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Nº 3022 du vendredi 9 octobre 2015

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Elie Ferzli, ancien vice-président du Parlement. «Le Golfe sera le nouveau champ de bataille»

Dans une interview accordée à Magazine, Elie Ferzli considère que les Américains souhaitent un nouveau Sykes-Picot pour redistribuer les rôles entre eux et la Russie en mettant fin au rôle des Européens, notamment des Français, dans cette partie du monde. L’ancien vice-président de la Chambre affirme que «la phase de vengeance contre ce qui s’est passé le 11 septembre 2001 vient de commencer».

Comment analysez-vous l’intervention militaire russe en Syrie? Vise-t-elle réellement à combattre les extrémistes de Daech, alors que les médias internationaux laissent entendre que la Russie a d’autres motifs en tête, dont l’appui direct à Bachar el-Assad?
Le moment est propice pour le faire. La Russie ne peut pas rester les bras croisés devant cette terrible vague terroriste, surtout après l’effondrement du rôle de l’Europe avec les flots de migrants qui l’envahissent, et une sorte de démission des Européens par rapport à ce qui se passe. Un déferlement et une attitude démissionnaire qui soulèvent mille et une questions d’ailleurs sur ce qui attend cette partie du monde. N’oublions pas aussi que les distances entre les frontières russes et Alep sont plus proches que celles existant entre Moscou et l’Ukraine ou la Géorgie. Le président russe, Vladimir Poutine, ne pouvait pas permettre que l’hégémonie des extrémistes s’étende aux frontières de son pays et menace sa sécurité. La Russie souhaite également préserver les équilibres stratégiques dans la région du bassin méditerranéen. Elle veut en outre avoir un rôle prépondérant et éviter que le scénario de la Libye ne se répète en Syrie.

La Russie s’est-elle concertée avec les grandes puissances, notamment les Etats-Unis, avant d’intervenir?
Je pense qu’il y a une coordination entre les Russes et les Américains et ces deux grandes puissances ont juste mis les Européens au courant des développements qui allaient intervenir dans les scénarios syriens. Cette coordination a eu lieu au sommet du Mexique, où Barack Obama et Vladimir Poutine se sont longuement étendus sur ce sujet. Ce jour-là, les deux hommes se sont entendus sur le fait que ce qui s’est passé en Libye ne pouvait pas se répéter en Syrie. Poutine s’est rendu à la suite de cette rencontre en Israël pour parler avec Benyamin Netanyahu du dossier syrien et le mettre au courant des faits. Récemment, c’est Netanyahu qui s’est rendu chez le président russe. Les Américains souhaitent que la pression continue contre Asaad pour qu’il ne tourne pas le dos aux solutions politiques. En parallèle, ils désirent un nouveau Sykes-Picot pour redistribuer les rôles entre eux et la Russie en mettant fin au rôle des Européens et notamment les Français dans cette partie du monde. Cette répartition sera appuyée par deux pays régionaux et Israël. Nous devons exprimer les choses telles qu’elles sont.

Quelles peuvent être les répercussions de l’intervention russe en Syrie sur le Liban et l’ensemble des pays de la région?
A l’issue de l’Assemblée générale de l’Onu à New York, les grandes puissances ont publié un communiqué dans lequel elles affirment souhaiter que la Syrie reste unie et laïque, mais nous assisterons à l’émergence d’entités politiques, chacune d’elles aura ses propres «recours». Je pense que l’intervention russe aboutira à une véritable solution en Syrie, qui englobera toutes les parties. Il n’y a plus de place pour ceux qui ne veulent pas respecter la pluralité dans chaque pays dont le Liban. L’hégémonie de ceux qu’on appelle, au Liban, la majorité parlementaire s’amenuisera. L’extrémisme va être profondément touché et cela apparaîtra après les élections en Turquie qui se tiendront début novembre, surtout si Recep Tayyip Erdogan sort perdant, ce qui est très probable. Un nouveau champ de bataille se profile à l’horizon, celui de tout le Golfe. Les terroristes seront ainsi cernés. Ils iront se cacher dans les pays qui les ont aveuglément appuyés et financés. De ce fait, ils seront bombardés dans leurs nouveaux fiefs. Si je devais résumer la situation actuelle, je dirais que la phase de vengeance contre se qui s’est passé le 11 septembre 2001 vient de commencer. Et je m’arrête là.

Propos recueillis par Danièle Gergès

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