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Nº 2994 du vendredi 27 mars 2015

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Société

Annick Girardin, secrétaire d’Etat à la Francophonie. Auprès des réfugiés syriens de Saïda

A l’occasion de la clôture du mois de la francophonie, la secrétaire d’Etat au Développement et à la Francophonie, Annick Girardin, était en déplacement au Liban du 21 au 23 mars dernier. Dimanche, elle s’est rendue au centre collectif d’Ouzaï, à l’entrée de Saïda, où sont réfugiées des centaines de familles syriennes, avant de se rendre à Deir el-Qamar. Magazine l’a accompagnée.
 

Situé à l’entrée de Saïda, le centre collectif d’Ouzaï* a accueilli dimanche dernier la visite d’une délégation française. Accompagnée de l’ambassadeur de France, Patrice Paoli, et d’une délégation formée de membres de son cabinet, du ministère des Affaires étrangères, du développement international et de l’ambassade, Annick Girardin a visité les habitations, les installations sanitaires, les salles de classe et l’aire de jeux récemment aménagées et financées par le Centre de crise et de soutien du ministère des Affaires étrangères français. Sur place étaient aussi présents Motaa Majzoob, conseiller de la municipalité de Saïda, Tarek Bizri, représentant de l’union des ONG à Saïda et de DCA (Development and Cooperation Association), partenaire-clé de Pu-Ami dans le centre collectif d’Ouzaï. Etait également présente, Astrid Castelein, représentante de l’UNHCR.
 

Réhabilitation
L’association Pu-Ami œuvre dans la région de Saïda depuis 2001. Née de la fusion de Première urgence et Aide médicale internationale, elle s’occupe du centre d’Ouzaï depuis 2012. Lors des premières interventions humanitaires, l’association a permis d’apporter des soins d’urgence aux arrivants, la réhabilitation du bâtiment, la création d’infrastructures d’eau et d’assainissement, l’hygiène et l’alimentation. Au début de la crise syrienne, les premières familles venues ne sont qu’une vingtaine. Très vite, d’autres arrivées massives sont de plus en plus fréquentes, créant ainsi des besoins grandissants. En mars 2013, Pu-Ami procède à une évaluation en profondeur qui permet de mettre en lumière les besoins urgents en eau, en hygiène et en assainissement. Financée par l’UNHCR, l’association a pu, grâce aux dons, leur installer des latrines et des douches. L’accès à l’eau est également perfectionné, avec l’installation de tankers et de points d’eau. Aujourd’hui, l’association gère et s’occupe de 859 habitants, dont 479 sont des enfants. Selon Agnès Kornat, responsable de la communication de Pu-Ami, la visite de la ministre est «une bonne manière de voir dans quelle situation vivent les réfugiés. C’est un lieu qui se prête à la réalité des choses et c’est une belle représentation de la France. Si cela pouvait permettre des investissements supplémentaires, ce serait très positif».
En 2014, après avoir réalisé d’importants travaux de réhabilitation, d’assainissement et de création d’infrastructures (notamment la séparation de pièces pour permettre des espaces d’intimité aux familles), l’association française décide de développer des solutions en matière d’éducation et des activités récréatives. Ainsi, grâce au soutien financier de la France, du MAE et des partenaires locaux, les enfants de 6 à 16 ans peuvent désormais suivre des cours d’éducation informelle. Des cours d’anglais, d’arabe et de mathématiques et, pour les femmes, des cours de littérature. Ces cours, très demandés également par les hommes, leur seront ouverts durant l’année 2015. Au total, ce sont 228 enfants et une quarantaine d’adultes qui suivent le programme d’éducation. Installées au rez-de-chaussée, les salles de classe aménagées ont tout d’une véritable école. Assis derrière leurs bureaux, les élèves, disciplinés et de tout âge, récitent les lettres de l’alphabet en anglais, de A à Z, sans aucune faute. «Cela permet à certains enfants, qui ne pouvaient même pas aller à l’école, de se constituer une base pour l’avenir», selon une volontaire de l’association. Se prêtant au jeu avec les élèves, Annick Girardin a pu échanger avec certains responsables de l’éducation et des professeurs. Pour la ministre, il était important de se rendre sur place: «Les visites de terrain sont une chose que je fais systématiquement. Dans le cas du Liban, il s’agissait de connaître la réalité des camps, et cela est toujours mieux pour en parler même si la vraie solution se trouve maintenant en Syrie… J’avais fait la même démarche lors de la crise d’Ebola. Je suis la seule ministre à m’être rendue en Guinée et j’ai cette même volonté pour le Liban. Bien sûr, on ne sort pas indemne de ce genre de visite, mais c’est important de montrer la vraie solidarité».
Si les cours d’éducation sont une réussite, l’avenir des familles reste cependant incertain. Au début de la crise syrienne, le centre collectif s’était installé dans ce bâtiment, qui était alors une université en cours de construction. Le propriétaire souhaite finaliser son projet, d’ici 2016. Le loyer étant payé par le propriétaire et l’UNHCR, les familles se trouveraient menacées d’expulsion en janvier prochain. Une véritable crainte pour les associations qui en ont profité pour alerter la ministre. Annick Girardin s’est voulu rassurante. «Le problème de cette menace d’expulsion est qu’elle est vécue comme une deuxième cassure par les familles. Elles en ont déjà vécu une première lorsqu’elles ont dû quitter la Syrie. L’expulsion de ce centre collectif ne ferait qu’aggraver les choses, et nous le comprenons très bien».
 

