Depuis quelques années, les affaires de pédophilie sont de plus en plus nombreuses au Liban. Les victimes n’avaient pas le courage d’en parler ou même ne savaient pas ce qui leur arrivait. Les enfants maltraités ne s’expriment pas souvent, mais montrent certains signaux. Au cours de cette dernière décennie, de plus en plus de cas d’abus sexuels contre des enfants sont dénoncés.
Selon l’Unicef, un enfant est violé, torturé, abusé, toutes les trente secondes et plus de trois millions disparaissent chaque année à travers le monde. L’Onu indiquait, en 2009, qu’un enfant sur cinq était sollicité sexuellement sur des réseaux sociaux auxquels accèdent plus de quatre millions. Toujours selon un rapport de l’organisation internationale, 40% des 11-17 ans avouent avoir été confrontés à des informations ou à des images choquantes ou traumatisantes, alors qu’ils naviguaient sur la Toile.
Au Liban, d’après une étude de l’association Kafa, le Conseil supérieur pour l’enfance du ministère des Affaires sociales et Save the Children Sweden, le nombre d’enfants victimes de maltraitance et d’abus sexuels s’élevait à 219 000 en 2010. Cette étude présente des résultats alarmants: 16,1% d’enfants ont vécu au moins une forme d’abus sexuel et 12,5% ont été victimes d’actes sexuels.
L’étude souligne que le taux le plus important se situe au Nord, au Sud et au Mont-Liban. 54,1% des victimes ont raconté à un proche ce qu’elles avaient subi. 23,2% s’étaient murées dans le silence.
Malgré la protection judiciaire des droits de l’enfance, consacrée par la loi 422/2002, la maltraitance infantile au Liban continue à s’amplifier. Elle dépasse les formes classiques de l’abus telles que la violence physique, psychologique et sexuelle.
L’Etat libanais avait adopté certaines mesures pour prévenir et dénoncer la violence et l’abus contre les enfants. En mars 2006, le ministère des Affaires sociales a diffusé un message sur toutes les chaînes libanaises condamnant la violence faite aux enfants. Il a, en coordination avec une ONG, réalisé une série de documents (dépliants, affiches, messages) mettant en garde contre la violence dans la famille, et deux ONG ont mis en place un service d’accueil téléphonique ininterrompu pour répondre aux enfants victimes de maltraitance.
Les exemples dans la vie sociale libanaise sont nombreux. Au printemps 2012, cinq fillettes, de 8 et 9 ans, ont été victimes d’un enseignant de 23 ans. L’établissement scolaire réagit et l’enseignant est renvoyé de l’école et arrêté. Un garçon de six ans est battu et torturé, des traces de brûlures faites avec des cigarettes par un beau-père sur tout son corps; une fillette de quatre ans est violée par son père; une autre de dix ans est harcelée sexuellement par un religieux, responsable de l’éducation spirituelle dans le cadre de son école… Des centaines de cas sont ainsi révélés ces dernières années.
Plusieurs associations ont établi un plan d’action pour faire face à la situation actuelle et aider ces enfants martyrisés. Une campagne de sensibilisation est lancée et des informations relatives aux enfants en danger ou qui risquent de l’être sont diffusées. La société libanaise est de plus en plus consciente des effets de cette violence contre les enfants, mais le chemin est encore long pour arriver à les protéger réellement.
Arlette Kassas
La protection de l’enfant
Au Liban, en cas d’agression sexuelle contre un mineur, il appartient à l’Office de la protection des bonnes mœurs, qui relève des Forces de sécurité intérieure, de recueillir la déclaration de l’enfant dans une salle spécialement conçue au Palais de justice, inaugurée le 8 septembre 2004. Un travailleur social doit assister à la déposition. Le juge des enfants assure la protection de l’enfant victime d’une infraction pénale et décide des mesures nécessaires en tenant compte de l’avis du travailleur social que le tribunal a chargé de suivre l’affaire. Si l’âge de l’enfant ne le permet pas, il peut être exonéré de comparaître devant le tribunal.