Qui opérait de Maarab?
L’énigme du drone non identifié, qui a survolé l’espace aérien au-dessus de Maarab, demeure entière. Selon l’une des versions qui circulent, l’avion de fabrication iranienne appartiendrait au Hezbollah qui en possède plusieurs. Il en avait d’ailleurs fait usage au-dessus de l’espace israélien, il y a quelque temps. D’autres informations indiquent que le drone est israélien et qu’il avait également survolé Jounié et ses environs. Les milieux de l’armée se sont contentés de signaler qu’une enquête est menée à ce sujet, sans plus. Mais le drone a disparu lorsque les Forces libanaises (FL) ont fait savoir qu’elles se réservaient le droit de réagir en cas de récidive sans préciser la nature de la réaction promise. Certaines sources FL indiquent qu’il n’est pas impossible de recourir à des missiles, après l’installation de plusieurs bases pour guetter le drone.
Quel rôle pour le Parlement?
Les textes constitutionnels sont très clairs au sujet de la vacance de la présidence de la République, l’article 74 souligne que le Parlement se transforme immédiatement en collège électoral pour élire un nouveau chef d’Etat, explique un ex-ministre du 8 mars, expert en droit constitutionnel. Le législateur, explique-t-il, a veillé à conférer un caractère contraignant à cet article afin d’éviter le vide au niveau de cette institution, premier régulateur de l’action de l’Etat, comme le dit le président Michel Sleiman. Cette analyse, signale un ministre, a été perçue comme une réponse au président Nabih Berry qui défend la thèse selon laquelle le Parlement conserve son pouvoir législatif tant que le gouvernement réuni prend en charge les prérogatives du président de la République.
Campagne téléguidée par Damas
Dans le cadre de la campagne, menée par le 8 mars contre le président Michel Sleiman, le député Talal Arslan a violemment dénigré le chef de l’Etat. Il a souligné que les prises de position de ce dernier au sujet du Hezbollah constituent un alignement sur la coalition du 14 mars et sont dues au refus de la prorogation de son mandat à l’interne comme à l’externe. Selon Arslan, le président Sleiman aurait dépêché des émissaires dans plusieurs capitales arabes et européennes influentes dans le but de promouvoir le renouvellement de son séjour à Baabda, mais ils seraient revenus bredouilles. Le député de Aley n’a cependant livré ni le nom des émissaires, ni celui des pays où ils se seraient rendus… La campagne d’Arslan, d’après certains milieux politiques, s’inscrit dans le prolongement de la campagne téléguidée contre Michel Sleiman par Damas qui n’a pas apprécié son attitude vis-à-vis du Hezbollah, sachant que les contacts entre le président libanais et son homologue syrien sont suspendus depuis l’arrestation de l’ex-ministre Michel Samaha.
Propos de Safaoui: double version
Le ministre des Affaires étrangères, Gebran Bassil, n’a pas convoqué l’ambassadeur d’Iran, Ghadanfar Rokn Abadi, pour lui demander d’élucider les propos tenus par le haut conseiller du commandant général des Forces armées iraniennes, le général Yayha Rahim Safaoui. Celui-ci avait déclaré que «la ligne de défense iranienne se trouve au Liban-Sud». Bassil a dit, en Conseil des ministres, avoir été informé par l’ambassadeur du Liban à Téhéran, Ali Hajj, que cette déclaration n’a pas été faite, sans aucune autre forme d’explication ou de clarification de la part des autorités de l’ambassade iranienne au Liban. Les ministres du 14 mars se sont alors insurgés, réclamant la définition par Téhéran d’une position claire à ce sujet, d’autant plus qu’un haut responsable iranien avait, par le passé, qualifié le Hezbollah de brigade iranienne. D’après certaines infos, la déclaration de Safaoui, publiée in extenso en anglais et en persan, citait bien le Liban-Sud, alors que celui-ci a été barré de la version arabe. L’ambassadeur du Liban s’est basé sur l’arabe en faisant l’impasse sur le texte anglais.