Conférence des donateurs
Dans le cadre de la troisième Conférence internationale des donateurs pour la Syrie au Koweït, le 31 mars, qui réunira quelque 78 pays et 40 organisations internationales, Annick Girardin a déclaré que la France «allait parler du soutien que la communauté internationale peut apporter à la région». La conférence sera ouverte par l’émir du Koweït, cheikh Sabah el-Ahmad Al Sabah en présence du secrétaire général de l’Onu. Ban Ki-Moon. Lors des conférences précédentes, des promesses avaient été faites successivement de 1,5 milliard de dollars (2013) et 2,4 milliards de dollars (2014). Des chiffres insuffisants selon l’Onu.

Marguerite Silve
 

*L’ONG française Première urgence-Aide médicale internationale (Pu-Ami) s’occupe, depuis 2012, du centre collectif d’Ouzaï, pour les réfugiés syriens. Ce lieu d’hébergement a été en partie financé par la France et fait partie des priorités du Centre de crise et de soutien du ministère des Affaires étrangères français.

Le bibliobus de Deir el-Qamar
C’est à l’Institut français, situé dans la montagne du Chouf et parmi les neuf présents au Liban, qu’Annick Girardin et Nora Joumblatt ont inauguré le nouveau bibliobus de Deir el-Qamar. Avec 2 500 abonnés par an et plus de 13 000 documents consultables par tous, c’est un véritable message d’amitié franco-libanaise et de transmission de culture qui a été mis à l’honneur. Dans son discours de présentation, en présence de la directrice de l’Institut Anne-Dominique Chouteau, Annick Girardin a tenu à remercier l’Institut français pour la promotion de la culture française au Liban, ainsi que l’accès à la culture et aux livres qui font partie de la politique de proximité que le gouvernement français tient à développer. «Ce que souhaite la France, c’est partager les valeurs de la langue française et promouvoir à travers elle la solidarité, comme celle que le Liban a démontrée en accueillant les réfugiés syriens sur son territoire. C’est aussi l’occasion de montrer la fraternité franco-libanaise et de prouver que la francophonie peut permettre un avenir meilleur pour les jeunes». La ministre du Développement et de la Francophonie n’a pas manqué de remercier Nora et Walid Joumblatt pour leur soutien de ce projet. Revenant sur son déplacement, un peu plus tôt dans la journée au centre d’Ouzaï, Annick Girardin a déclaré être venue avec ses «deux casquettes», du Développement et de la Francophonie, entre des aides économiques pour l’urgence humanitaire et la transmission de la culture et de la langue françaises au Liban.

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