Il n’y a pas de garantie de résultat à la clé ou de rentabilité sécurisée à cent pour cent pour un quelconque actif, surtout dans le secteur des services, en l’occurrence celui de l’hôtellerie et de la restauration. Le terme «rentabilité espérée» est tout à fait adéquat dans ce domaine. Hier encore, le Liban était considéré comme une destination touristique vedette, du moins pour les pays de la région. Néanmoins, il s’avère que l’activité touristique n’est pas à l’abri d’un trou d’air. Aux dernières nouvelles, l’hôtel boutique Le Vendôme est passé aux mains de la Bank Audi, les propriétaires de l’établissement, la famille Salha, n’ayant pas été en mesure d’honorer leurs dettes venues à échéance. Dans un entretien avec Magazine, Marwan Salha a confirmé la nouvelle, précisant que la famille Salha reste aux commandes de l’hôtel en collaboration avec l’enseigne internationale de gestion InterContinental pour une période de deux ans.
En fait, ce transfert de propriété est le résultat d’une dation en paiement avec un droit de préemption en faveur des propriétaires. La dation en paiement est une opération juridique qui consiste à se libérer d’une dette par une prestation ou un bien différent de celui qui était initialement dû. Elle se distingue du paiement, de la compensation et de la novation. En termes plus clairs, par dation en paiement, le créancier accepte simplement autre chose que l’objet même de la dette. Encore faut-il se placer au stade de l’exécution du contrat et non au moment de sa naissance. Ainsi, selon Marwan Salha, par ce mécanisme, les trois quarts de la dette de l’hôtel Phoenicia ont été supprimés, d’autant que l’activité de cet établissement hôtelier n’enregistrait pas de pertes opérationnelles et que les bénéfices engrangés étaient alloués au paiement des intérêts de la dette et non de son principal.
Par ailleurs, l’enseigne de restauration renommée haut de gamme de poissons et de fruits de mer, Chez Sami, aurait contracté des dettes d’un montant avoisinant deux millions de dollars. Le remboursement de ses dettes viendrait à échéance à court terme sous peine de voir la propriété des lieux changer de mains en faveur d’une banque dont le nom n’a pas été divulgué. Les rumeurs circulant en ville ne lient aucunement les dettes dudit restaurant à son chiffre d’affaires, mais à des raisons tout à fait personnelles en relation directe avec le statut des propriétaires.
Taux d’occupation
Le taux d’occupation des hôtels en rythme annuel a enregistré une progression de 66% en mai 2016 contre 64% au même mois un an auparavant. La stabilité relative de la situation sécuritaire en 2015 a donné un certain élan à l’activité touristique, ses effets s’étant étendus aux premiers mois de 2016. Néanmoins, la sécurité a été battue en brèche lors de l’attentat contre la Blom Bank, et les observateurs se perdent en supputation concernant les taux de remplissage des hôtels au cours de la fête du Fitr. De janvier à mai 2015, le taux d’occupation était de 57%, il devait enregistrer un léger recul à 56% sur la même période en 2016. Cette baisse s’est accompagnée d’une régression de 17,5% de la moyenne du tarif par chambre, celui-ci étant passé de 166 dollars en mai 2015 à 137 dollars en mai 2016, la pire performance dans la région selon le rapport du consultant Ernst & Young. Quant au rendement/chambre, il a reculé de 18,4% sur un an pour se fixer autour de 78 dollars à fin mai 2016.
Par ailleurs, sur un plan régional, le taux de remplissage le plus élevé a été enregistré par les villes des Emirats arabes unis qui est passé de 74% à 87%. Le marché hospitalier des Emirats a maintenu son classement à la tête du peloton de janvier à mai 2016 sur la même période un an auparavant. Parallèlement, Le Caire a enregistré la plus importante croissance en termes de taux d’occupation avec 13 points, suivi par Ras el-Kheimé avec 8,6 points. Comme conséquence de la demande croissante sur les chambres d’hôtels au Caire, la moyenne de tarif/chambre a fait un bond de 21,9%, passant de 103 dollars en mai 2015 à 126 dollars en mai 2016. Cette croissance significative en termes de prix/chambre serait liée aux efforts du gouvernement égyptien visant à améliorer l’environnement touristique dans le pays. Sur la période considérée, le Koweït a enregistré la pire performance dans la région, le recul du taux de remplissage ayant été de 44%.
Prêts au secteur touristique
La redynamisation du secteur touristique s’est reflétée par une augmentation du nombre des prêts consentis aux agents du secteur. Les chiffres ont montré que les avances octroyées aux restaurants, cafés-trottoirs, night-clubs et pubs ont augmenté de 20% en 2014 pour atteindre 271,06 millions de dollars. Ce pourcentage de croissance devrait être relativisé puisque cette reprise est mesurée à partir d’un seuil faible enregistré en 2013 lorsque le nombre de cette catégorie de prêts avait régressé de 14% sur un an, totalisant 180,88 millions de dollars. Ces prêts sont sous-tendus par une demande provenant d’une clientèle locale et touristique. Selon les statistiques du consultant Hodema, malgré le ralentissement économique, le nombre de restaurants est en train de progresser, enregistrant une croissance de 3,47%, passant de 836 en 2014 à 865 en 2015. Par ailleurs, la valeur des crédits consentis au parc hôtelier est plus directement liée à l’état des lieux du secteur touristique. Les données de la Banque du Liban (BDL) ont montré que les avances destinées aux hôtels ont enregistré un recul à deux chiffres en rythme annuel de 16,15% pour atteindre 875,71 millions de dollars en 2015.
Financement par les banques
Il faut savoir qu’un même projet peut être financé par une banque, alors qu’il a été refusé par une autre. Pourquoi? Parce que chaque banque va mesurer, selon ses propres critères, trois niveaux de risque:
♦ Le risque général: c’est le risque lié à l’état général de l’économie qui fait que les banquiers ont une propension plus forte à accorder des prêts en période de croissance économique.
♦ Le risque sectoriel: tous les secteurs d’activité ne sont pas perçus comme également risqués par le banquier. Le niveau de risque associé à un secteur dépend de la situation économique de celui-ci et du taux de contentieux que la banque y a connu. Chaque banque dispose de ses propres statistiques qui peuvent être plus ou moins favorables. Par ailleurs, les banques cherchent à équilibrer leurs engagements dans les différents secteurs d’activité.
♦ Le risque du projet: c’est le risque propre à votre projet… Il dépend tout d’abord du demandeur, de son expérience et de son aptitude à le défendre.
Liliane Mokbel