A la veille de la reprise des réunions des Commissions parlementaires conjointes, consacrées à l’étude d’une nouvelle loi électorale, le tandem de Maarab (Forces libanaises et Courant patriotique libre) continue à opposer un refus catégorique au retour à la loi de 1960. A l’issue de sa rencontre avec le président Nabih Berry, le député Georges Adwan a déclaré qu’il n’était pas permis de revenir à cette législation. Le Bloc du Changement et de la Réforme s’y oppose également. Pour le vice-président de la Chambre, Farid Makari, «certains ont pu changer d’avis après les municipales. Mais si nous ne parvenons pas à un accord, nous reviendrons forcément à la loi de 1960».
Pour des observateurs chrétiens, Michel Aoun et Samir Geagea ont pris des positions et lancé des slogans depuis des mois et des réponses mitigées leur sont parvenues à travers les urnes. La morale réside dans le résultat proportionnel aux promesses qu’ils ont faites aux chrétiens, comme celui qu’ils ont obtenu au sujet de la récupération de la nationalité. Les deux partis ne peuvent plus accepter désormais un retour à la loi de 1960. Ils ne mèneront les législatives que sur la base d’une nouvelle loi pour éviter de payer le prix fort dans la rue chrétienne, comme ce fut le cas pour Saad Hariri qui a été sanctionné par son électorat. La prochaine étape, si les élections législatives ont lieu sur la base d’une nouvelle loi, sera décisive. Elle dessinera le profil des prochaines années sur le double plan parlementaire et présidentiel. Le succès municipal ne se répercutera pas dans les urnes législatives sinon à travers la fidélité aux promesses faites et par une nouvelle loi électorale.
Pour sa part, Bkerké craint un retour à la loi de 1960 qu’elle considère injuste et refusée par toutes les parties politiques. Le patriarcat craint aussi que la loi électorale et son application ne suivent le chemin de la présidentielle si tant est que les chrétiens soient appelés à s’entendre sur un candidat. Rien n’a changé dans le paysage politique national et présidentiel… En dépit des multiples réunions des Commissions parlementaires, l’accord sur un texte de loi n’est toujours pas en vue. Ainsi, l’échéance électorale arrivera et deux options resteront en vue, plus mauvaises l’une que l’autre: l’auto-prorogation du mandat parlementaire ou des élections sur la base de la loi de 1960.
Municipales de Tripoli
Mikati victime de son alliance avec Hariri
Les proches de l’ancien Premier ministre, Najib Mikati, ne cachent pas leur déception à la vue des résultats des municipales. Ils jugent que son alliance avec le président Saad Hariri fut une erreur. Mikati, quant à lui, pense que les résultats politiques obtenus à travers cette alliance avec Hariri à Tripoli sont prioritaires. Ils ont permis de tourner la page des anciens conflits et d’ouvrir celle d’un nouveau tandem sunnite à l’instar du récent duo chrétien et du tandem chiite plus ancien. Pour lui, ce qui s’est passé à Tripoli sert à jeter les fondements d’une nouvelle étape politique avec Hariri et d’une relation d’égal à égal.
Les pertes, pensent des analystes, sont inégales entre les deux parties dans l’accord politique soutenant la liste de Tripoli. Le président Hariri y est le premier et, peut-être, le plus grand perdant. Surtout qu’il avait pour objectif d’affronter Achraf Rifi en oubliant que sa propre popularité à Tripoli était en régression et la colère tripolitaine qu’il suscite s’est traduite dans les urnes au profit de la liste de Rifi.
Dans cette entente, Mikati a visiblement perdu de son capital populaire à Tripoli. Nombre de ses partisans y étaient opposés, se souvenant de la campagne que Hariri avait menée contre lui lorsqu’il lui avait succédé au Grand sérail. De plus, il n’a pas gagné les votes du Futur pour la liste qu’il soutenait. Les partisans de Mikati lui avaient conseillé de mener campagne seul et d’éviter de devenir otage des négociations sur le choix des candidats.
Maintenant, Mikati devrait analyser l’humeur populaire de Tripoli et chercher les points faibles dans sa machine électorale ou au plan de sa popularité ou de ses alliances.
D’aucuns pensent que la faiblesse de Mikati est due au Courant du futur et à l’accord conclu avec Hariri, qui fut pour lui un poids plutôt qu’un apport. C’est du moins ce que ressentent certains candidats à Tripoli devant l’échec inattendu. Ils ne cachent pas leur déception d’avoir appuyé cette liste, qualifiée d’hybride, lorsqu’ils ont compris que Hariri menait une bataille personnelle contre Rifi.
Très probablement, pensent les partisans de Mikati, celui-ci regrette en son for intérieur de n’avoir pas écouté ses conseillers qui lui disaient de mener seul la campagne électorale d’autant, disent-ils, que les sondages lui donnaient une victoire assurée.
Chaouki Achkouti