Magazine Le Mensuel

Nº 2952 du vendredi 6 juin 2014

Semaine politique

Examens officiels. L’armée dans les classes?

En reportant la date des examens officiels au 12 juin, Elias Bou Saab s’est acheté du temps, dans l’espoir qu’intervienne un très hypothétique accord sur la grille des salaires. Le ministre de l’Education a déjà préparé son plan B: la mise à contribution de l’armée.

 Les épreuves du baccalauréat et du brevet vont-elles être organisées cette année par les militaires et les policiers? C’est, en tout cas, le dernier recours imaginé par le ministre de l’Education pour faire face à la grève générale et au boycott des examens officiels que prépare le comité de coordination syndicale (CCS) dirigé par Hanna Gharib. Lundi, lors de la dernière rencontre au ministère entre Elias Bou Saab, les représentants du CCS et des syndicats d’enseignants, un calendrier a été mis sur pied. Les épreuves du brevet, prévues pour le 7 juin, ont été reportées au mercredi 12 juin. Deux jours avant doit avoir lieu la séance parlementaire consacrée à l’adoption de la grille des salaires, reportée le 27 mai dernier faute de quorum. Les blocs parlementaires chrétiens avaient argué du fait que la Chambre ne pouvait légiférer en situation de vacance à la présidence de la République. Autant dire que la deuxième séance prévue mardi prochain devrait subir le même sort. Une donnée que le ministre a intégrée il y a plusieurs jours déjà.
Autre solution envisagée par le ministère, l’octroi progressif des échelons aux enseignants. Une mesure fermement rejetée par Gharib. «Nous attendons depuis trois ans. Nous voulons la grille des salaires dans sa totalité et le bon déroulement des examens», explique-t-il, insistant pour que soit accordée aux enseignants «l’augmentation de salaires de 121%». Le ministre a proposé un échelonnement de cette augmentation sur trois ans. Une proposition que le CCS promet d’étudier.
La position du CCS est renforcée par la mobilisation de ses troupes depuis plusieurs semaines. Ces derniers jours, le comité a organisé des sit-in devant les centres de distribution des missions aux organisateurs des examens. Point focal de ces manifestations, vendredi, devant le ministère de l’Education. «L’Etat sera paralysé dès le 7 juin», prévenait Gharib en début de semaine. Un jusqu’au-boutisme qui commence à faire des vagues au sein de la communauté enseignante. L’Union des écoles privées du Liban a, par exemple, affirmé «la nécessité du bon déroulement des épreuves officielles, malgré les difficultés» et regretté que «les élèves soient otages» des revendications salariales.
 

«Alternative sans précédent»
Entre l’absence de porte de sortie parlementaire, le jusqu’au-boutisme du CCS et le compte à rebours qui tonne, Elias Bou Saab réfléchit depuis plusieurs jours à «une alternative sans précédent, différente de l’option adoptée en 2010, qui préserve l’intérêt des élèves et des parents, et qui sauve l’année scolaire». Lundi, au cours de sa conférence de presse, il a préféré ne pas en dire plus. Il le dit lui-même, «je suis avec les droits des enseignants, mais je dois dire aujourd’hui que je suis aussi avec le droit des écoliers et de leurs parents». Pour lui, il est hors de question d’annuler les examens ou, à l’inverse, de faire passer par décret les 108 000 élèves concernés. Les expériences précédentes ont été des fiascos, explique-t-on dans les couloirs du ministère. L’idée de confier l’organisation des examens aux écoles privées a été un temps évoquée mais vite abandonnée, craignant que les enseignants du public se sentent spoliés de leurs prérogatives.
En réalité, Bou Saab sollicite depuis quelques jours responsables sécuritaires et hommes de loi. L’idée: confier aux militaires et aux policiers l’organisation des examens, et doter le dispositif d’un cadre juridique qui le protégerait d’éventuelles plaintes sur l’illégalité ou l’illégitimité de ce dispositif. Autre écueil, la question de la correction. Si soldats ou policiers peuvent remplacer les professeurs à la surveillance, peuvent-ils le faire à la correction? A toutes ces questions, Elias Bou Saab attend des réponses légales et juridiques. Sans elles, le ministre, qui n’est pas un aventureux, ne se lancera pas dans cette voie. 

Julien Abi Ramia

Le nouveau calendrier
Lundi, le directeur général du ministère de l’Education qui préside la commission des examens, Fadi Yarak, a publié un mémorandum qui détaille les nouvelles dates des examens. Du 12 au 15 juin auront donc lieu les épreuves du brevet national. Du 16 au 21, leur succéderont les épreuves du baccalauréat des deux filières scientifiques, puis du 22 au 26 juin auront lieu les épreuves du bac économique et littéraire. Des dates qui sont susceptibles d’être modifiées en fonction de l’évolution de la situation.

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