Ni vainqueur, ni vaincu. C’est ainsi que s’est achevé le dernier round de violence à l’intérieur du camp de Aïn el-Heloué, qui abrite quelque 100 000 réfugiés, sans compter les Palestiniens déplacés de Syrie. Mais l’assassinat, mardi à Saïda, dans un attentat à la voiture piégée, du responsable du Fateh à Miyé-Miyé, Fathi Zeidan, dit Zorro, prouve que la cendre couve sous le feu.
Certaines sources palestiniennes considèrent qu’il s’agit d’une trêve provisoire puisque l’objectif final du conflit porte sur la prise de contrôle du camp par les salafistes radicaux, d’un côté (surtout que l’expansion de l’idéologie daechiste à Aïn el-Heloué n’est plus un secret), et par le Fateh, de l’autre. Sur le terrain, aucun changement n’a été enregistré, aucune des deux fractions antagonistes n’a réussi à tourner la situation en sa faveur ni dans un quartier, ni même dans une ruelle, alors que la force sécuritaire palestinienne, composée d’environ 350 éléments chargés de l’instauration du calme, est restée impuissante. Les forces salafistes extrémistes, dont le Rassemblement des jeunes musulmans, se renforcent, imposant de plus en plus leur présence, poursuivent ces sources. Quant au mouvement Fateh, son crédit historique et militaire s’amenuise après chaque bataille infructueuse qu’il mène.
A la suite des derniers incidents à Aïn el-Heloué, une délégation de représentants des forces et groupes palestiniens a rencontré le directeur de la Sûreté générale, le général Abbas Ibrahim, pour passer en revue la conjoncture dans le camp et exprimer sa crainte d’une conspiration visant à entraîner Aïn el-Heloué dans de graves affrontements internes dont on ignore quelle pourrait être l’issue. Pourtant, certains membres de la délégation ont estimé que les incidents ont été amplifiés et que les facteurs qui ont déclenché la violence ont toujours existé dans cet environnement sans mettre en péril la stabilité dans le camp.
Une haute source palestinienne perçoit les multiples perturbations sécuritaires comme autant de signaux d’alarme avant la grande déflagration voulue par les organisations terroristes qui aspirent à la création d’un climat favorable au mûrissement de la bataille décisive. Pour parvenir à leur but, ces organisations sont contraintes d’affaiblir le Fateh qui demeure le plus fort au triple plan politique, populaire et militaire à l’intérieur du camp.
Quant à la puissance militaire dont ces groupes terroristes ont fait preuve lors de cette dernière bataille à Aïn el-Heloué, elle est assimilée par les sources palestiniennes à des manœuvres à tirs réels, sans oublier que ces mêmes groupes disposent d’experts professionnels en explosifs.
Toutes ces données prouvent que les salafistes bénéficient d’un soutien logistique et d’une formation pour les préparer à exécuter tout scénario qui leur sera confié à l’intérieur ou à l’extérieur du camp. Leur but premier étant de saper le rôle de la force palestinienne mixte qui constitue le cadre sécuritaire pour l’ensemble des groupes palestiniens.
Ce que certains craignent, c’est le traitement de la conjoncture sécuritaire dans le camp par l’injection de sédatifs, sans que cela ait une quelconque influence sur les bandes terroristes qui détiennent le pouvoir de décision relatif au timing de la déflagration.
Chaouki Achkouti
Retrait de Daech?
Les derniers affrontements qui se sont déroulés dans Wadi Mira, le passage de Zamrani jusqu’au jurd d’al-Jarajir à la frontière libano-syrienne et dans l’ouest du Qalamoun en Syrie constituent l’indice le plus flagrant de l’obstruction de l’horizon militaire pour Daech et al-Nosra, ainsi que de l’amenuisement de l’importance stratégique de cette zone, après la chute de Palmyre et du village de Qaryatayn. Le Front al-Nosra estime que l’objectif de la bataille provoquée par Daech n’est pas simplement de se trouver une ligne d’approvisionnement. Les informations indiquent que le commandement de l’EI au Qalamoun œuvre pour une extension géographique à dimension stratégique qui pourrait améliorer ses capacités de négociation lorsqu’il devra quitter la région. Avec le début du printemps, Daech appréhende que le Hezbollah et l’armée syrienne ne veuillent poursuivre l’opération de prise de contrôle des régions restantes dans le jurd, après l’effondrement du rêve que l’organisation terroriste caressait de rattacher ses bases à la ville syrienne de Kara et son jurd. Mais ce plan ayant avorté à la suite de la chute de Mahin, puis de Palmyre et de Qaryatayn, la présence des combattants dans les régions adjacentes à la Békaa libanaise n’a plus sa raison d’être, à l’ombre de l’impossibilité de pénétrer en territoire libanais.
Toutes ces difficultés ont poussé Daech à penser sérieusement à se retirer, certaines personnalités issues des tribus ont alors transmis des messages dans ce sens à des chefs syriens sur le terrain… Les négociations se poursuivent en vue de la sécurisation d’un passage pour le retrait des combattants de cette région avec leurs familles qui se dirigeront vers Rakka ou Sakhné.