Magazine Le Mensuel

Nº 2859 du vendredi 24 août 2012

Confidences Moyen-Orient

Confidences Moyen-Orient

Barham Salih le numéro deux du parti du président irakien Jalal el-Talabani, l’Union patriotique du Kurdistan, et l’ancien Premier ministre de la province du Kurdistan, déploient de sérieux efforts pour que les tensions entre Irbil et Bagdad soient contenues. Alors que les responsables kurdes et irakiens échangent accusations et insultes, Barham Salih a eu le bon réflexe de visiter la capitale fédérale pour s’entretenir avec le Premier ministre Nouri el-Maliki afin que les choses entrent dans l’ordre. Après cette rencontre, il s’est dirigé vers l’Allemagne pour rencontrer le président Talabani qui y subit un traitement médical, le pressant de rentrer au pays pour s’investir personnellement dans le processus de réconciliation et pour initier un dialogue national. Même si cette entreprise paraît avoir peu de chances de réussir, Barham Salih a au moins eu le mérite d’essayer.

Bouthaina Chaaban la conseillère politique du président syrien en visite en Chine, et qui avait disparu pendant de longs mois avant de ressurgir à Pékin, a refusé lors d’une conférence de presse que les journalistes utilisent le terme «opposition» pour décrire les rebelles armés dans son pays. Selon elle, ce ne sont que des «tueurs armés et financés par des partis étrangers afin de brûler et de détruire le pays». La conseillère de Bachar el-Assad n’a cependant pas donné son avis sur les exactions commises quotidiennement par les troupes du régime.

Le double jeu de la Chine
La Chine a utilisé avec son allié russe à trois reprises le veto pour s’opposer à toute résolution condamnant la Syrie au Conseil de sécurité des Nations unies, mais elle semble, malgré cela, avoir réussi à maintenir des relations très chaleureuses avec Israël. En effet, trois navires de guerre chinois viennent de visiter le port israélien de Haïfa pour «renforcer les relations amicales qui lient les deux armées». Un développement pour le moins étonnant vu que ce n’est qu’en 1992 que le géant chinois a reconnu l’Etat hébreu. Mais les temps ont bien changé et les relations économiques entre les deux pays sont depuis en constante amélioration.

Riyad Hijab traîné dans la boue
L’ancien Premier ministre jordanien, Zaid el-Rifaï, qui jouit d’un grand respect au sein du royaume hachémite et qui est considéré comme l’un des conseillers les plus influents du roi Abdallah Ibn el-Hussein a surpris les observateurs. Lors d’une réunion de la cellule de crise chargée de débattre de la situation en Syrie, el-Rifaï s’en est violemment pris au Premier ministre syrien dissident Riyad Hijab, qui «a fui son pays comme un lâche pour nous mentir, en assurant que le régime ne contrôlait plus la situation sur le terrain». Zaid el-Rifaï a affirmé que selon sa vision des choses, le président Bachar el-Assad n’était pas prêt de tomber. Quelques heures après ces critiques très dures, Riyad Hijab prenait l’avion à destination du Qatar. Est-ce une coïncidence?   

En pointillé
Le président iranien Mahmoud Ahmadinejad semble passer un mauvais quart d’heure. En effet, des sources bien informées ont révélé qu’un grand nombre d’anciens députés, ministres et généraux iraniens avaient adressé une lettre au guide suprême Ali Khamenei, le priant de former une troïka pour diriger le pays à la place du chef de l’Etat. Selon eux, Ahmadinejad a manqué à son devoir à plusieurs reprises, notamment lors du dernier tremblement de terre qui a frappé le pays. Le guide n’a cependant pas réagi et refuse pour l’instant de donner une réponse claire, bien que les sources affirment que le président serait tombé en disgrâce depuis de longs mois et que Khamenei attend avec impatience les élections présidentielles de 2013 pour s’en débarrasser. Feuilleton à suivre.

Pas de répit au Koweït
Le gouvernement koweïtien pensait bien faire quand il a décidé de dissoudre le Parlement démocratiquement élu qui lui était très hostile, restaurant l’ancienne Chambre de 2009. Mais cette décision fut un fiasco total, puisque ce Parlement ne parvient pas à se réunir. Les partis d’opposition ne comptent pas reculer et ont annoncé qu’au cas où la loi électorale proposée par le Premier ministre ne serait pas amendée, ils boycotteraient purement et simplement les prochaines élections.
L’émir Sabah el-Ahmad el-Jaber el-Sabah, qui s’est personnellement investi pour faire plier les détracteurs de son Premier ministre et cousin Jaber el-Mubarak el-Ahmad el- Sabah, n’a pas réussi à résoudre la crise politique qui devrait s’aggraver dans les semaines à venir. Il faudra qu’il fasse très attention, car désormais, les opposants islamistes réclament l’instauration d’un émirat constitutionnel dans lequel les pouvoirs absolus de l’émir seraient restreints.

