Qualifier son projet de «loi Rustom Ghazalé», lui qui a goûté aux geôles de la tutelle syrienne, est un peu fort de café. Ensuite pour regretter qu’elle ait été détournée de son objet. Waël Kheir rappelle qu’il a présenté ce projet, il y a plus de sept ans, lorsqu’il œuvrait au sein du Rassemblement libanais orthodoxe (RLO). Il a même été remis par l’avocat Lutfallah Khlat sur la table de la commission de Fouad Boutros en 2007. C’est à la faveur de la recomposition et de l’élargissement du RLO, devenu Rencontre orthodoxe, que le projet a été remis au goût du jour. Pour Waël Kheir, «ceux qui tentent d’enterrer le projet ne veulent pas d’une présence chrétienne juste. Ils veulent qu’ils restent contrôlables». Il n’en dira pas plus, afin de ne pas entrer dans la polémique politicienne, mais il n’en pense pas moins. «Ce projet assure trois notions essentielles: la stabilité politique, la juste représentativité et le devoir de responsabilité».
En fait, l’idée que chaque communauté puisse élire ses représentants est une vieille antienne, notamment reprise en 1992 par l’ex-député Edmond Naïm qui l’a, en son temps, présentée au patriarche Nasrallah Sfeir. Mais Waël Kheir, qui a entendu les accusations de fédéralisme, voire de tribalisme, puise l’essence de son projet encore plus loin. Il rappelle qu’«après les déplacements de population pendant la guerre civile et l’occupation syrienne, les chrétiens ont été les principales victimes de la nouvelle configuration démographique et politique du pays».
S’agissant du communautarisme, Waël Kheir renvoie à deux questions. «Le projet laïque proposé par le parti Baas en Syrie et en Irak a-t-il mis fin, dans ces pays, au système communautaire? Si le peuple répond de manière positive à ce système, faut-il s’en débarrasser?». Simplifiée ainsi, la thèse première de l’activiste est légitime. Tant que le système communautaire est accepté, autant lui donner toute sa place. Une thèse unanimement partagée par les membres de la Rencontre orthodoxe. Aux critiques du système communautaire, tel qu’il est régi aujourd’hui, ne laissant aux chrétiens qu’un quota numérique de façade dans l’administration notamment, ils ajoutent leur refus catégorique de la loi de 1960 qui n’assure pas une juste représentativité politique de la communauté.
Waël Kheir déplore de voir sa proposition, étayée par une lecture assez fine de l’Histoire et de la société libanaise, sacrifiée sur l’autel des épiceries électorales. Il aura, au moins, réussi à ouvrir un débat plus profond qui, d’une manière ou d’une autre, reviendra sur le tapis.

Julien Abi Ramia

 

En phase avec l’Histoire
Waël Kheir explique que son projet reprend le modèle de la Moutassarafiah et les canons de la gouvernance politique du mandataire 
français, dont on a gardé les principes 
communautaires, depuis l’indépendance du pays, principes dénaturés par les accords de Taëf. «Au début du XXe siècle, il était préconisé que les membres d’une communauté 
puissent élire, sans interférence, leurs 
représentants, toujours dans le souci de 
préserver la péréquation communautaire et ainsi, la paix civile, le tout dans le cadre d’un cadre laïque partagé».   

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