Le nouveau gouvernement aura une courte durée de vie. Cela ne l’empêchera pas, cependant, d’être confronté à de nombreux défis qu’il devra relever, s’il veut freiner la dégradation de l’environnement économique et préparer le terrain à une éventuelle reprise dans les mois à venir.
1-Le vote du budget, une nécessité
C’est une urgence économique pour le Liban. Cela fait onze ans que le pays fonctionne sans loi de Finances. A très court terme, le président de la République et le gouvernement devront présenter le budget 2017. Il faudra payer les arriérés aux fournisseurs et contractuels, verser les sommes dues aux municipalités, améliorer la collecte des impôts et lancer les projets de concession (mécanique, Casino du Liban, champ de course de Beyrouth, Zone franche et parcmètres). «Les projets de concession des sociétés des eaux et de l’exploitation des réseaux électriques, à cause de leur complexité, exigent, quant à eux, un débat national et une situation politique stable», souligne l’économiste Charbel Cordahi. Les objectifs de ce budget devraient être d’aider à la reprise de la croissance et de réduire les besoins d’endettement de l’Etat. «Il faut un budget sans impôts, en se focalisant sur le problème de l’évasion fiscale», souligne, de son côté, l’économiste en chef du groupe Byblos Bank, Nassib Ghobril.
2-Assainissement des Finances publiques
Le gouvernement devra faire en sorte de réduire le déficit budgétaire qui pourrait bien atteindre des niveaux inquiétants avec 9,5% du PIB. «En Europe, ce déficit ne doit pas dépasser les 3%», précise Ghazi Wazni. Ici, à ce grave déficit s’ajoute, cette année, l’inversement d’un solde primaire excédentaire (1% du PIB) qui, pour la première fois, va devenir déficitaire (-1% du PIB), selon le budget présenté par l’ancien gouvernement. Conséquence: les agences de notation pourraient dégrader la note du gouvernement libanais et les banques exposées à la note souveraine pourraient en pâtir. En 2017, l’endettement du Liban devrait atteindre les 80 milliards de dollars, contre
53,656 milliards de dollars en 2011.
«Au niveau de la politique budgétaire, l’essentiel des réformes doit viser la baisse du service de la dette et l’équilibre des comptes de l’EDL (Electricité du Liban), ajoute l’économiste Charbel Cordahi. Seule une solution durable à ces deux problèmes permettra, à terme, d’atteindre l’équilibre budgétaire et de réduire la dette. Au plan fiscal, le mix «taxes directes-taxes indirectes» doit être remodelé pour accroître la part des taxes directes (actuellement en dessous de 25% du total des revenus de l’Etat) et réduire la part des taxes indirectes (qui touchent l’intégralité des agents, sans tenir compte de leurs revenus)».
3-L’urgence des réformes structurelles
Pour une reprise durable de la croissance, la mise en place de réformes de fond se fait plus que jamais pressante. «Les réformes structurelles de l’économie durant le mandat Aoun doivent viser surtout à accroître le potentiel productif du pays, dans le but de hausser le PIB potentiel et de créer de nouveaux emplois pour la jeunesse libanaise, insistent l’ensemble des économistes interrogés. Ces réformes doivent viser la réduction des coûts de production et l’amélioration de la productivité de l’économie (réforme de l’électricité et de l’EDL, extraction de pétrole et de gaz, construction de barrages et provisions d’eau, développement du numérique…)». Car aujourd’hui, au Liban, 70% de l’activité économique est toujours basée sur les services. Or, cela ne peut pas créer suffisamment d’emplois pour les Libanais entrant, chaque année, sur le marché du travail. 5 000 emplois sont créés chaque année pour 25 000 demandeurs d’emplois.
«Malheureusement, l’économie libanaise crée le chômage et l’émigration et cela n’est pas près de changer en 2017», conclut Ghazi Wazni.
Soraya Hamdan