Magazine Le Mensuel

Nº 2916 du vendredi 27 septembre 2013

Presse étrangère

Cas de conscience

Les services étrangers des grands médias internationaux raffolent des portraits, des témoignages personnels et des reportages centrés sur l’humain qui donnent corps à une actualité trop lointaine. Petite sélection.

The Daily Beast
Le site américain The Daily Beast s’est intéressé aux réfugiés palestiniens du Liban, «victimes d’une double discrimination».
La tragédie des réfugiés palestiniens du camp de Nahr el-Bared, au nord du Liban, n’est pas terminée. Le dossier de cette blessure ouverte n’en finit pas de s’étoffer, dans un pays en crise. La dernière décision de l’Unrwa fut de considérer que le camp de Nahr el-Bared n’est plus en situation d’urgence, prétextant une autre tragédie, celle des réfugiés palestiniens des camps situés en Syrie et le manque de finances pour assumer son rôle dans les deux cas.
Fini donc les soins médicaux, les études et la reconstruction des logements. En riposte à la récente décision de l’Unrwa, les organisations palestiniennes ont envoyé un message à la directrice générale de l’Unrwa au Liban, Ann Dismorr, lui demandant de maintenir le plan d’urgence pour le camp Nahr el-Bared, car sa suppression aura de graves répercussions sur tous les autres camps au Liban.
La Commission européenne vient de débloquer une nouvelle aide financière d’un montant de 22 millions d’euros, en faveur de trois programmes menés dans le domaine de la sécurité et des affaires sociales au Liban. Seuls quatre millions seront consacrés à l’amélioration des conditions de logement et de la situation sanitaire des réfugiés palestiniens au Liban.

Le Monde
Le journal Le Monde a suivi le quotidien du contingent français de la Finul.
Une carte plastifiée du sud du Liban à la main, le maréchal des logis Antoine indique à ses hommes le parcours, tracé en vert, de la patrouille du jour. Pendant trois heures, samedi 14 septembre, cette unité de l’escadron d’éclairage et d’investigation doit sillonner, avec les Forces armées libanaises, les paysages vallonnés environnant la base de Dayr Kifa.
La zone en question, au cœur des fiefs du mouvement chiite du Hezbollah, a servi au lancement de roquettes lors de la guerre de l’été 2006.
Avant que le convoi de véhicules blindés légers, aux couleurs de l’Onu, ne s’engage sur ces routes de crête, jalonnées des drapeaux jaunes et verts du Hezbollah et du parti chiite Amal, les consignes sont données. «La situation en Syrie peut nous affecter à tout moment. Prenez cela en compte», intime le chef de patrouille à ses huit hommes.
«La situation est calme. C’est le cas depuis le début du mandat. Il n’y a eu aucun incident», minimise le chef de corps, le colonel Christophe Baudouin. Le calme règne au sud du fleuve Litani depuis l’été 2011 mais, reconnaît l’officier, une étincelle suffirait à embraser toute la région. «A chaque mission au Liban, on baisse d’intensité. La population est de moins en moins tendue et la région se développe», assure le capitaine Stéphane, qui effectue sa troisième opération au Liban depuis 2007.
Des mesures ont été adoptées pour réduire les désagréments des patrouilles quotidiennes des contingents onusiens. Les Français misent sur les actions civilo-militaires (Cimic), qui pallient les déficiences de l’Etat pour peaufiner leur image auprès de la population et des autorités locales.