Non, rien n’a changé!
L’ancien conseiller en communication du président tunisien al-Moncef el-Marzouki, Ayoub el-Massoudi, qui se préparait à se rendre en France pour rejoindre sa famille, s’est vu interdit de voyage. C’est suite à ses critiques contre les généraux de l’armée qui ne l’apprécient guère et veulent le placer derrière les barreaux que cette décision a été prise.
L’ancien conseiller devra se présenter devant la Cour militaire qui pourrait lui infliger une lourde sanction pour son «insolence». Ayoub el-Massoudi avait accusé l’armée «d’avoir trahi le pays et le président de la République». Malgré les sacrifices consentis par le peuple tunisien pour se débarrasser de l’ancien président Zine el-Abidine Ben Ali, il semble que l’armée se comporte toujours comme si la Tunisie était encore dirigée par une dictature.

Seriyati coupable ou victime?
Le général tunisien Ali el-Seriyati, ancien chef de la garde présidentielle de Zine el-Abidine Ben Ali, a été accusé par l’ancienne première dame Leila Traboulsi d’être à l’origine du complot contre son époux. Dans un livre publié, de son exil saoudien, elle l’accuse d’avoir forcé Ben Ali à quitter le pays, le 14 janvier 2011, lui faisant croire qu’il pourra rentrer le lendemain. Or quelques minutes après le départ précipité de la famille présidentielle, le général a été arrêté et placé en détention. Depuis, il a été condamné à vingt ans de réclusion par un tribunal militaire qui l’a jugé coupable d’avoir ordonné aux soldats de tirer sur la foule. Dans ces circonstances, qui croire? L’ancien homme fort, détenu dans une cellule sans droit de parole ou l’ancienne régente de Carthage, qui se trouve bien à l’abri dans son palais de Jeddah? L’histoire nous le dira.  

Amina Erdogan déçue
Amina Erdogan, la femme du Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan, a exprimé son chagrin et sa grande déception face à l’attitude de la Première dame syrienne Asma el-Assad. Cette dernière aurait refusé de lui répondre au téléphone après qu’elle lui a conseillé de quitter son mari et de fuir la Syrie avec ses enfants. Selon Madame Erdogan, elle avait donné ce conseil car elle considérait Asma comme une amie intime et voulait s’assurer de son bien-être et de celui de ses enfants. Amina a enfoncé le clou en déclarant: «Je n’imaginais pas une seconde qu’elle resterait muette face aux tueries qui sont ordonnées par son mari». L’épouse du Premier ministre islamiste n’est-elle pas ainsi en train d’inciter les femmes à se rebeller contre leurs maris, bien que le rôle de la femme, selon les islamistes, soit de rester au foyer et de s’occuper des enfants!

Le Premier ministre attaque le président
Les relations entre le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, et le président Shimon Peres n’ont jamais été exemplaires. Mais suite à l’annonce par Peres que son pays ne pouvait pas attaquer l’Iran tout seul et avait besoin de l’aide américaine pour que l’opération soit un succès, les conseillers de Netanyahu sont montés au créneau pour attaquer le président avec sévérité. Ils ont noté que Peres devrait savoir que la nature honorifique de sa fonction ne lui permet pas de se mêler des affaires politiques délicates. Ils ont ajouté: «heureusement que Menahim Begin n’avait pas écouté ses conseils en 1981 de ne pas attaquer le site nucléaire irakien Osirak. Après tout, les analyses de Peres sont toutes fausses, comme quand il a cru que les accords d’Oslo amèneraient la paix avec les Palestiniens».
Face à ces insultes, le président a préféré ne pas réagir. Il faut dire que l’opinion israélienne est majoritairement en faveur d’une attaque contre la République islamique, ce qui n’arrange pas ses affaires.

30000 Syriens auraient choisi de trouver refuge en Algérie, loin des violences qui déchirent leur pays. En effet, Alger, tout comme Beyrouth, permet aux Syriens d’entrer dans le pays sans visa. Mais ce flux de milliers de réfugiés a inquiété le gouvernement qui a décidé de prendre des mesures pour y mettre fin. Tout d’abord, les trois vols d’Air Algérie vers Damas et vice-versa ont été réduits, et dorénavant tout citoyen syrien souhaitant se rendre au pays du million de martyrs devra présenter des papiers prouvant qu’il possède les moyens financiers pour subvenir à ses besoins.
Les Algériens veulent surtout éviter que leur pays ne se transforme en un lieu de refuge à de Syriens dépourvus de toute ressource, au moment même où l’économie locale est en stagnation.

44000 paysans égyptiens qui avaient emprunté à la banque agricole des sommes d’argent ont été exemptés de leurs dettes par décision présidentielle. Le président islamiste Mohammad Morsi qui tente de conserver le soutien des plus démunis compte ainsi démontrer qu’il est le président des pauvres, à l’opposé de son prédécesseur Hosni Moubarak qui défendait les intérêts des plus riches. Or, cette annonce faite en grande pompe est loin d’être impressionnante, puisque la somme en question ne dépasse pas les dix-sept millions de dollars. Mais peu importe, les milieux proches des Frères musulmans ont passé une semaine à faire les louanges du président et de son gouvernement qui, selon eux, ont à cœur les intérêts des plus défavorisés.
Mohammad Morsi ne fait qu’appliquer son programme présidentiel dans lequel il avait promis d’annuler les dettes des plus pauvres, une fois élu. C’est chose faite, mais ce n’est pas sûr que cela suffise pour remettre les pendules de l’économie égyptienne à l’heure.

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