Magazine Le Mensuel

Nº 3044 du vendredi 11 mars 2016

Confidences Liban

Confidences Liban

Saadiyate au cœur du débat
Débat au sein du Hezbollah sur la nécessité de maintenir ses services à Saadiyate, ou alors de s’en retirer dans le but de réduire la tension, surtout que les salafistes du village s’abritent derrière les slogans du Moustaqbal. Ceux qui sont en faveur du maintien de la présence du Hezbollah estiment qu’il ne faut pas laisser la place libre aux salafistes, sachant que l’emplacement du village qui donne sur la route côtière du Sud, «la route de la Résistance» (celle qui relie Beyrouth à Saïda), selon le vocabulaire du parti chiite, est stratégique. D’où l’importance de la surveillance des mouvements des salafistes syriens, libanais et palestiniens, dans cette région.

 

Dialogue bilatéral consolidé
Tous les membres du Moustaqbal participant au dialogue bilatéral de Aïn el-Tiné seront présents à la séance fixée au 16 mars courant, a affirmé le député Samir Jisr. Au menu des débats: l’apaisement du bouillonnement sunnite-chiite, le contrôle des débordements dans la rue et la recherche d’un règlement à la crise présidentielle.
La dernière rencontre entre Nabih Berry et Saad Hariri a réussi à consolider les règles de gestion du conflit entre les deux partis appliquées dès le lancement de ce dialogue.

Ruée de délégations étrangères
Cinq délégations étrangères (en majorité européennes) se sont succédé à Beyrouth au cours des dix derniers jours. Ce qui les relie? Deux dénominateurs communs:
– Procéder à l’examen détaillé des listes dressées par certaines capitales occidentales comportant les noms de leurs jihadistes en Syrie et la possibilité de procéder à l’arrestation de ceux parmi eux qui prennent la fuite via le Liban.
– Exprimer leur disposition à apporter de l’aide au pays du Cèdre en exerçant des pressions sur leurs gouvernements, afin d’augmenter les aides qui lui sont octroyées pour faire face au poids de l’exode des Syriens et pour encourager ces derniers à ne pas quitter le Liban pour l’Europe, en attendant le règlement de la crise dans leur pays.

Certificat de bonne conduite à Machnouk
La position adoptée par le ministre de l’Intérieur, Nouhad Machnouk, au sommet des ministres arabes de l’Intérieur en Tunisie, et son refus d’accoler le qualificatif de «terroriste» au Hezbollah ont été fort appréciés par le commandement du parti chiite.
En prenant cette option, Machnouk parlait au nom de l’Etat dans son ensemble, comme l’avait fait le ministre des Affaires étrangères, Gebran Bassil, au Caire et à Jeddah. Le Hezbollah est bien conscient que l’attitude du ministre de l’Intérieur avait obtenu l’aval de l’ex-président Saad Hariri «qui n’avait pas d’autre choix», assure une source proche du parti de sayyed Hassan Nasrallah.
 

Daech, ennemi numéro 1 de Washington
Un haut responsable au Pentagone a exprimé toute l’estime que Washington porte à l’Armée libanaise qui a toujours préservé les armes qui lui parviennent, les utilisant avec précision et en ne les transférant à personne. Malgré le peu de moyens dont elle dispose, c’est l’une des plus importantes armées qui combattent le terrorisme.
La publication d’un message significatif de l’intérêt que porte Washington au Liban interpelle: «Daech est notre ennemi numéro un, nous l’annihilerons, nous ne permettrons pas à cette organisation de s’étendre». Le message poursuit: «Les Libanais doivent être vigilants, il faut que le Liban-Sud reste calme… Nous communiquons régulièrement avec Israël, essayant de le dompter de peur qu’il n’exploite la moindre éventuelle petite erreur pour lancer une agression contre le Liban».
Le responsable américain révèle avoir visité Tel-Aviv récemment en insistant, lors de ses pourparlers avec les dirigeants israéliens, sur la menace terroriste représentée essentiellement par Daech.

