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Nº 3063 du vendredi 22 juillet 2016

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Des réseaux terroristes souterrains. 250 jihadistes de retour en France

Les violentes images du massacre perpétré le soir du 14 juillet à Nice resteront ancrées dans la mémoire des Français. Derrière cette attaque terroriste revendiquée par l’Etat islamique (EI) se profile un individu tunisien violent souffrant de troubles psychologiques. Ce dernier attentat est révélateur de l’internalisation accrue de la stratégie de l’EI.

Avant de s’attaquer aux foules, cette funeste nuit du 14 juillet, Mohamed Lahouaiej-Bouhlel, un Tunisien de 31 ans, travaillait comme chauffeur de poids lourd à Nice. Il est décrit par son entourage comme un individu peu pratiquant et instable. Mais samedi 16 juillet, l’organisation terroriste le glorifie comme «l’un des soldats de l’Etat islamique».
Alors que l’étau se resserre autour de lui, en Irak et en Syrie, l’EI semble multiplier ses faits de guerre, corrélés, semble-t-il, à la volonté de l’organisation terroriste d’adapter ses ressources humaines et ses objectifs à un contexte de plus en plus défavorable.
En termes de moyens, l’EI s’appuie à la fois sur des cellules hautement qualifiées, mais aussi sur des loups solitaires lors de l’exécution de ses attentats.
En mars dernier, des attaques coordonnées à Bruxelles, revendiquées par l’EI, ont fait 31 morts et plus de 200 blessés. Les attentats de Bruxelles ont eu lieu quatre mois après ceux de Paris, le 13 novembre 2015, et ayant entraîné la mort de 130 personnes. Les services de renseignements belges et français avaient fait le lien entre les réseaux responsables des attentats dont les membres auraient partagé un même passé criminel ou auraient combattu en Syrie.
Près de 2 000 personnes feraient partie des réseaux jihadistes en France dont 900 auraient combattu en Syrie. On estime que 250 combattants seraient de retour en France, après avoir été endoctrinés, acquis les compétences militaires nécessaires, et avoir développé des amitiés utiles au sein des réseaux terroristes souterrains.
 

Les loups solitaires
La France est également exposée au danger des loups solitaires, comme l’a démontré l’attaque de Nice. Bien qu’à ce jour aucun lien entre Lahouaiej-Bouhlel et l’EI n’ait pu être établi, l’organisation a revendiqué l’attaque, qualifiant son auteur de «soldat de l’EI» ayant répondu «à l’appel à viser les citoyens des Etats de la coalition». Pour l’expert Romain Caillet, «le phénomène correspond néanmoins à l’appel d’attaques de loups solitaires du porte-parole de l’EI, Abou Mohammad el-Adnani, datant de 2014». De nombreuses questions s’imposent, car le message de l’EI ne fait aucune référence à un ordre précis ou à une quelconque allégeance. S’agit-il donc d’une revendication d’opportunité? L’attentat de Nice pourrait être ainsi révélateur d’un changement de stratégie de l’EI, actuellement sous pression et à la recherche de victoires faciles sur la scène internationale.
Mis à part les moyens, l’EI semble également vouloir diversifier ses cibles. Dans ce contexte, les pays disposant des plus grands contingents de combattants seraient les plus vulnérables aux opérations terroristes dites complexes, telles la Tunisie, (avec 6 500 combattants), l’Europe (environ 6 000 combattants), la Russie (environ 3 000 combattants) et l’Arabie saoudite (environ 3 000 combattants).
D’autres pays exposés à des risques similaires seraient la Jordanie, la Turquie et le Liban, en raison de leur proximité des théâtres opérationnels de Syrie et d’Irak et du fait qu’ils abritent un grand nombre de réfugiés souvent marginalisés. En juin, l’EI a revendiqué un attentat suicide à un barrage militaire en Jordanie. Un jour plus tard, huit kamikazes ciblaient le village libanais de Qaa. De manière presque concomitante, trois terroristes prenaient d’assaut l’aéroport Atatürk à Istanbul.
De toute évidence, l’Irak restera la cible privilégiée de l’organisation terroriste. Depuis le début de l’année 2016, ce pays fait face à des attentats quasi quotidiens, visant à alimenter les tensions sectaires.

 

Mona Alami
 

Un cycle infernal
La campagne sanglante de l’EI va certainement se poursuivre à l’ombre de ses multiples défaites en Irak et en Syrie. L’organisation terroriste a besoin de perpétuer un cycle infernal, afin d’assurer sa pérennité à l’échelle mondiale. Les pays où les musulmans sont mieux intégrés, à l’instar des Etats-Unis, sont plus vulnérables aux attaques des loups solitaires. Seuls 250 ressortissants américains sont allés combattre aux côtés des organisations radicales en Irak et en Syrie.

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