Alors que la presse régionale et internationale se projette déjà sur une ère post-Assad, les analystes s’intéressent au Parti de Dieu, centre de toutes les attentions.
The Christian Science Monitor prévient: «Washington, attends-toi à une plus grande influence de l’Iran si Bachar devait tomber».
Les Libanais ont naturellement adopté la révolution syrienne comme étant la leur. Comme toutes les sociétés arabes, la vraie menace qui pèse sur le système politique libanais est la mentalité confessionnelle qui a imprégné tous les aspects de la vie et permis les ingérences étrangères. Pendant des années, le régime Assad, père et fils, a toujours su imposer sa domination dans ce petit pays fracturé. Mais le Hezbollah et l’Iran aussi. Si jamais le maître de Damas venait à tomber, c’est l’Iran qui cherchera et réussira à combler le vide. En fait, ce processus de l'influence iranienne croissante est déjà en cours et s’accélérera probablement après la chute d'Assad. Téhéran voudra continuer à resserrer son emprise sur Beyrouth. Et si un gouvernement post-Assad à majorité sunnite en Syrie pouvait aider à contrebalancer l’influence au Liban de l'Iran chiite et du Hezbollah à très long terme, il est peu probable à court terme, qu’un nouveau gouvernement fragile puisse faire quoi que ce soit.
Pour éviter une telle issue, Washington doit reprendre le rôle de leader qu’il a perdu progressivement au Liban, dans la lutte contre le Hezbollah et l'Iran. Les Etats-Unis peuvent le faire en utilisant les mécanismes internationaux tels que la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul) et les différentes résolutions du Conseil de sécurité appelant au désarmement du Hezbollah.
Pendant que les fonds associatifs américains se font de plus en plus rares du côté de Beyrouth, l’Iran dépense des centaines de millions de dollars à ses alliés libanais. A un an des élections parlementaires au Liban, Washington doit se préparer à un nouveau round de confrontation avec Téhéran.
Dans les colonnes d’al-Hayat, «la stratégie nationale de défense est le plus important dossier pour le Liban». La question des armes du Hezbollah est la seule qui vaille. Elle est évidemment liée aux conflits régionaux du moment, plus particulièrement celui qui a eu lieu en ce moment en Syrie entre les grandes puissances de la région. Ce bras de fer à triple bande est évidemment partie intégrante du débat politique libanais. Lorsqu’un camp utilise des formules comme «limiter les armes au seul contrôle de l'Etat libanais», l’autre parle de «coordination entre l'armée libanaise et la Résistance comme étant la meilleure formule pour protéger le Liban de l'ennemi israélien». Jusqu’à présent, les parties n’ont réussi qu’à s'engager à un peu plus de «transparence» dans le traitement de la question, alors qu’en vérité, ils sont obligés d’appliquer leurs discours aux options et aux alliances de leurs parrains étrangers.
D’un côté de l’échiquier politique libanais, on estime que le changement en Syrie ne modifiera pas la formule nationale, d’abord parce que ce que le régime syrien a construit ne va pas s'effondrer, ensuite parce qu'une Iran forte est un partenaire fondamental dans l'ancrage de la dite formule. Ceci s'applique évidemment à la survie du gouvernement du Premier ministre Najib Mikati, qui devient fragile à mesure que la crise s'intensifie en Syrie, et surnage lorsque le régime marque des points.
Téhéran est réticent à un changement dans l '«équilibre stratégique du pouvoir» dans la région et les armes du Hezbollah font partie de la formule que l'Iran veut garder en place. C'est peut-être aussi la raison pour laquelle Nasrallah a expliqué que la Résistance est une question existentielle pour le Hezbollah.
Le Hezbollah, plus que jamais au cœur de l’équation régionale pour Haaretz. Le Hezbollah, allié indéfectible du régime iranien, a déjà prouvé qu’il pouvait faire bien plus que tenir tête à une armée moderne: en 2006, Tsahal s’était littéralement brisé les dents sur les combattants du mouvement. Accumulant les pertes, les erreurs tactiques et stratégiques, l’armée israélienne avait alors ravagé le Liban, multiplié les bavures et les dommages collatéraux, sans pour autant infliger le moindre dommage durable à l’organisation. Et était finalement rentrée chez elle, passablement humiliée, voire, diront certains, traumatisée.
