Magazine Le Mensuel

Nº 2939 du vendredi 7 mars 2014

Affaire Déclassée

Disparition de Joseph Sader. Achraf Rifi dépoussière le dossier

Le ministre de la Justice, Achraf Rifi, remet sur le tapis l’affaire de Joseph Sader, enlevé il y a cinq ans sur la route de l’aéroport de Beyrouth. L’ancien directeur général des Forces de sécurité intérieure, en service au moment des faits, a demandé le procès-verbal de la séance consacrée à cette affaire par la Commission parlementaire des Droits de l’homme, il y a plus de deux ans.
 

Le ministre Achraf Rifi souligne l’importance des informations sur la disparition de Joseph Sader, fournies lors des faits et donnant des indications sur l’identité des responsables de l’enlèvement. Aussitôt, le président de la République, Michel Sleiman, a saisi le parquet de la teneur de la déclaration du général Rifi, afin de relancer l’enquête.
Une réunion de la Commission parlementaire des Droits de l’homme s’est tenue concernant le rapt de Sader, sans toutefois mentionner la demande portant sur la publication du procès-verbal. Pour le député Michel Moussa, aucun élément nouveau n’est apparu dans cette affaire. Toutefois, le parquet peut recourir aux procès-verbaux en présentant une demande officielle à la Chambre.
Les circonstances de l’enlèvement de Joseph Sader sont toujours restées floues. Au cours de la séance parlementaire qui leur était consacrée, le général Rifi, en sa qualité de directeur général des FSI, représentant du ministre de l’Intérieur de l’époque, avait fourni des indications sur cet enlèvement. Il avait souligné que le rapt avait eu lieu sur la route de l’aéroport, et que Sader avait été emmené de force à bord d’un van qui s’était rendu dans la banlieue sud. Une patrouille des FSI, passant dans le secteur, aurait poursuivi le véhicule, mais des éléments armés à l’intérieur de la banlieue sud avaient contraint ses membres à se retirer.
En parallèle de ces informations fournies par le général Rifi, l’épouse de Joseph Sader, également présente à la réunion de la Commission des Droits de l’homme, a exposé, elle aussi, les indications qu’elle possédait sur l’enlèvement de son mari.
Le 12 février 2009, Joseph Sader, 55 ans, marié et père de trois enfants, Sophia, Ralph et Tina, quittait son domicile à Maghdouché, à 6h30 du matin, pour se rendre comme d’habitude à son travail. Il occupait le poste de directeur des services opérationnels Information et Technologie de la compagnie aérienne Middle East Airlines (MEA). Sur le trajet, et peu avant son arrivée, sur un pont dans la région du Cocodi, alors qu’il descendait d’un taxi de type minivan, une voiture Chevrolet Venture blanche s’arrête à sa hauteur. Deux hommes, dont on ignore l’identité, l’obligent à monter dans la voiture qui redémarre aussitôt.
Depuis, le sort de Joseph Sader est inconnu. Il n’a pas été revu et aucun contact n’a été établi avec sa famille. Amnesty International avait indiqué qu’il serait retenu, contre son gré, dans un lieu inconnu, par des membres d’un groupe armé ne relevant pas de l’Etat.
Joseph Sader avait l’habitude, selon sa famille, de garer sa voiture à Saïda quand il faisait beau et de prendre le bus jusqu’au pont de l’aéroport. C’est là qu’il descend pour faire quelques centaines de mètres à pied jusqu’à son bureau à la MEA. Il n’est jamais arrivé à destination.
Sa voiture a été bel et bien retrouvée à Saïda. Sa famille a fait le tour des hôpitaux croyant à un accident. L’un des collègues de Sader, qui vient également en bus jusqu’à l’aéroport a vu, à une vingtaine de mètres de lui, deux hommes descendre d’une camionnette et obliger un piéton à embarquer à son bord. L’homme s’est débattu, mais ils ont réussi à l’immobiliser. Le témoin aurait vu, quelques mètres plus loin, une voiture des FSI. Il leur a raconté ce qu’il avait vu, la camionnette est passée à cet instant. L’agent des FSI l’a suivie jusqu’aux abords de la mosquée al-Rassoul al-Aazam, puis a rebroussé chemin. L’enquête n’a pas avancé depuis. L’affaire continue à faire couler beaucoup d’encre. Connaîtrons-nous jamais ses dessous? 


Arlette Kassas

Un poste sensible
Selon sa famille, Joseph Sader n’est pas en possession d’informations sensibles au sein de la MEA. Cependant, son poste lui donnait accès à un large ensemble de données délicates, comme par exemple le mouvement au départ et à l’arrivée des voyageurs.

 

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