Magazine Le Mensuel

Nº 2944 du vendredi 11 avril 2014

Affaire Déclassée

Assassinat de Adnan Malki. La chasse au PPS, au Liban et en Syrie

Les années cinquante ont marqué l’Histoire du Liban d’une pierre noire. Alors que le pays, confronté à de grands défis, cherchait sa place sur l’échiquier régional et mondial, ses relations avec la Syrie lui posent de gros problèmes… comme toujours.

Le 23 avril 1955, l’état-major syrien adjoint, le colonel Adnan Malki, assiste à un match de football quand il est assassiné à Damas par un caporal alaouite, membre du Parti populaire syrien (PPS), affecté à sa sécurité. Les autorités syriennes entament alors une chasse aux criminels et Issam Mahayri, député du PPS, est arrêté en même temps quevingt-cinq officiers et cent cinquante suspects, dont la veuve d’Antoun Saadé, le fondateur du parti.
La Syrie accuse le Liban d’avoir ouvert ses portes au chef du PPS, Georges Abdel-Massih, et lui reproche de ne pas l’aider dans sa lutte ouverte contre le parti. Rien ne va plus désormais entre les deux pays voisins.
Le Liban traverse une période difficile. Les ingérences régionales dans ses affaires se poursuivent et s’amplifient. Celles provoquées par les partis internes ou dans les relations avec les pays voisins viennent s’y greffer.
La réaction du PPS ne se fait pas attendre. Le parti publie à Beyrouth un communiqué dégageant sa responsabilité du meurtre de Malki, mettant en garde le gouvernement syrien «contre les injustices dont les membres du parti pourraient être victimes, lui faisant assumer, d’ores et déjà, toutes les conséquences». Les autorités syriennes décident, quelques jours plus tard, de le dissoudre. Des officiers sont limogés, et les têtes de Georges Abdel-Massih, Iskandar Chaoui, Ghassan Jédid, Sami Khoury et Khalil Cheikh, sont mises à prix.
 

Les Dandache de la partie
Face aux accusations syriennes et à la position du PPS au Liban, ainsi qu’aux réactions suscitées par le communiqué du parti, les autorités libanaises se doivent de réagir. Elles s’engagent à réprimer les activités du PPS au Liban. Mais rien n’est réglé. Le 13 octobre 1955, deux officiers des services de renseignements syriens sont enlevés au Hermel. Ils avaient remis à des membres du clan des Dandache 50000 livres libanaises pour se faire livrer Ghassan Jédid et Iskandar Chaoui, deux leaders PPS, retenus par le clan et recherchés depuis l’assassinat du colonel Malki.

 

Extradition rejetée
Un porte-parole du gouvernement libanais reproche aux Syriens d’avoir usé de moyens illégaux pour les arrêter, considérant cela comme une atteinte à la souveraineté du pays. Une rencontre entre le chef du gouvernement libanais et son homologue syrien s’impose. Elle a lieu à Chtaura. Les deux officiers syriens sont relâchés.
En Syrie, la chasse au PPS se poursuit. Des pressions sont exercées sur le Liban pour en faire autant, mais ce dernier prend ses distances. Damas demande officiellement à Beyrouth d’extrader les membres du parti, menaçant de reconsidérer sa politique envers son petit voisin. Le Liban se trouve confronté à un difficile dilemme, ses relations avec la Syrie étant menacées. Il émet néanmoins des mandats d’arrêt contre sept activistes du PPS.
Le 3 décembre 1955, Beyrouth refuse une demande syrienne d’extradition de membres du PPS accusés de complicité dans l’assassinat du colonel Malki. Le gouvernement libanais estime que «la requête ne remplissait pas les conditions légales» et que, par conséquent, elle ne pouvait pas être agréée. Mais après des pourparlers entre les responsables des deux pays, début 1956, Beyrouth s’engage à pourchasser le parti syrien. 

Arlette Kassas

Les informations citées dans cet article sont tirées du Mémorial du Liban – le mandat Camille Chamoun de Joseph Chami.

Tension à la Régie
Les relations entre le Liban et la Syrie sur fond de l’assassinat de Adnan Malki sont fortement ébranlées et s’étendent à d’autres secteurs. Saisi d’une plainte des douze employés 
libanais de la Régie syrienne menacés 
d’expulsion à la fin de 1955 pour n’avoir pas acquis la nationalité du pays, le gouvernement libanais envisage de licencier les vingt-huit employés syriens de la Régie libanaise. 

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