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Nº 2999 du vendredi 1er mai 2015

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Municipalités vs EDL. Les cheminées de Zouk en question

243 cas de patients souffrant de cancer pulmonaire, 3 962 cas de patients à infections respiratoires, 3 319 cas de personnes asthmatiques. Ces chiffres, relevés entre 2011 et 2014, dans la région de Zouk Mikael et de ses environs, ne sont pas négligeables. Alors que la municipalité de Zouk se révolte contre la mort lente provoquée par les cheminées de la région, l’Electricité du Liban (EDL), elle, assure que le degré de pollution a été considérablement réduit depuis 2012.

La municipalité de Zouk, ainsi que ses citoyens se sont mobilisés, le samedi 25 avril, pour manifester contre l’expansion de la centrale électrique et contre l’ajout de nouveaux groupes électrogènes dotés de onze nouvelles cheminées. Interviewé par Magazine, le vice-président de la municipalité de Zouk, Elie Beaino, explique: «Toute la région manifeste pour arrêter la mise en place de ces nouvelles sources de polluants mortels. L’EDL nous avait promis que la nouvelle station fonctionnerait au gasoil. Pourtant, depuis 1983, celle-ci se fait particulièrement polluante depuis son fonctionnement au fuel-oil».
 

L’EDL explique
L’EDL a assuré, dans un communiqué, avoir «réussi à réduire les émanations de la centrale dans de grandes proportions, en conformité avec les standards environnementaux locaux – définis par le ministère de l’Environnement – et internationaux – ceux de la Banque mondiale». Des mesures de protection ont été prises depuis 2012, l’institution ayant doté les turbines d’additifs chimiques servant à réduire les émanations résultant de l’utilisation du fuel-oil. Nous pouvons lire dans le communiqué que «ce projet a été un grand succès, autant pour l’amélioration du rendement des groupes électrogènes que pour la limitation des émanations de polluants dans une proportion qui avoisine les 90% pour certains polluants». D’après l’EDL, le taux d’émission de petites particules a été réduit de plus de 6% (pour atteindre 75 mg/mètre cube), le taux d’oxyde de carbone (CO) de 80% (340 mg/mètre cube), le taux d’oxyde d’azote (NOx) de 10% (430 mg/mètre cube) et le taux de trioxyde de soufre (SO3) de 90% (0,85 mg/mètre cube). L’Electricité du Liban ajoute qu’un système de contrôle continu des taux de CO et de NOx a été mis en place depuis 2012 et qu’un appel d’offres a été lancé pour le traitement chimique des trois prochaines années, avec, dans le cahier des charges, une clause sur le contrôle continu.

 

Réponse de la municipalité de Zouk
L’impact des centrales thermiques sur la qualité de l’air est davantage aggravé par la teneur en soufre de la combustion de carburant à haut facteur d’émission, tel le fuel lourd. Les cheminées de la centrale ne sont pas munies d’unités de traitement efficaces telles que les unités de collecte de poussière et/ou les procédés de désulfuration des fumées. Selon la municipalité, la centrale de Zouk est mal placée dans la région à cause de l’obstacle que représentent les collines allant de Nahr el-Kaleb à Maameltein, empêchant ainsi la dispersion des nuages de gaz dégagés par la centrale, à cause des vents sud-ouest prédominant dans la région, et qui dirigent ces gaz vers la ville de Jounié en raison de la forte humidité qui règne dans l’atmosphère.
Il est, pour cela, indispensable que les cheminées répondent à une hauteur bien définie (minimum 220 mètres) pour permettre aux gaz de dépasser une couche atmosphérique permettant une dilution des matières toxiques de façon naturelle. Dans les pays développés, il est recommandé d’utiliser le gaz naturel dans les centrales proches des villes et de recourir au fuel-oil dans celles qui en sont éloignées. Au Liban, la situation est tout autre: le pays fait appel au fuel-oil pour des raisons économiques. La municipalité propose, dans ce sens, d’utiliser l’eau des fleuves comme source d’électricité, d’encourager l’installation de l’énergie solaire individuelle ou collective, d’importer le fuel-oil selon les normes internationales (la teneur en soufre ne devant pas dépasser 1%), de construire les centrales d’électricité dans des environnements adéquats à long terme et, finalement, de filtrer les cheminées. «Notre mouvement d’aujourd’hui est pacifique. Nous avons lancé notre cri d’alarme et allons rentrer chez nous», a martelé Nouhad Naufal, président de la municipalité de Zouk, lors de la manifestation du samedi 25 avril. «Nous mettons cependant les autorités en garde: nous exigeons l’arrêt des travaux d’agrandissement de la centrale. Si nous ne sommes pas entendus d’ici quinze jours, nous recourrons à l’escalade. Et ce jour-là, nous n’attendrons la permission de personne pour forcer les portes de la centrale s’il le faut», ajoute-t-il.

Natasha Metni

Rappel historique
La centrale d’électricité de Zouk a été construite à la fin des années cinquante pour répondre aux besoins de la région. Le choix de Zouk s’est fait de manière à assurer la proximité avec la capitale pour économiser le transport d’énergie. Après la centrale de Zouk, ont été construites celles de Jié pour assurer les besoins du Sud et de la Békaa. Par ailleurs, le Nord est resté sous la tutelle d’une société privée (Kadicha). En 1970, la reprise économique et les besoins accrus en énergie électrique ont conduit à la construction d’autres centrales, à savoir celle de Salaata. Les événements de 1975 ont amené alors les responsables à centrer leur projet sur la région est de Beyrouth. La centrale de Zouk fut ainsi agrandie sans prendre, pour autant, en considération les conséquences néfastes des polluants sur l’environnement et la santé publique.

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