Magazine Le Mensuel

Nº 3025 du vendredi 30 octobre 2015

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Grippe. Faut-il se faire vacciner?

Le virus de la grippe se transmet facilement. Bien que bon nombre de mesures hygiéniques permettent de limiter sa propagation en période d’épidémies, reste à savoir si la vaccination est le meilleur moyen de s’en protéger.

«Chaque hiver, le même refrain revient. La grippe est là et on ne sait jamais quoi faire: vaccin ou pas?», déclare le Dr Nouhad Genadry à Magazine. L’année dernière, cette maladie a provoqué en France plus de 11 400 décès. «Chaque année, la composition du vaccin change. Ainsi, celui de la saison 2015-2016 est décrit par les spécialistes comme particulièrement efficace». La raison? Le Dr Genadry affirme que ce vaccin prend en compte la souche H3N2, qui a largement sévi l’hiver dernier. C’est, en effet, la question de l’aluminium, contenu comme adjuvant dans certains vaccins dont celui de la grippe, qui a fait le sujet d’une polémique. Selon l’INPES (Institut national de prévention et d’éducation pour la santé), des traces d’aluminium peuvent rester autour du site d’injection pendant plusieurs années, mais sans causer de maladie musculaire ou autre. Aucune donnée donc ne permet de mettre en cause la sécurité des vaccins qui en contiennent, comme l’explique le Dr Nouhad Genadry. En outre, «quelques cas de narcolepsie (maladie qui se caractérise par des endormissements intempestifs) ont été mentionnés, sans toutefois mettre en doute l’efficacité du vaccin, ni le mettre en cause directement et des réactions extrêmement rares peuvent survenir après la vaccination contre la grippe. Le syndrome de Guillain-Barré, appelé SGB, constitue une de ces réactions. Ce syndrome cause une paralysie progressive. Cette paralysie finit par disparaître, mais elle peut parfois laisser des séquelles. Le risque de présenter le SGB après avoir été vacciné, s’il existe, est extrêmement faible. En effet, on a moins de chance de développer un SGB après la vaccination contre la grippe, qu’après avoir contracté une infection comme la grippe», confie le Dr Genadry à Magazine. Il y a une trentaine d’années, on avait fabriqué un vaccin basé sur un virus du cochon. D’après le Dr Jacques Mokhbat, de rares cas de ce syndrome, que le médecin décrit comme une sorte de maladie des racines des nerfs entraînant une paralysie et autres troubles neurologiques, sont liés annuellement au vaccin de la grippe et à d’autres vaccins-. «Une réputation est difficile à refaire. Le vaccin de la grippe n’est certes pas responsable de plus de cas de ce syndrome que tout autre vaccin», certifie le Dr Mokhbat.
 