Vigilance intensifiée
Les dispositions sécuritaires, appliquées dans le périmètre de la banlieue sud, sont maintenues au même niveau, surtout que, selon les services de sécurité, «tout est possible», sachant que les groupes terroristes planifient une grande action de déstabilisation, révèle une haute instance sécuritaire. Celle-ci ajoute que les autorités officielles doivent être vigilantes, surtout que le territoire libanais est la seule porte ouverte sur la Syrie et que la seule et unique direction que peuvent emprunter les combattants étrangers désireux de fuir le champ de bataille est le Liban!

Le fossé se creuse
Alors que le général Michel Aoun observe le silence et se contente des communiqués du Bloc du Changement et de la Réforme, les propos du candidat Sleiman Frangié au sujet du CPL et des FL – qui, à son avis, ne sont pas représentatifs de la majorité des chrétiens – ont indisposé le courant aouniste. Le droit de réponse est revenu au député Hikmat Dib: «Le soleil s’est levé et les gens ont une bonne vision, peu importe ce que dit Frangié, la majorité chrétienne est avec nous. Les chiffres sont clairs. Le sabotage de la majorité chrétienne ne sert pas l’équilibre au sein de l’Etat».
Sur les réseaux sociaux, le ton monte entre les adeptes du CPL et ceux des Marada, font remarquer les observateurs. Dans l’entourage de Rabié, certains confient que Frangié a plongé dans la marmite saoudienne, surtout qu’il se comporte exactement comme Saad Hariri, en ignorant l’accord de Maarab!

Le nouveau Yalta
La prochaine étape que Russes et Américains vont franchir sera la préparation conjointe d’un nouveau Yalta. Il s’agit d’un remodelage de la région de façon à ce que les Russes conservent leur base à Tartous sur la mer Méditerranée et obtiennent probablement un droit sur quelques aéroports, à l’instar des Américains au Qatar et à Bahreïn et dans d’autres pays.
C’est l’analyse du président Amine Gemayel qui ajoute: la neutralisation de la Syrie dans le cadre d’une confédération – c’est-à-dire qu’elle restera unie, mais sous un régime de fédérations communautaires et géographiques – servira de contrepartie aux privilèges dont bénéficiera Moscou.
Le gouvernement russe, fort gêné par les sanctions dont son pays fait l’objet, serait favorable à cette option qui lui garantit ses droits stratégiques en Syrie. Si Russes et Américains arrivent à s’entendre, cela ouvrira la voie à une trêve de longue haleine qui facilitera un débat politique élargi. C’est alors que les négociations politiques au Liban pourront débuter.

 

Kamikazes tripolitains
Le phénomène des combattants tripolitains suicidaires en Syrie, en Irak et au Liban est en régression, selon un rapport statistique. Le dernier d’entre eux, Hicham el-Hajj, 20 ans, originaire des vieux souks qui s’était enrôlé dans les rangs de l’EI, s’était fait exploser dans un attentat à la voiture piégée contre un rassemblement des Assa’eb Ahl el-Hak dans le nouveau Bagdad. Le rapport cite aussi Moustafa Abdel-Hay, alias Abou Hafs le Libanais, qui s’est suicidé dans un café de la région d’al-Wachach en Irak. Il avait combattu avec la brigade d’Ahrar el-Cham en Syrie, avant de rejoindre l’EI en Syrie puis de se déplacer en Irak. Autre nom: Khaled el-Hajj, connu sous le pseudo d’Abou Jaher, qui a exécuté un attentat avec un terroriste libyen dans la ville irakienne de Kazimiya. Le premier kamikaze tripolitain, selon le même rapport, est Mo’tassem el-Hassan, détenteur de la nationalité suédoise, tué au Krak des Chevaliers. Le second est Ahmad Diab ou Abi Bakr Riyadi qui a trouvé la mort avec le Front al-Nosra près d’Alep, il habitait dans la rue el-Sakafa à Tripoli. Sans oublier Abou Hamza et Zo’bi dans le rif de Hama.

