Magazine Le Mensuel

Nº 2939 du vendredi 7 mars 2014

Cinéma

Dallas Buyers Club. L’histoire d’une rédemption

Fondé sur une histoire vraie, Dallas Buyers Club de Jean-Marc Vallée met à l’affiche Matthew McConaughey et Jared Leto dans leurs plus émouvantes prestations. Un film autour du sida et du combat d’un homme devenu héros malgré lui.
 

On s’y attendait, Dallas Buyers Club a permis à Matthew McConaughey et à Jared Leto d’obtenir respectivement les Oscars du meilleur acteur et du meilleur acteur dans un second rôle; distinctions qui avaient déjà couronné leur prestation aux Golden Globes et qui n’ont fait que se confirmer à la 86e cérémonie des Oscars. Les salles libanaises continuent d’accueillir, l’un à la suite de l’autre, les films lauréats et ceux qui étaient en lice dans les plus importantes catégories. Cette semaine, c’est au tour de Dallas Buyers Club de Jean-Marc Vallée de sortir sur grand écran.
Basé sur une histoire vraie, Dallas Buyers Club nous ramène en 1986, à Dallas au Texas. Ron Woodroof est un cow-boy, un vrai de vrai. A 35 ans, avec ses bottes, son chapeau Stetson, il mène une vie qui semble bien équilibré dans son chaos, entre sexe, drogue, alcool et rodéo. Mais tout est sur le point de basculer; il est diagnostiqué séropositif. Il ne lui reste plus que trente jours à vivre. Et dans les années 80, le sida, de croyance populaire, n’était supposé atteindre que les homosexuels. Accablé, acculé à se défendre face aux agressions qu’il subit de la part de ceux qui étaient ses amis, ces cow-boys machos comme lui, il est révolté par l’impuissance du corps médical. Une virée au Mexique s’impose, et le voilà remis plus ou moins sur pied grâce à des traitements alternatifs non officiels. Il y a là de quoi gagner de l’argent auprès de tous ces séropositifs désillusionnés à Dallas. En compagnie de Rayon, transsexuel, drogué, séropositif et un vrai caractère, campé par Jared Leto, il commence à rassembler d’autres malades en quête de guérison: le Dallas Buyers Club est né. Et il ne cesse de grandir, à mesure que la durée de vie de ces «condamnés en sursis» ne cesse de croître, contredisant les pronostics émis par le corps médical. Le succès du Dallas Buyers Club dérange précisément médecins, laboratoires et autorités fédérales. La bataille est ouverte. Ron ne cessera pas jusqu’au bout de se battre pour une nouvelle cause et pour sa propre vie.
 

Autant de détails humains
L’aventure de Dallas Buyers Club a commencé il y a plus de vingt ans, selon le site Allociné, alors que Ron Woodroof était encore en vie. Un mois environ avant la mort de ce dernier, Craig Borten, le scénariste à l’origine du film, a passé plusieurs jours en sa compagnie à enregistrer des dizaines d’heures d’entretiens. Et ce n’est qu’après deux décennies que Jean-Marc Vallée, avec le soutien, financier notamment, de Matthew McConaughey, se place derrière la caméra pour conter l’histoire de ce «self-made-man» américain, ce héros malgré lui. La beauté du film ne réside pas tant dans le développement de l’histoire que dans les détails humains qu’il donne à voir, à percevoir, à sentir; quand Ron prend la défense de Rayon dans les rayons d’un supermarché, quand Rayon va voir son père qui l’avait dénigré durant des années, quand Ron parle à cœur ouvert au Dr Eve Saks (Jennifer Garner) de son désir d’une vie normale aujourd’hui impossible… autant de scènes que Jean-Marc Vallée filme tout près des visages, caméra à l’épaule, pour rendre l’image lumineuse et lyrique, là où la réalité surpasse la fiction. Une réalité métamorphosée par l’approche cinématographique de Vallée puisqu’elle ne tombe jamais dans le piège du sentimentalisme ou du pathos, comme on aurait pu s’y attendre dans le cadre d’une telle histoire.
Le réalisateur québécois est très largement appuyé par ses deux têtes d’affiche, ses deux acteurs qui se révèlent hors pair. Méconnaissables tous les deux, tellement ils ont perdu du poids, une vingtaine de kilos chacun. Mais ce n’est pas là leur ultime prouesse. Leur jeu est merveilleux, un superlatif nullement exagéré et qui peine à leur rendre justice. Tout d’abord, Matthew McConaughey, poignant dans tous les états d’âme que traverse son personnage, de l’inconscience à la douleur, de la révolte à l’acceptation, de l’individualisme à la rédemption. Un rôle qui prouve finalement et réellement ses dons de comédien longtemps relégués dans des comédies romantiques. Ensuite Jared Leto qui s’était fait remarquer en 2000 dans le film mythique Requiem for a dream, et qui donne là une de ses plus émouvantes prestations.
Dallas Buyers Club, un film qui évoquera pour certains des effluves des Nuits fauves de Cyril Collard, mais qui garde bien les pieds sur terre, tout en vous captivant jusqu’au bout, malgré ses défauts.

Nayla Rached
 

Circuit Empire.

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