Protection de 60 à 70%
A la question de savoir en quoi consiste ce vaccin et dans quelle mesure il permet de lutter contre la grippe, le Dr Mokhbat donne les explications suivantes: le vaccin de la grippe est actuellement constitué de trois virus inactivés. Un virus A H1N1 2009, un virus A H3N2 Suisse 2013 et un virus B Phuket 2013. Il s’agit, effectivement, de virus qui ont été isolés lors des épidémies des trois années précédentes. «On prend en général les derniers virus isolés pendant l’épidémie de l’année précédente, on les inactive et on les incorpore dans le nouveau vaccin. Ces virus, tués et inactivés, vont induire une réaction immunitaire suffisante pour protéger contre une maladie éventuelle et grave. La protection ainsi conférée est de l’ordre de 60 à 70%», indique-t-il. De son côté, le Dr Genadry signale que la grippe saisonnière est provoquée par un virus de la famille des Orthomixovirus. «C’est une infection respiratoire aiguë très contagieuse. Souvent considérée comme une maladie bénigne, elle est pourtant responsable de plusieurs décès, en particulier chez les personnes âgées, celles atteintes de maladies chroniques (respiratoires, cardiovasculaires, rénales, diabète…) et les bébés prématurés», nous apprend le médecin, mettant ainsi l’accent sur les recommandations publiées chaque année par l’OMS (Organisation mondiale de la santé) concernant la composition des vaccins. Ces recommandations pour la saison grippale suivante (hiver) sont fondées sur les observations des souches qui circulent pendant la saison en cours. «C’est donc dans ce sens que l’OMS assure un suivi régulier des épidémies mondiales de grippe, tout au long de l’année, et choisit ensuite les souches les plus à risque d’émerger et de causer une épidémie. Ce type de virus est souvent sujet à des mutations, lui permettant d’échapper au système immunitaire de l’hôte, d’où la nécessité d’un ‘nouveau’ vaccin tous les ans», ajoute le Dr Genadry.
«Le vaccin contre la grippe est sécuritaire. Il ne peut pas transmettre la grippe ni aucune autre maladie», assure le Dr Genadry avec certitude. En effet, les virus qu’il contient sont tués ou trop affaiblis pour se reproduire ou causer la grippe. Il faut en moyenne deux semaines pour que le vaccin soit pleinement efficace et la protection peut varier d’une personne à l’autre, mais elle dure au moins six mois. Cependant, «le vaccin protège uniquement contre les souches de virus de la grippe. Il ne protège pas contre les autres infections respiratoires comme le rhume. La grippe est souvent confondue avec le rhume, car leurs symptômes se ressemblent. Le rhume est toutefois plus fréquent et plus banal que la grippe», avertit-il. Quant aux facteurs d’efficacité, ceux-ci dépendent de l’âge de la personne vaccinée, de son état immunitaire et du degré de parenté entre les souches de virus qui circulent et celles que contient le vaccin. «La protection offerte par le vaccin de la grippe n’est donc pas de 100%. Il prévient la grippe dans presque 70% des cas et l’efficacité d’un vaccin contre la grippe saisonnière est variable d’une année à l’autre, tout simplement parce que les virus saisonniers bougent. Il arrive fréquemment qu’entre le moment où l’OMS choisit les souches qui vont être mises dans le vaccin (vers février ou mars) et le moment où les vaccins sont utilisés (septembre, octobre) les virus aient légèrement muté», prévient le médecin. Quand donc faire le vaccin? Le Dr Genadry répond que la meilleure période pour le faire se situe en automne, de fin septembre à la mi-novembre, et que la vaccination annuelle contre la grippe reste le moyen le plus efficace pour se prémunir contre cette maladie puisqu’elle protège non seulement l’individu vacciné, mais également son entourage privé et professionnel. Se prononçant sur les conditions de report de la vaccination, le Dr Genadry avance l’idée selon laquelle il existe très peu de raisons pour reporter la vaccination, surtout la «fièvre», et que les personnes qui sont enrhumées peuvent se faire vacciner sans aucun problème. En ce qui concerne les effets secondaires, toute personne qui compte se faire vacciner doit savoir qu’elle est susceptible de ressentir une douleur à l’endroit de l’injection et que des symptômes d’allure grippale (fièvre, nausées, douleurs musculaires, etc.) peuvent apparaître et durer jusqu’à deux jours.

 

Natasha Metni

Baisse de la mortalité
Magazine a posé la même question aux deux médecins, celle de savoir si ces derniers recommanderaient ce vaccin et pour qui. «Certainement, répond le Dr Jacques Mokhbat. Ce vaccin diminue la morbidité et la mortalité associées à la grippe. Il est certes utile dans bon nombre de conditions (personnes âgées, immunocompromises, ayant des problèmes cardiaques ou pulmonaires ou diabète, femmes enceintes, nourrissons, personnes vivant dans des communautés fermées). Toutefois, je suis d’avis de vacciner tout le monde (si aucune contre-indication ne se présente comme l’allergie aux œufs, par exemple) vu que la protection de la personne vulnérable consiste également à créer autour d’elle une barrière de protection immunitaire en évitant que les personnes en contact avec elle attrapent et, donc, transmettent la grippe».
Le Dr Nouhad Genadry recommande, lui aussi, ce vaccin, insistant sur le fait que «les personnes les plus visées par les campagnes de vaccinations saisonnières contre la grippe sont les personnes âgées de plus de 65 ans, les enfants entre 6 et 23 mois, parce que leur système immunitaire est encore immature, les personnes atteintes de maladies chroniques (asthme, emphysème, diabète, etc.) et les femmes enceintes».

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