Magazine Le Mensuel

Nº 3020 du vendredi 25 septembre 2015

general

Dialogue. Les bouchées doubles… en octobre

La troisième séance du dialogue national, mercredi, a été décisive sur un seul plan, celui de l’engagement de toutes les parties à le poursuivre coûte que coûte. Cette séance était d’autant plus utile qu’elle a eu lieu la veille du long congé de la fête de l’Adha et du voyage du Premier ministre à New York. Prochains rendez-vous les 6, 7 et 8 octobre.

Tous les protagonistes du dialogue national sont donc venus à la troisième réunion place de l’Etoile, excepté l’ancien Premier ministre, Najib Mikati, pour cause de voyage. Même le général Michel Aoun, qui avait, à la précédente réunion, exprimé son mécontentement face à la volonté déclarée du camp du 14 mars, notamment l’ancien Premier ministre, Fouad Siniora, et le ministre des Télécommunications, Boutros Harb, de le mettre directement en cause, a participé à la réunion, en dépit du suspense maintenu jusqu’au bout. Selon l’un des participants, les protagonistes ont compris, à travers les développements des deux dernières semaines, que l’alternative au dialogue, c’est la rue, mais une rue incontrôlée qui ne répond pas aux schémas traditionnels et ne respecte pas le clivage politique et confessionnel habituel. Il est donc préférable de continuer à se disputer à l’intérieur de l’espace clos de la salle de conférence que de laisser la rue à ses débordements. En même temps, les ambassades occidentales ont fait savoir aux principaux responsables du pays qu’il est important, dans les circonstances actuelles, de maintenir le dialogue, même s’il a peu de chances d’aboutir à des résultats concrets dans un proche avenir. Toutefois, après le coup d’éclat contre le général Aoun de la première séance et l’absence de ce dernier à la deuxième, le président de la Chambre, Nabih Berry, et le leader druze, Walid Joumblatt, ont estimé qu’il fallait faire un pas en direction du chef du Bloc du Changement et de la Réforme. C’est ainsi qu’au cours de la semaine précédente, les contacts se sont multipliés, notamment entre le ministre de la Santé, Waël Abou Faour, et le ministre de l’Education, Elias Bou Saab, pour tenter de trouver une entente au sujet des nominations militaires, qui donne satisfaction au général Aoun, tout en renforçant la position du Premier ministre, Tammam Salam, dans ses discussions à New York en marge de l’Assemblée générale de l’Onu, et en permettant de redynamiser l’action du Parlement et du gouvernement.
En principe, toutes les parties sont désormais d’accord pour admettre qu’une solution à ce problème est, à la fois, possible et utile pour tout le monde. La base du compromis reste la proposition du directeur de la Sûreté générale, Abbas Ibrahim, mais revisitée de manière à ne concerner que trois généraux qui seraient promus au rang de brigadier général pour compléter le conseil militaire formé de huit membres, mais qui n’en compte actuellement que cinq. Ce qui permettrait aux promus d’avoir un an de service de plus. Parmi les trois candidats à la promotion, il y a donc le chef des Commandos, le général Chamel Roukoz. En dépit des tentatives de placer ce dernier dans le camp politique du général Michel Aoun, il est clair que l’homme jouit d’une grande confiance au sein de l’armée et de la part de toutes les parties politiques. Publiquement, toutes les parties seraient donc d’accord sur cette formule, sauf… le commandant en chef de l’armée, Jean Kahwagi, qui la juge négative pour le moral des officiers et l’ancien président Michel Sleiman, qui a été lui aussi commandant en chef de l’armée pour des raisons politiques. Il se pourrait, toutefois, que d’autres parties se cachent derrière ces deux personnalités pour s’opposer à ce qu’elles considèrent une concession faite à Aoun et à son camp.
Il est clair que ce sujet a été débattu en marge de l’ordre du jour de la troisième séance, mais aucune concrétisation officielle n’est attendue avant le retour du Premier ministre de son périple new-yorkais. Soit il revient avec un feu vert pour entamer un processus de dynamisation des institutions publiques, qui commence par les nominations militaires et pourrait être couronné par l’élection d’un président, soit son camp continuera à rejeter toutes les possibilités de compromis. Pour l’instant, la volonté de toutes les parties de participer au dialogue national est un indice encourageant…

Joëlle Seif

Un mouvement qui s’essouffle?
En parallèle à la troisième séance du dialogue national, le mouvement de protestation populaire a maintenu une présence symbolique autour de la place de l’Etoile, sans menacer la tenue de la réunion. Simple essoufflement ou volonté réelle de donner une chance au dialogue? Les analyses divergent selon les positions politiques, mais il est clair que, comme aucun problème n’a été réglé, les deux parties continueront à s’affronter par intermittence et selon des degrés variables de mobilisation, en attendant les développements régionaux et internationaux.

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