Paris Match
L’hebdomadaire français Paris Match revient cette semaine sur Generation War, une exposition photo sur la guerre du Liban mise sur pied par Katya Traboulsi, «par nostalgie du temps passé et aussi pour que les nouvelles générations prennent conscience de nos erreurs». Extraits de son interview à l’hebdomadaire.
Au Liban, je n’ai trouvé aucun sponsor pour financer l’exposition car le titre comportait le mot guerre. En ce moment, les Libanais ne veulent rien savoir. Et surtout ne pas entendre parler de la guerre. On continue à vivre comme si de rien n’était. D’un côté, notre force est d’être capables de nous projeter en avant. Mais d’un autre côté, si on refuse de regarder en arrière, on ne peut pas avancer. En organisant cette exposition, je demande à ces photographes de me raconter comment ils ont vécu ce moment à 20 ans et, comment, maintenant, à 50 ans, ils vivent avec ce passé. A ce moment-là, on ne parlait pas du photojournalisme comme aujourd’hui. Quoi qu’il en soit, le plus souvent, on regarde les photos dans le journal au petit-déjeuner, on le jette ensuite et on ne pense jamais à la personne qui a pris la photo, ni dans quelles conditions elle l’a prise. Toutes ces questions, je me les posais. Je voulais partager ces interrogations. Donner une reconnaissance à ces gens qui risquent leur vie à chaque photo. Qui ont été témoins de nos erreurs. De cette période qui a été dramatique pour nous Libanais. Avec le temps, ces photos ont autant de valeur informative qu’artistique, car elles sont parfaites à tout point de vue, par leur cadrage, la lumière, le sujet et l’émotion qu’elles dégagent. Tout y est.

Rue89
Cette semaine, le site Rue89 a mis en ligne une galerie de portraits bouleversants intitulée Les fantômes du Drakkar.
Les hommes ne pleurent pas. Quand ils avaient 20 ans, quand ils étaient dans les paras, ils croyaient à cette baliverne. Aujourd’hui, ils en ont 50 et se foutent bien du qu’en-dira-t-on. Alors, ils pleurent désormais. Ils chialent comme les gosses qu’ils étaient encore, ce 23 octobre 1983, à Beyrouth, quand l’immeuble Drakkar s’est effondré. Leurs copains sont morts. Eux s’en sont tirés.
Pour la quarantaine des survivants de la troisième compagnie, trente ans n’ont rien effacé, bien au contraire. Tous gardent des séquelles psychologiques graves. L’un, qui a passé quarante-huit heures dans les décombres, est devenu amnésique. Un autre s’est détruit les neurones par l’alcool et la drogue. Un troisième est interné en psychiatrie. Un autre est mort dans un accident de voiture inexpliqué. Le 7 mars dernier, Christian Roulette, qui n’avait plus jamais donné de nouvelles, a été recontacté par un ancien copain. Ils sont restés quarante-huit minutes au téléphone. Deux jours après, Roulette avait disparu. La gendarmerie le recherche toujours.
Les survivants n’ont jamais eu le moindre suivi psychologique. Aujourd’hui, ils pestent contre ceux qui lésinent sur des pensions d’invalidité de 100 ou 200 euros, comme une dernière forme de mépris. Ils se sentent abandonnés.
Le 23 octobre prochain était prévu, pour la première fois, un voyage à Beyrouth sur les lieux du drame, organisé par le ministère de la Défense. Il a été annulé en raison du conflit syrien.

Julien Abi Ramia

Madagascar en colère
En raison de la maltraitance des domestiques malgaches au Liban, Madagascar tape du poing sur la table. L’article est publié dans l’hebdomadaire malgache L’Express.
Pour la première fois depuis la polémique sur la maltraitance des domestiques au Liban, Marcel Abi-Chedid, consul honoraire de Madagascar dans ce pays, sort de son silence. Il révèle des cas de travailleuses malgaches clandestines au Liban, malgré l’interdiction gouvernementale. «Je ne sais pas comment elles font, mais elles débarquent ici. Je n’apprends leur existence que quand il y a un problème, parce qu’elles ne figurent pas parmi les 3 000 ressortissants malgaches enregistrés au Liban».
Selon le consulat, seize mille demandes de travail au Liban sont bloquées depuis la 
suspension par le gouvernement de l’envoi des travailleurs à Beyrouth.

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