Aoun-Hariri: c’est le flou
Les échanges se poursuivent sur l’axe Aoun-Hariri. C’est dans cette perspective que les deux leaders ont communiqué à la veille de la troisième séance parlementaire, consacrée à l’élection présidentielle, se promettant de poursuivre les consultations et peut-être de se rencontrer à nouveau hors du Liban. Ces contacts directs ou indirects (via Gebran Bassil et Nader Hariri) restent flous, imprécis et décodés de façon contradictoire par chacun des camps politiques. Certaines composantes du 14 mars estiment que le général Michel Aoun n’est pas inclus dans les options présidentielles de Saad Hariri et que, dans le meilleur des cas, il pourrait s’accorder de concert avec Aoun sur un candidat consensuel… Au sein du 8 mars, une partie estime que Hariri «manœuvre» et que le général Aoun et quelques-uns de ses proches ont surestimé la position du Moustaqbal à ce sujet et surévalué la promotion saoudo-américaine de cette option.
L’optimisme partagé du CPL
Concertations à l’hôtel Phoenicia entre le ministre Gebran Bassil et le responsable de la coordination et de la liaison du Hezbollah, Hajj Wafic Safa. Au menu: les derniers développements de l’élection présidentielle et les résultats des conciliabules CPL-Moustaqbal. Bassil a transmis à Safa les détails de sa dernière rencontre avec le président Saad Hariri à Paris, et lui aurait signifié que le commandement du CPL est optimiste et satisfait de l’évolution du dialogue en cours. Pour sa part, Safa a assuré que le Hezbollah est prêt à partager la satisfaction de ses alliés.
Parlement: une deuxième prorogation?
Si d’ici la fin du mois de juin au grand maximum, le Liban n’élit pas un nouveau président, le vide pourrait s’étendre à l’Assemblée nationale dont le mandat renouvelé expire à l’automne prochain, de l’avis de certaines sources politiques. Une nouvelle prorogation pour un ou deux ans ne serait pas à écarter, surtout si la crise syrienne et ses incidences négatives sur le Liban se poursuivent. Ces sources estiment que la reconduction du mandat des députés est inéluctable, vu que l’élection présidentielle, quand les circonstances seront plus favorables, ne peut se faire sans eux. De plus, la prorogation ne nécessitera pas la démission du gouvernement en place, du fait que la Constitution stipule que c’est l’élection d’une nouvelle Assemblée qui induit la démission du gouvernement.
Le rôle du balancier contesté à Joumblatt
Entre les ministres du député Walid Joumblatt, et ceux du Moustaqbal, règne une atmosphère plutôt houleuse. Surtout entre le ministre Waël Abou Faour et le cercle proche du président Saad Hariri. Abou Faour est fort mécontent de la campagne injustifiée menée contre Joumblatt. Selon les informations qui circulent, Hariri et Joumblatt ont donné des instructions pour mettre fin à toute polémique susceptible de dénaturer les relations entre les deux courants. Les consultations se poursuivront de façon bilatérale. A en croire certaines sources, le cours pris par les événements donne l’impression qu’il existe une sorte de connivence entre le CPL et le Moustaqbal, notamment en ce qui concerne le rôle de balancier que le député de la Montagne s’est donné. Parallèlement, les observateurs ont remarqué que les FL continuent à ménager Joumblatt malgré la candidature d’Henri Hélou à la présidence face au Dr Samir Geagea.
Aïn el-Heloué: la violence s’installe
Aïn el-Heloué vit dans une spirale continue d’assassinats et d’accrochages armés, rapporte une source palestinienne. Tous les indices politiques et militaires témoignent de l’existence d’une tension permanente à l’intérieur. Le meurtre du responsable des Ahbache dans le camp, le cheikh Arsan Sleiman, a été suivi par la propagation de rumeurs annonçant une série d’assassinats en préparation de responsables appartenant à divers mouvements palestiniens, par des forces régionalo-internationales dont Israël. L’assassinat de Ala’ Houjair, du groupe takfiriste de Bilal Badr, et les accrochages qui l’ont accompagné, indique la même source, prouvent que le rôle de la force sécuritaire mixte ne peut pas remplacer l’entente politique entre groupes palestiniens pour ôter aux takfiristes le pouvoir de décision en matière sécuritaire. Les confrontations armées de dimanche dernier constituent un défi au document d’entente interpalestinien qui stipule la sauvegarde de la sécurité du camp et le rejet des affrontements interpalestiniens. La situation sur le terrain ne porte pas à l’optimisme, explique cette source, bien que Fateh, Hamas et le Jihad se soient accordés à financer et armer cette force chargée de veiller à la sécurité. La formation de cette force équivaut à l’instauration d’une «sécurité à l’amiable» qui entraînera une multiplication des périmètres de sécurité.