Bien des Libanais, lassés des guerres, ne veulent pas voir leur pays se transformer une nouvelle fois en champ de bataille. Le Hezbollah, lui, prendrait le risque en cas de conflit de s’aliéner une partie de ses soutiens populaires: les chiites sont loin d’être tous belliqueux, et le Hezbollah loin d’être uniquement une organisation paramilitaire.
Mais les liens idéologiques et financiers entre Téhéran et le Hezbollah pourraient bien prendre le dessus sur ces considérations. Et en particulier si Israël ou les Etats-Unis décidaient d’attaquer les coreligionnaires iraniens du mouvement chiite, l’Iran, de son côté, pourrait bien hésiter à envoyer au feu l’un de ses alliés, surtout si le régime de Damas devait tomber sous les coups des insurgés. Mais rien n’est moins sûr. Et le réseau international du Hezbollah pourrait très bien lancer de multiples attaques sur les intérêts américains ou israéliens.
En cas de conflit, le Hezbollah devrait certes subir des pluies de bombardements et de tirs de missiles israéliens. Mais, quand bien même cela lui nuirait de manière significative, ce qui n’est pas dit, les pertes du côté de Tsahal pourraient être pour le moins conséquentes. Le scénario d’une victoire à la Pyrrhus, voire d’une défaite, préoccupe fortement Israël, mais également les Etats-Unis.
La Croix liste les attentes de la visite du pape Benoît XVI au Liban. «Puisse le Christ ressuscité donner espérance au Moyen-Orient, afin que toutes les composantes ethniques, culturelles et religieuses de cette région collaborent pour le bien commun et le respect des droits humains», avait dit, lors de son message urbi et orbi du dimanche de Pâques, Benoît XVI. Aujourd’hui, et alors que le pape s’apprête à venir au Liban pour remettre les conclusions du synode d’octobre 2010 sur le Moyen-Orient, les chrétiens d’Orient, si l’on en croit les témoignages recueillis par l’Œuvre d’Orient attendent d’abord un « soutien spirituel de tous les catholiques du monde». «Nous en avons grand besoin en ces jours douloureux et décisifs de notre histoire », lance Mgr Samir Nassar, archevêque maronite de Damas.
A Beyrouth, Benoît XVI devra, de fait, trouver un moyen de rassurer les fidèles. Minoritaires et fragilisés par la guerre, la violence, l’exode et la crise sociale, ils veulent, dans l’exhortation apostolique, trouver de «nouveaux horizons et une espérance nouvelle». Ils ont besoin de «redéfinir leur témoignage et consolider leur résistance biblique et les projets missionnaires d’avenir», estime Mgr Samir Nassar.
Pour Joseph Otayek, consultant libanais et laïque engagé, «l’Eglise se doit de répondre à leurs appréhensions et les aider à surmonter et à dépasser leurs peurs». «Le message doit donc être très clair, comme celui de Jean-Paul II vis-à-vis des peuples d’Europe de l’Est avant et au moment de la chute du communisme: N’ayez pas peur»
J. A-R.
Dur d’être président du Liban!
Le quotidien canadien Globe and Mail plaint le chef de l’Etat libanais. Qu’importe que les pouvoirs exécutifs du pôle chrétien au plus haut niveau de l’institution aient été détricotés au fil des ans et que le vrai pouvoir se trouve dans les mains du Premier ministre sunnite et de ceux du Parlement multiconfessionnel. Qu’importe si le véritable pouvoir dans ce pays se trouve en fait aux mains d’une organisation politique et militaire qui ne jouit que d’une poignée de députés, et dont le chef, Hassan Nasrallah, ne se salit pas les mains en entrant au Parlement. Les alliés chiites et chrétiens du Hezbollah font le sale boulot pour lui. C’est à lui de prendre en main les questions les plus difficiles pour le pays et c’est à lui de trouver une solution qui satisfasse tout ce petit monde qui lui fait toutes les misères du monde.