Magazine Le Mensuel

Nº 2890 du vendredi 29 mars 2013

à la Une

OffreJoie au secours de l’union

Dans une atmosphère très tendue au Pays du Cèdre, OffreJoie a offert, le 25 mars dernier, aux habitants de Basta et de Khandak el-Ghamik, un moment de poésie et d’union nationale dont l’association a le secret. Un nouveau cri du cœur, de ces «commandos de l’espérance», prêts à intervenir, autant de fois qu’il le faut, pour protéger la paix civile.

Lundi dernier, le 25 mars, l’association OffreJoie a, une nouvelle fois, frappé du poing sur la table: la discorde n’arrivera pas. En réponse aux agressions de quatre cheikhs sunnites il y a deux semaines, quelque 270 personnes ont décidé de dire «non à la fitna» en créant une chaîne humaine dans les quartiers de Khandak el-Ghamik et de Basta Tahta, là où les cheikhs Mazen Hariri et Ahmad Fakhran avaient été attaqués.
270 personnes, on pourrait dire «si peu», pourtant le geste est grand et des plus symboliques. Epaulé par plusieurs associations, OffreJoie rassemble dans la rue des jeunes de toutes les régions libanaises, du Akkar à Tyr en passant par Beyrouth. Au milieu de cette jeunesse vêtue de blanc symbole de paix, d’élégants messieurs se tiennent par les coudes en avançant, chacun portant une coiffe distincte. A leur passage, des habitants perchés sur leurs balcons, surpris par cette agitation de début d’après-midi, leur lancent spontanément du riz, comme on le ferait pour de jeunes mariés. C’est que l’image est forte, côte à côte, se retrouvent les représentants religieux des communautés syriaque orthodoxe, chaldéenne, protestante, druze, arménienne catholique, arménienne orthodoxe, maronite, sunnite, chiite, assyrienne ….
«Je suis là pour une question de citoyenneté, affirme le père Constantine Nasr. Nous avons toujours vécu les uns avec les autres, chrétiens et musulmans. Le Liban est notre pays à tous». Même détermination dans les propos du cheikh druze Sami Abou el Mouna. «Nous sommes aujourd’hui dans la rue pour dire au peuple libanais que nous refusons les troubles qui sont intervenus ces deux dernières semaines, clame-t-il. Quels que soient les problèmes du Liban, nous devons y faire face ensemble et nous les résoudrons ensemble. Il faut rester unis pour la sécurité du pays», insiste-t-il.

«Ce qui s’est passé, il y a deux semaines, est une alerte rouge, déclare Melhem Khalaf, un des fondateurs d’OffreJoie. Cela aurait pu déclencher une guerre civile et provoquer des conséquences désastreuses. Nous ne pouvions pas laisser passer cela dans l’indifférence et dans la non-médiation. Notre rôle, poursuit-il, est de faire le pont entre tous et d’avoir le dernier mot. Ce qu’on a vécu ces dernières semaines doit rester l’exception. Certains nous appellent les commandos de l’espérance, c’est ce que nous sommes, nous descendons dans la rue immédiatement pour montrer ce que le pays porte au fond de lui».
La chaîne humaine s’est évertuée à faire la jonction entre la mosquée de Basta Tahta et celle de Khandak el-Ghamik. C’est d’ailleurs devant la première à 15h30 que les cheikhs Ali Bitar, sunnite et Kazem Ayad, chiite, se sont donné l’accolade. Puis juste à côté du jardin public de Basta, l’assemblée a planté un olivier avant que différents chefs religieux et représentants d’associations civiles ne s’expriment en faveur de l’unité nationale et de la paix. Mohammad, un commerçant du quartier, est sorti de sa boutique pour observer ce défilé de drapeaux libanais. «Au Liban, nous ne pouvons pas vivre seuls,  sans les uns et les autres, réagit-il. Dans mon immeuble,  il y a autant de familles chiites que sunnites. Bien sûr que cette initiative est une très bonne chose. Une fois que la politique se tait, il n’y a plus de problème entre nous».
A l’occasion de cette mobilisation citoyenne, deux drapeaux libanais ont été signés par tous et remis le lendemain, 26 mars, aux deux cheikhs sunnites agressés dans la région: Mazen Hariri et Ahmad Fakhran.
Les plus jeunes n’ont pas été en reste pour redonner le sourire aux Libanais et leur insuffler un tant soit peu d’espoir. «Nous sommes venus cet après-midi pour montrer que le Liban n’est pas aux chrétiens ou aux musulmans, il est à tout le monde, lance Nohram, une lycéenne des Makassed. Nous travaillons tous ensemble pour reconstruire cette cohésion parfois perdue entre Libanais. Aujourd’hui, les jeunes veulent rester au Liban pour travailler, si nous ne restons pas, qui le fera? Mais pour l’avenir, il faut la paix».

Delphine Darmency
 

La surprise du 29 mars
Vendredi 29 mars, l’émission Kalam Ennas sur LBC à 20h30, proposera un programme spécial dédié au chantier d’OffreJoie à la suite de l’attentat de la rue Mounzer. Une «grande surprise» sera annoncée en l’honneur de cette association, pas tout à fait comme les autres.
 

 

Related

L’opposition syrienne gagne du terrain. Après al bataille de Damas, celle d’Alep fait rage

Hollande et Obama déploient un filet protecteur. Le Liban au menu des grands

La guerre s’éloigne. La crise persiste

Laisser un commentaire


The reCAPTCHA verification period has expired. Please reload the page.