Magazine Le Mensuel

Nº 3087 du vendredi 2 mars 2018

general Histoire

L’histoire du Liban vu par la Cité Sportive

L’histoire de la Cité Sportive Camille Chamoun reste étroitement liée à un demi-siècle de la vie libanaise. Surtout associé ces dernières années à des problèmes de hooliganisme, ce stade a pourtant été témoin d’événements marquants depuis sa construction, en 1957.

Située à Bir-Hassan, la cité comprenait à l’origine un stade d’une capacité de 20 000 spectateurs, une salle couverte Pierre Gemayel, une salle omnisport, un terrain d’équitation, une piscine olympique, en plus d’un vaste parking. Inaugurée en 1957 par le président Camille Chamoun, en présence du roi Saoud d’Arabie, invité d’honneur, la cité sportive accueille la deuxième édition des Jeux Panarabes. En 1959, le Liban organisait les IIIèmes Jeux Méditerranéens en présence du roi Paul et de la reine Frédérika de Grèce qui accompagnaient leurs enfants: le prince Constantin (aujourd’hui roi en exil) et la princesse Sophie (actuelle reine d’Espagne). La cité a également accueilli les championnats d’Europe de tir (1962), la 1ère Coupe arabe de Football (1963), les Jeux Internationaux de l’Amitié en Equitation (1971), les Vèmes Jeux Scolaires Arabes (1973) ainsi que plusieurs rencontres internationales de football. Parmi celles-ci, on se souvient du roi Pelé, venu jouer avec le Nejmeh contre la sélection universitaire française, qui fut battue 2-0. Le Nejmeh a également remporté le match l’opposant au club soviétique d’Ararat, alors champion de l’URSS 4-0.

DESTRUCTION
Témoin d’événements sportifs prestigieux avant la guerre civile, la Cité sportive subira aussi les conséquences du conflit. Ce stade est complètement détruit par l’aviation israélienne lors de l’invasion de 1982. En conséquence, toutes les activités sportives ont changé d’adresse. Les matches de football se sont joués par la suite sur les terrains municipaux de Beyrouth, du Safa et de Bourj Hammoud. Il faudra attendre la fin de la guerre et le début de la reconstruction pour assister à une renaissance de la Cité sportive. Le 4 septembre 1993, le Premier ministre Rafic Hariri donne ainsi le coup d’envoi de la construction d’un nouveau complexe sportif, afin d’accueillir les VIIIes Jeux panarabes du 12 au 27 juillet 1997 et la Coupe d’Asie des Nations de football en 2000. D’autres événements s’y tiendront, comme la Coupe arabe de football en 1999, la 6ème édition des Jeux de la Francophonie en 2009, ainsi que plusieurs matches internationaux de football.
La reconstruction a pu voir le jour grâce aux contributions de l’Arabie saoudite (20 millions de dollars) et du Koweït (5 millions de dollars). Les autres monarchies du Golfe ne tenant pas leurs promesses de contribuer à la reconstruction, l’Etat libanais a dû verser la somme de 75 millions de dollars pour parachever le grand stade et rénover la salle Pierre Gemayel. Elle a été parachevée avec une capacité de 3 300 spectateurs pour le basket-ball, le volley-ball et la gymnastique.
Le grand stade de la Cité sportive actuelle est la plus grande infrastructure locale avec une capacité de 48 837 places, occupant la 306e place parmi les plus grands stades du monde, en termes de capacité. Trois éléments principaux caractérisent la nouvelle cité: le grand stade olympique conforme aux normes internationales de sécurité et aux règles imposées par la Fédération Internationale de football, a plus que doublé de capacité, passant de 20 000 à 50 000 spectateurs; la structure est capable d’absorber des tremblements de terre jusqu’à 8,6 degrés sur l’échelle de Richter (en cas de séisme, le béton «bouge» mais ne rompt pas car le code parasismique a été appliqué à la lettre); enfin, trois parkings souterrains couvrant une superficie d’environ 75 000 m2 et équipés de cinq ascenseurs, peuvent recevoir jusqu’à 3 500 voitures. A noter que le plan initial sur une surface de 100 000 m2 comprenait le grand stade (aux gradins couverts), le palais omnisport (dont une partie de la structure a été récupérée), des courts de tennis, une piscine olympique, une piscine semi-olympique couverte ainsi qu’un hôtel de 120 chambres.

Hooliganisme à la libanaise
Avant la guerre, le hooliganisme était plutôt rare dans les stades alors moins équipés qu’aujourd’hui et se limitait à des querelles en dehors des terrains, notamment entre les supporters des deux clubs arméniens du Homenetmen et du Homenmen. Des disputes éclataient parfois entre les supporters du Nejmeh et du Racing, meilleures équipes de football d’alors.
Ce n’est qu’après la montée du club Ansar en première division en 1967, qu’a éclaté une concurrence intestine avec le Nejmeh sur la scène beyrouthine, prenant d’autres dimensions au fil des ans. Pendant la guerre civile, des tournois amicaux se jouaient sur le terrain du Safa sous la supervision de l’armée syrienne alors présente à Beyrouth, mais des accrochages, parfois armés avaient lieu en dehors du stade entre supporters du Nejmeh et ceux d’Ansar. En remportant une compétition dite «de la résistance» en 1985, le Nejmeh conquit un large soutien de la communauté chiite, alors qu’auparavant, tous ses supporters étaient originaires de Beyrouth et, par conséquent, sunnites. Après la fin de la guerre et la montée en puissance du Ansar, meilleure équipe de cette période, le hooliganisme s’impose et prend un autre aspect, notamment avec la réhabilitation du stade de Bourj Hammoud et la construction de nouvelles structures.
Les matches Ansar – Nejmeh deviennent à haut risque. Les hooligans des deux équipes, mais surtout ceux de Nejmeh, dominés par les «Verts», saccagent les installations sportives, s’en prenant notamment aux sièges des stades nouvellement construits, comme ceux de la Cité sportive Camille Chamoun à Beyrouth, ou du stade Rafic Hariri à Saïda. Ces agissements imposent des mesures radicales prises par la Fédération libanaise de football et les services sécuritaires, qui décident que les matches du Championnat local se joueront à huis-clos. Cela durera quatre saisons consécutives.
Malgré des mesures sécuritaires draconiennes, le hooliganisme a pris, ces vingt dernières années, une ampleur politique, intercommunautaire et sectaire, la majorité des supporters du Nejmeh appartenant à la communauté chiite alors que ceux du Ansar sont des sunnites. Les problèmes confessionnels ne sont pas les seules causes de ce phénomène violent. Les multiples fautes d’arbitrage sont également à l’origine de certains actes de vandalisme dans les stades.

Le stade en chiffres
48 837
Capacité totale
de spectateurs.
12 037
Sièges couverts.
36 800
Sièges non-couverts.
37
Sièges présidentiels.
1 252
Sièges VIP.
3 450
Sièges première classe.
350 m2
Salle de conférence: disponible.
4
Vestiaire pour joueurs.
18
Nombre de portes d’entrées.

Mohamed Fawaz

Related

Ziad Rahbani. Pour le plaisir de la musique

Amritsar. Périple au pays des sikhs

Mustang. Une fougue féminine de Turquie

Laisser un commentaire


The reCAPTCHA verification period has expired. Please reload the page.