Rappelant le drame de Tal-kalakh, Yassine Jaber indique que certaines parties libanaises sont impliquées en Syrie depuis longtemps. Interview du député de Nabatiyé.
Quel est votre avis sur les fatwas appelant au jihad en Syrie, en réponse à l’implication du Hezbollah dans les batailles aux côtés du régime?
Il n’y a pas eu d’appel similaire de la part du Hezbollah. Le Hezb a, dès le départ, défini sa position, à savoir défendre les Libanais présents dans les villages situés à la frontière syrienne. C’est très limité. Il faudrait que les autorités libanaises et l’armée multiplient les efforts pour contrôler la situation aux frontières.
Dans quelle mesure la participation du Hezbollah et les appels des deux cheikhs Ahmad el-Assir et Salem Raféï au jihad plongent-ils le Liban dans les sables mouvants de la crise syrienne?
Ce sujet n’est pas nouveau. Nous n’avons pas oublié l’incident de Tal-kalakh. Certaines parties étaient impliquées en Syrie auparavant, mais elles en font l’annonce officielle aujourd’hui. Evidemment, cela a des retombées négatives sur le Liban, et il faut y mettre fin. Il faudrait que tous les acteurs politiques déploient des efforts pour maîtriser la situation.
Et le pilonnage du village de Hermel confirmant les propos du Front al-Nosra qui a menacé de transporter la bataille au cœur du Liban?
Le Front al-Nosra est une grande composante du terrorisme. Je pense qu’il faut adopter une position unifiée pour faire face aux actions terroristes. Nous réclamons le renforcement de l’armée aux frontières pour interdire l’extension des batailles au Liban.
Le Premier ministre désigné ne cesse d’exprimer sa volonté de former un gouvernement non partisan composé de personnalités non candidates aux législatives, qu’en dites-vous?
Tout cela est sujet à concertations. D’après le climat qui transparaît via les médias, le cabinet sera à caractère politique. Les termes technocrates et neutres n’ont aucune signification. Je pense que les positions se sont décantées et il est clair que nous nous dirigeons vers un gouvernement politique consensuel.
Est-ce que le député Walid Joumblatt demeure sur ses positions à ce sujet?
Le député Joumblatt s’active jusqu’à présent à rapprocher les points de vue entre les différents camps, afin de réaliser l’objectif auquel il s’est engagé, à savoir un gouvernement consensuel. Il n’y a aucune raison qui nous porte à douter de ses intentions. C’est au président Salam de faire ses choix. La balle est dans son camp.
Y a-t-il un lien entre la mise sur pied du cabinet et l’adoption de la loi électorale?
Non. Mais il est certain que l’achèvement de l’un de ces dossiers facilitera l’aboutissement de l’autre. Si, par exemple, nous parvenons à une entente autour d’une loi électorale, cela entraînera un climat de détente qui facilitera la naissance du cabinet et vice-versa. Mais je ne crois pas que les deux dossiers soient tributaires l’un de l’autre.
Que va-t-il se passer à la séance du 15 mai? Les députés vont-ils se réveiller au Parlement pour donner vie à une loi électorale, comme le dit le président Berry?
Alors que nous nous rapprochons de la date butoir de la fin du mandat de l’Assemblée, les séances ouvertes doivent être consacrées à la recherche de solutions afin d’éviter le vide institutionnel. Les trois ou quatre jours précédant la date du 19 mai seront déterminants pour tracer la feuille de route de l’étape à venir.
Après l’annonce par le président Berry de sa disposition à approuver tout accord interchrétien, le Hezbollah a adopté la même position. Le Moustaqbal estime-t-il que cela signifie le retour au projet de loi orthodoxe?
Pas forcément. Les chrétiens se sont réunis à Bkerké et ont pris position. Nous n’étions pas contre dès le départ, nous n’avons trompé personne et nous n’avons pas changé d’attitude, sachant que la partie qui se sent lésée par la loi de 1960 est la partie chrétienne. Il se peut qu’ils s’entendent sur une autre loi que le projet orthodoxe. Ils pourraient trouver une formule acceptable avec le projet de loi mixte. Les FL ont proposé une version mixte proche de celle de notre bloc. S’ils se mettent d’accord, nous les soutiendrons.
Que pensez-vous de l’ouverture de l’Arabie saoudite sur certaines fractions libanaises? L’ambassadeur Assiri a rendu visite au président Berry et reçu le ministre Bassil…
C’est excellent. Nous saluons l’ambassadeur saoudien pour l’effort qu’il entreprend. Le Liban a besoin que l’Arabie lui tende la main comme ce fut le cas par le passé. Le Liban a besoin du soutien de tous les frères arabes, l’Arabie saoudite, en tête.
Est-il possible que le président Berry se rende à Riyad?
Possible. Pas nécessairement tout de suite. Mais ce climat positif et cette ouverture sur l’ensemble des Libanais, ainsi que les propos modérés constituent un positionnement que nous apprécions au plus haut point.
Propos recueillis par Saad Elias