Magazine Le Mensuel

Nº 2936 du vendredi 14 février 2014

Le Saviez-Vous

Formation du gouvernement. Entre la Constitution et l’usage

Les difficultés qui entravent la formation d’un gouvernement remettent à l’ordre du jour, la formule d’un cabinet conventionnel et rassembleur. Pour les parties concernées, le gouvernement n’est pas conventionnel s’il ne tient pas compte du principe même de la coexistence, fondement du Liban. Sans contester cette vision, certains prétendent qu’elle n’est pas inscrite dans la Constitution.
 

Le préambule de la Constitution est clair: «Aucune légitimité n’est reconnue à un quelconque pouvoir qui contredit le pacte de la vie en commun». Toutefois, cet article est compris et, en tout cas, traduit différemment par les uns et les autres. Est-ce la communauté ou les partis qu’il faut prendre en considération dans la formation des gouvernements? La Constitution exige-t-elle que le gouvernement soit politique? Les partis sont-ils appelés à désigner eux-mêmes leurs ministres? La représentativité au sein du gouvernement, selon l’importance des blocs, y est-elle mentionnée? Quel est le rôle du Premier ministre désigné? Autant de questions qui se posent et auxquelles la Constitution répond.
 

Les usages, depuis Taëf
Ainsi, il n’existe aucune mention, dans le document d’entente nationale de Taëf ou dans la Constitution qui impose que le gouvernement soit «politique» ou qu’il doive être formé selon le partenariat, d’entente ou d’unité nationale. Le texte de la Constitution ne précise pas non plus la méthode dans la formation du gouvernement ou de la représentativité des blocs parlementaires. Doivent-ils tenir compte de l’ampleur et de la dimension de ces derniers?
Toutefois, depuis Taëf, des usages sont pris en compte. Dans les gouvernements formés, après le vote de la nouvelle Constitution, les Premiers ministres ont pris en considération la représentativité des blocs parlementaires. Ils se sont souvent heurtés aux revendications des parties concernées et des compromis ont permis la formation du gouvernement.
La «violation de la Constitution» est une accusation qui ressort pendant les concertations. Chacun a son interprétation et la mission du Premier ministre devient de plus en plus difficile. Selon l’article 64 de la Constitution, ce dernier a pour mission de mener des consultations parlementaires concernant le gouvernement dont il contresigne le décret de nomination avec le président de la République. Il est réduit le plus souvent à écouter les revendications des parties et à y répondre, faute de quoi le gouvernement reste dans l’impasse.
Jamais à ce jour, un gouvernement du fait accompli n’a été formé. Tous ont été constitués dans le respect de la coexistence et la représentativité de toutes les communautés et de toutes les parties. Seul le dernier en date, le gouvernement Mikati, démissionnaire et chargé de régler les affaires courantes depuis la démission de son chef, avait exclu les représentants d’une faction politique, celle du 14 mars.
En fonction du principe de la séparation des pouvoirs, le rôle des députés est de contrôler et de sanctionner la politique du gouvernement. Rien n’impose au Premier ministre désigné de se plier aux exigences des parlementaires exprimées pendant les concertations. Cependant, l’usage après Taëf est différent. Même s’il ne ressort d’aucun article de la Constitution le fait qu’il appartient aux parties politiques de désigner leurs ministres ou de choisir leurs portefeuilles, leurs demandes priment. Il ressort des articles de la Constitution la nécessité du respect du principe de l’égalité entre les communautés chrétiennes et musulmanes dans la répartition du nombre de députés et de ministres, mais il n’a jamais été fait mention de la représentativité des partis politiques.

Arlette Kassas

Quel rôle pour le président?
Selon l’article 53 de la Constitution, le chef de l’Etat «préside le Conseil des ministres lorsqu’il le désire sans prendre part au vote. Il nomme le chef du gouvernement, après consultation du président de la Chambre qui mène des 
consultations parlementaires impératives dont il l’informe officiellement des résultats. Il 
promulgue seul le décret de nomination du président du Conseil des ministres et, en accord avec celui-ci, le décret de formation 
du cabinet, et celui de la démission des 
ministres ou leur révocation. Il promulgue seul les décrets de la démission du gouvernement». 

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