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Nº 3062 du vendredi 15 juillet 2016

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Présidentielle. Ballet politique autour de la chaise vide

Michel Aoun chez le mufti Abdel-Latif Derian puis chez Nabih Berry, Samir Geagea chez Saad Hariri puis chez Walid Joumblatt, Saad Hariri en Arabie saoudite et le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Marc Ayrault, au Liban. Tout ce ballet de rencontres politiques et diplomatiques donne le tournis… et laisse croire qu’un déblocage est en vue dans le dossier présidentiel.

De plus, des rumeurs circulent sur une éventuelle élection présidentielle dans la foulée du «conclave» de trois jours du dialogue national prévu les 2, 3 et 4 août. Trop beau pour être vrai…?
La question se pose, car les Libanais échaudés par plus de deux ans de vacance présidentielle ne croient plus beaucoup à la capacité des parties internes de s’entendre sur un dossier politique ou même économique, sans une aide étrangère. Or, celle-ci se limite pour l’instant à la France, qui reste le seul pays occidental à soulever la question présidentielle libanaise dans les réunions internationales ou bilatérales. Mais en même temps, les responsables français ne cessent de répéter qu’il revient aux Libanais de s’entendre, car la communauté internationale a bien d’autres dossiers plus compliqués et plus urgents à traiter. Mais cela n’empêche pas la France d’aborder le dossier présidentiel libanais avec des interlocuteurs étrangers, comme les ministres des Affaires étrangères saoudien et iranien. Ce qui pourrait être un indice significatif sur la dimension régionale de la vacance présidentielle libanaise… On pourrait donc croire que les entretiens entre les responsables français et leurs interlocuteurs saoudiens et iraniens n’ayant rien donné, les Français ont décidé de conseiller aux Libanais de s’entendre entre eux. Sont-ils en mesure de le faire, alors que la rivalité entre l’Iran et l’Arabie saoudite est à son paroxysme? C’est là que réside le fond du problème. Les parties libanaises font, en tout cas, semblant de croire qu’une entente est possible, en se basant sur le fait que la situation politique et économique est devenue intenable et qu’il faut, à tout prix, stopper l’effondrement total des institutions de l’Etat.
L’idée directrice est la suivante: puisque l’Arabie saoudite a déclaré officiellement ne pas avoir de veto contre aucun candidat à la présidentielle libanaise, la route vers le palais de Baabda deviendrait donc praticable pour le général Michel Aoun. Selon des sources informées, «le général» aurait même exprimé, au dîner auquel il a été convié par l’ambassadeur de Riyad à Beyrouth, le souhait de se rendre en Arabie. Plus même, il a contacté les dirigeants saoudiens pour exprimer sa violente condamnation des attentats qui ont frappé trois régions saoudiennes en quelques heures, Qatif, Jeddah et Médine. Ce climat positif a poussé le chef des Forces libanaises, Samir Geagea, à tenter de convaincre le chef du Courant du futur, Saad Hariri, de renoncer à la candidature de Sleiman Frangié au profit de celle de Aoun. Dans sa plaidoirie en faveur de la candidature de Aoun, Geagea affirme que les Saoudiens sont désormais persuadés que le général ne veut pas toucher à l’accord de Taëf. Par conséquent, son élection peut favoriser le retour de Saad Hariri à la présidence du Conseil, sans susciter la colère des Saoudiens. En quelque sorte, l’élection de Michel Aoun serait l’alternative la plus acceptable au «package deal» proposé par le secrétaire général du Hezbollah, sayyed Hassan Nasrallah. Cette logique a trouvé des échos positifs chez le leader druze Walid Joumblatt qui a récemment déclaré qu’il fallait, à tout prix, élire un président au Liban, même s’il s’agit du général Aoun. Elle a été aussi favorablement accueillie par le président de la Chambre, Nabih Berry, qui a apprécié, non seulement la soudaine malléabilité du ministre des Affaires étrangères, Gebran Bassil, sur le dossier du pétrole, mais aussi la visite de courtoisie que lui a rendue le général Aoun. Mais pour autant, les écueils ne sont pas tous surmontés. Pour le chef des FL, le Hezbollah tergiverse et ne veut pas en réalité de Aoun à la présidence. Il préfère maintenir la vacance pour que le dossier de sa présence en Syrie ne soit pas évoqué une fois un nouveau président élu et un nouveau gouvernement formé. Pour le Hezbollah, le problème reste chez Saad Hariri qui ne peut pas prendre une telle décision sans l’aval clair des autorités saoudiennes. Une idée a toutefois été avancée, selon laquelle, pour contourner cet obstacle, Saad Hariri se rendrait à la séance d’élection présidentielle, sans toutefois voter en faveur du général Aoun. Mais auparavant, il aurait retiré son appui à la candidature de Frangié…
En attendant des développements concrets qui ne se limiteraient pas à des rencontres, toutes les spéculations sont permises sur le sort du fauteuil vide au palais de Baabda!

Joëlle Seif

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