Forte tension à Ersal
Les habitants de Ersal espèrent que les opérations militaires, menées dans les régions de Toufayl et de ses environs pour chasser les groupes armés terroristes, leur apporteront paix et sécurité. Des activistes qui ont rencontré une haute instance à Beyrouth l’ont prévenue que la situation générale dans le village de Ersal est fort tendue, la majorité des gens s’inquiétant de la multiplication des bandes armées syriennes impliquées dans le commerce des aides humanitaires et des objets volés. Ils ont ajouté qu’un pessimisme général règne sur le village où les provocations sont monnaie courante. De plus, les timides tentatives de certaines instances du village pour réguler les agissements des combattants fondamentalistes n’ont pas été couronnées de succès. Ces travailleurs sociaux s’interrogent: est-il possible que Ersal se transforme en «Camp Ashraf» (camp qui abrite les Moudjahidin du peuple en Irak) syrien au Liban par décision internationale et régionale surtout après la défaite des forces de l’opposition armée syrienne dans le Qalamoun et le déferlement de milliers de combattants vers Ersal village et jurd?
Le mufti de Zahlé importuné
Le mufti de Zahlé et de la Békaa, le cheikh Khalil el-Maïss, a été victime de vexations de la part de Ziad Homsi, agent israélien en liberté. Lors de l’inauguration du Salon du livre arabe et islamique à Deir Azhar dans la Békaa sous le patronage du mufti, les présents ont été surpris par les tentatives de Homsi de saboter l’événement, avec l’aide de certains dignitaires wahhabites, connus pour leur extrémisme, en interdisant à l’un des auteurs de prononcer son allocution, pourtant prévue au programme. D’après la version rapportée par des sources locales, Homsi a voulu affronter l’auteur d’un ouvrage traitant des crimes du Mossad au Liban et des agents appréhendés par les Renseignements libanais, pensant qu’il s’agissait d’un écrivain chiite. Mais les religieux fondamentalistes et Homsi ont été choqués en apprenant que l’auteur était palestinien et sunnite. Le cheikh Maïss les a finalement contraints à se replier et l’homme a pu signer son livre. Deux jours plus tard, le cheikh Maïss a pris part à un événement organisé en hommage au chef des Renseignements militaires dans la Békaa, le général Abdel Salam Samahat. Prenant la parole, le mufti a souligné «le rôle de l’armée dans la sécurisation et la pacification du pays».
Hémorragie démographique
En plein mouvement de revendications sociales, les recherches de l’historien et économiste, Albert Dagher, citent des documents et des études occidentales qui qualifient l’élite politique libanaise «d’irresponsable du point de vue social», et d’inféodée à l’étranger depuis le XIXe siècle à nos jours. Cette élite, d’après Dagher, assume une grande part de responsabilité dans les exodes successifs des populations à l’intérieur comme à l’extérieur, et dans les guerres civiles qui ont ébranlé le pays. Du temps du régime de la Moutassarrifiya, le Liban aurait perdu le quart de ses habitants; la famine due à la Première Guerre mondiale a tué 41% des habitants de la Moutassarrifiya et du Wilaya de Beyrouth. L’indépendance a occasionné un exode rural définitif (30%) et la guerre civile a causé l’immigration de 40% du peuple libanais. Du fait de la guerre, le tiers des forces actives libanaises a quitté le pays en moins de deux décennies. La gestion du système politique sur la base de la centralisation du pouvoir par les principaux pôles (le za’imisme, comme l’appelle Arnold Hottinger) crée des «patrons de clientèle» qui s’imposent, dans une deuxième étape, par la force aux diverses classes sociales, avance-t-il. Stephen Winter explique que cet exercice autoritaire est un héritage du régime ottoman désuet lorsque celui-ci a créé le bureau gouvernemental de privatisation, à savoir «la politique des notables», comme l’appelle Albert Hourani. Tout cela a mené à l’immuabilité de «l’Etat faible, soumis aux diktats des politiques libanais».