Flycam autour de Aïn el-Heloué
Des combattants takfiristes ont réussi à lancer un drone de type Flycam dans les environs du camp de Aïn el-Heloué, révèle un expert sécuritaire. Il s’agit d’un développement tactique, en termes d’armement, que les autorités devraient prendre en compte. Les éléments radicalistes ont apporté des modifications à la durée de vol du drone piloté à partir du camp. L’expert n’hésite pas à critiquer les pays amis qui s’abstiennent d’équiper l’armée et les forces sécuritaires en moyens techniques pour faire face aux nouveaux défis militaires. Les Occidentaux, ajoute-t-il, et particulièrement les Etats-Unis, font l’éloge du rôle de l’Armée libanaise dans la lutte antiterroriste sans lui donner la chance de bénéficier de l’équipement nécessaire pour renforcer son action, soit parce que la priorité est donnée à la sécurité d’Israël, soit pour des raisons politiques, comme ce fut le cas, récemment, avec le contrat d’armement saoudo-français. Les Renseignements de l’armée avaient sévèrement mis en garde les responsables palestiniens lors d’une réunion d’urgence convoquée après la chute d’une caméra drone près d’un barrage de l’Armée libanaise autour du camp de Aïn el-Heloué.

Le Hezbollah contre Chypre
Le député Nawaf Moussaoui préconise de mener une action diplomatique à l’égard de Chypre afin de neutraliser les effets de l’accord énergétique que l’île a conclu avec Israël. Le contrat prévoit l’installation d’un gazoduc reliant les champs maritimes de production gazière, dans les territoires occupés, aux marchés européens. Le député a ainsi invité les responsables à ouvrir le débat sur les moyens à mettre en œuvre pour atténuer les effets de cet accord nuisible au Liban, en cas d’échec des négociations avec les Chypriotes. L’accord, qui inclut également la Grèce, doit aboutir à la création d’un gazoduc sur la ligne Israël-Chypre-Grèce-Europe à l’intérieur de la zone économique exclusive qui continue à faire l’objet d’un litige entre Beyrouth et Tel-Aviv. Moussaoui ne fait aucune proposition concrète pour faire échec à cette convention. Cependant, une source politique indique que l’Etat hébreu a récemment mené des vols de reconnaissance intensifs au-dessus de la zone économique exclusive libanaise dans une tentative évidente d’exercer sa souveraineté aérienne sur cette région. Cette agression devrait pousser les autorités politiques à dépasser leurs divergences pour accélérer les décrets précisant les modalités d’application de la loi sur les hydrocarbures et à coordonner leurs efforts avec la Syrie, l’Egypte et la Russie.

Bataille sur le leadership du Nord
Premier incident sécuritaire depuis le mois d’octobre 2014 entre le quartier de Baal Mohsen et le quartier adjacent du projet Hariri. La source locale qui rapporte l’info, soupçonne l’existence de manœuvres douteuses, à caractère politique, effectuées par ceux qui veulent saboter le rapprochement intersunnite initié par le président Saad Hariri. L’incident a, certes, été circonscrit, mais il n’est pas impossible qu’il se reproduise ultérieurement. Le ministre Achraf Rifi et le député Khaled Daher souhaitant tester les forces de Tripoli-Akkar face au siège de Beyrouth. D’ailleurs, il est facile pour celui qui surfe sur les réseaux sociaux de découvrir l’échange d’insultes entre les adeptes de chacune des deux parties. Quant au dialogue rompu dans le monde réel, il a transformé les rues de Tripoli en champ de bataille de calicots. La démission du général Rifi, selon l’analyse de la source, a pour but de faire mainmise sur le public de Hariri pour tirer le tapis sous les pieds du Moustaqbal dans la capitale du Liban-Nord, lui laissant ainsi le champ libre, adversaire le plus puissant du courant bleu, à l’étape prochaine. Le député Daher avait participé à sa manière à l’escalade «rifienne» avec une série de déclarations incendiaires à caractère communautaire contre les positions affichées par le ministre Nouhad Machnouk au sommet des ministres de l’Intérieur arabes à Tunis.
 

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