Après quelques années de répit entre l’assassinat de l’ambassadeur des Etats-Unis au Liban, Francis Meloy, et le rapt d’un colonel américain en 1976, les citoyens américains
connaissent une nouvelle période de risques en 1984 et 1985. Plusieurs enlèvements ont lieu dans différentes régions.
Les rapts des Américains au Liban ont été pour la plupart revendiqués par le Jihad islamique. Ce mouvement revendique aussi, durant le premier mois de l’année 1984, sa responsabilité dans le meurtre du président de l’Université américaine, Malcolm Kerr.
Le 10 février 1984, l’Américain Frank Regier est kidnappé à l’ouest de Beyrouth. Il est libéré le 15 avril. Le 7 mars, Jeremy Lévin, chef du bureau de la chaîne de télévision américaine Cable New Network, est enlevé toujours par le Jihad islamique. Le 16 mars, le troisième secrétaire et attaché politique à l’ambassade des Etats-Unis, William Buckley, disparaît alors qu’il quittait son domicile à Ras-Beyrouth. Le 3 octobre 1985, le Jihad islamique déclare l’avoir exécuté. Buckley était chargé des contacts avec différentes organisations et milices au Liban.
Le 8 mai, c’est le pasteur Benjamin Thomas Weir qui est pris en otage. Weir se trouvait au Liban depuis trente-cinq ans et enseignait à l’école protestante de Hamra.
Les Etats-Unis voyaient ainsi plusieurs de leurs citoyens pris en otages ou exécutés par le Jihad islamique. Les intérêts américains au Liban étaient menacés. L’ambassade américaine à Aïn Mreissé et son annexe à Aoukar sont les cibles d’attentats à la voiture piégée en 1983. De toute évidence, la politique américaine dans la région et au Liban dérangeait.
Le 3 décembre, le rapt du bibliothécaire à l’AUB, Peter Kilburn, n’est pas revendiqué. Son exécution n’est reconnue qu’en avril 1986, en riposte à la crise qui sévit entre la Libye et les Etats-Unis.
Terry Anderson, directeur général de l’agence de presse américaine Associated Press, enlevé le 6 mars 1985, n’est libéré que le 4 décembre 1991.
Le 15 mai de la même année, un fonctionnaire américain de l’Unrwa, Aiden Walsh, est enlevé et relâché vingt-quatre heures plus tard. Le 28 mai, l’Américain David Jacobson, directeur de l’AUH, est pris sur la route de l’aéroport.
Thomas Sutherland, doyen de la faculté d’agronomie de l’AUB, enlevé le 9 juin 1985, est libéré le 18 novembre 1991.
Entre 1984 et 1985, soixante et un étrangers sont victimes de rapts. Neuf sont morts, trente-deux libérés en 1986 et d’autres en 1988.
Après l’invasion israélienne de 1982, et l’assassinat du président élu Bachir Gemayel en septembre de la même année, le nouveau président Amine Gemayel s’est trouvé face à plus d’un défi. La politique américaine au début de son mandat, et son revirement quelques mois après, surtout après la conclusion de l’accord du 17 mai, mettaient le pays à feu et à sang.
Les otages étrangers devenaient de plus en plus nombreux. Ces actes revêtaient souvent un caractère politique. Ils étaient donc parfois libérés, mais beaucoup ont été exécutés. L’insécurité qui régnait à l’ouest de Beyrouth a obligé plusieurs ambassades à se déplacer à l’est de la capitale ou à prendre le chemin de Damas.
Après 1985, un répit a duré deux ans. Il a pris fin avec le rapt de Frank-Herbert Reed, directeur de la Lebanese International School le 9 septembre 1986, libéré le 20 avril 1990. Toujours au mois de septembre de la même année, Joseph Cicippio, comptable à l’Université américaine de Beyrouth, est enlevé et libéré le 2 décembre 1991. Le 21 octobre, Edward Tracy subit le même sort. Il est libéré le 11 août 1991.
Des enseignants du Beirut University College: Jesse Turner, Alan Steen et Robert Polhill, enlevés le 24 janvier, sont relâchés en deux fois en 1990 et 1991.
William Higgins, commandant en chef adjoint de l’Organisme des Nations unies chargé de la surveillance de la trêve est, quant à lui, enlevé le 17 février et exécuté.
Arlette Kassas
L’affaire Meloy
Un nouvel épisode dans l’enquête sur l’affaire de l’ambassadeur des Etats-Unis, Francis Meloy, assassiné en 1976, et qui n’avait pas été élucidée à l’époque, s’ouvre en 1983. La police arrête le 27 juin trois Palestiniens du Front de la libération de la
Palestine de Georges Habache, accusés d’être impliqués dans l’assassinat du diplomate, de son conseiller économique et de son chauffeur. Leurs aveux dirigent l’enquête vers deux Palestiniens qui auraient été tués lors de l’invasion israélienne du Liban en 1982.