Magazine Le Mensuel

Nº 2977 du vendredi 28 novembre 2014

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Les auteurs libanais au Salon du livre de Montréal

Après Beyrouth, c’est le Salon de Montréal qui, en novembre, attire les auteurs, anime les éditeurs et fait connaître les talents. Les Libano-Canadiens, comme chaque année, font partie de la fête dans la métropole francophone. Nous vous en présentons quatre qui ont signé leurs dernières œuvres.

Frida Anbar, Le cordon invisible

Elle écrit comme elle vit: ardemment. Ses livres sont à son image: colorés et généreux. Une générosité étonnante, une synergie inlassable, une vitalité contagieuse. Ses deux romans (d’amour), Aléas et Le cordon invisible, palpitants et audacieux, regroupent une multitude d’émotions, d’états d’âme et de rebondissements signés par l’archétype de la Libanaise dans l’âme qui, pourtant, vit ardemment son Canada. Conseillère aux affaires internationales de l’Université de Montréal, Frida vient de sortir un livre électronique. «J’ai pris un cours pour pouvoir le réaliser». Elle y raconte l’histoire d’une petite fille qui vit à Washington et qui rentre avec sa grand-mère pour la première fois au Liban qu’elle découvre et auquel elle s’attache. Un été au Liban avec Téta est un livre pour enfants destiné à la diaspora dont les images signées Georges Takla, agrémentées de la voix chaleureuse de Magida el-Roumi, racontent son périple. Un moment émouvant à passer en faisant glisser les pages… Surtout quand on sait que Frida le distribue gratuitement.

 

Joe Jbeily: le livre croche

Un titre pas du tout représentatif de son auteur. Un homme d’affaires réussi, réinventé,  pour son grand bonheur, en un sculpteur reconnu, qui flirte avec l’hypnothérapie, la graphologie, la psychosociologie, en plus d’être diplômé des Beaux-arts. Installé depuis quarante ans au Canada, le Libanais multi-talentueux s’intéresse à tout et s’adonne à l’écriture comme pour titiller sa plume, quand il ne compose pas des vers de zajal dans ses moments creux (à se demander quand?!). Dans son petit livre coupé croche (il est P.-D.G. d’une société de communication en graphisme), il met toute sa sagesse orientale au service de son expérience canadienne. Un petit recueil qui recèle des pensées profondes sur la vie, l’amour, la sexualité, la religion, les enfants ou le travail. Le tout livré dans un format ironique, voire de dérision: «Les deux seuls vols pour lesquels nous ne devrions jamais être punis sont, le vol aérien et celui d’un baiser. Une récompense ultime est même offerte à ceux qui prennent le premier pour voler le deuxième». Craquant.

 

 

 

Nadine Ltaif, Hamra comme par hasard, éditions du Noroît

Venue de son Liban natal pour étudier le cinéma et la littérature au Québec, Nadine s’y installe. Commence pour elle un beau chemin poétique avec la publication aux éditions du Noroît de plusieurs recueils dont Métamorphoses d’Ishtar (1987), Entre les fleuves (1991), Le livre des dunes (1999), Le rire de l’eau (2004) et Ce que vous ne lirez pas (2010). Sa poésie narrative, faite de douceur et de mélancolie, est traduite en plusieurs langues dont l’anglais, l’espagnol et l’islandais. Elle a également traduit elle-même Nisan de John Asfour, le poète qui a Les yeux bandés (titre de son premier recueil de poésie (1976), devenu aveugle à la suite de l’explosion d’une grenade, titulaire d’un doctorat et professeur de littérature de McGill. (John Asfour est décédé il y a quelques mois et ses collègues au Cénacle culturel Liban-Québec, dont Nadine Ltaif, lui ont rendu un vibrant hommage).
Dans Hamra comme par hasard (2014), Nadine nous renvoie à un passé lointain, sorte de voyage dans le temps, dans le quartier de son enfance à Beyrouth. Parce que «entre les morts et les mots… il n’y a qu’une lettre»,

«Tout me revient, le nom des rues

L’odeur polluée

Mêlée d’humidité… 

Beyrouth dans son plaisir du matin».

 

Rima elKouri: Pas envie d’être arabe, éditions Somme Toute

La chroniqueuse «arabe» à La Presse, un des plus grands quotidiens de Montréal, nous livre les textes impeccablement ficelés de ses chroniques et reportages qu’elle écrit déjà depuis le 10 septembre 2001 (véritablement par hasard!). La Libanaise d’origine, née au Canada, reprend le titre de sa toute première chronique dans laquelle elle refuse d’être étiquetée arabe. «Non pas qu’il y ait dans mes origines quoi que ce soit de honteux. Mais l’idée de me retrouver dans le camp des suspects, aux côtés de millions de gens pas plus suspects que moi, ne m’intéressait pas. L’idée de devoir choisir une seule appartenance, non plus… Mais je ne suis pas une victime pour autant. Les victimes n’ont pas le luxe d’une aussi belle tribune. Je ne suis que témoin… témoin d’un malaise qui me dépasse, qui nous dépasse. Un malaise que j’ai tenté, au fil des chroniques, de retourner dans tous les sens. Pour voir au dos des clichés si on s’y trouve». On aura tout compris.

Les ouvrages de plusieurs auteurs arabophones étaient présents au stand Dar el-Kachaf, dont celui du journaliste Mohammad el-Atrache, directeur et instigateur du Salon el-Andalous qui a signé son récit Mariam, Zakirat watan, dédié à sa mère.  

 

Gisèle Kayata Eid, Montréal

 

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