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Nº 2997 du vendredi 17 avril 2015

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Meilleur remède, le sport cérébral. Trente mille Libanais atteints d’Alzheimer

Maladie chronique et fatale qui touche 40% des Libanais de plus de 80 ans, l’Alzheimer est un mal dégénératif qui se fait de plus en plus fréquent au Liban. Certaines statistiques prouvent que 30 000 Libanais en sont atteints. D’où vient l’Alzheimer? Comment peut-on prévenir la maladie? Un traitement est-il possible? Magazine enquête.

Pour guérir de l’Alzheimer, il faut en connaître la cause. Or, ni l’origine de la maladie n’est véritablement connue, ni le traitement existe. «La maladie d’Alzheimer est, en gros, la maladie de la personne âgée», explique le Dr Halim Abboud. Cette maladie dégénérative, qui entraîne la disparition des neurones du cerveau, augmente avec l’âge et frappe la mémoire, la concentration, l’orientation et parfois même le comportement de l’individu.

A la recherche des origines
Les théories sur les causes de cette maladie sont nombreuses. L’Alzheimer peut être d’origine génétique. Si un membre de la famille d’un individu a été ou est atteint de la maladie d’Alzheimer, le risque de développement de la maladie chez lui peut doubler, voire tripler.
Les théories se sont multipliées et, selon une étude effectuée en 2008 à Stockholm, il s’est avéré qu’un régime riche en sucre, graisse et cholestérol favorise l’apparition de maladies
cardiovasculaires engendrant, par conséquent, la maladie d’Alzheimer.
Deux ans plus tard, en 2010, une étude faite par des chercheurs finlandais démontre que chez les fumeurs, le risque de développer la maladie d’Alzheimer, est doublé. D’autres spécialistes ont constaté que la maladie pourrait provenir d’une résistance à l’insuline au niveau du cerveau. Cela veut dire que, lorsqu’une personne est atteinte d’Alzheimer, le cerveau est incapable d’assimiler entièrement le glucose. On parle alors de diabète du cerveau pour caractériser la maladie d’Alzheimer.

 

Espoir de guérison?
La théorie la plus reconnue par les médecins actuellement est celle du Dr Achraf Makki. Selon lui, les études entreprises jusqu’à présent prouvent que l’Alzheimer est le résultat de dépôts microscopiques denses répartis dans l’ensemble du cerveau. Ces plaques sont constituées en grande partie d’une protéine du nom de «bêta-amyloïde» ou A bêta et, lorsqu’elles se regroupent dans le cerveau à des concentrations élevées, elles deviennent toxiques pour les cellules cérébrales, provoquant ainsi chez l’individu la maladie d’Alzheimer.
Il n’existe pratiquement pas de remède pour la maladie d’Alzheimer. Le traitement curatif est toujours en phase d’essais et, bien que maintes études pour les vaccins aient été menées, les premiers tests sur l’homme se sont avérés décevants, expliquent les gériatres, ainsi que les Drs Achraf  Makki et Halim Abboud. Toutefois, les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer suivent un traitement médical à base de comprimés, de gélules ou de patchs. Ces médicaments ralentissent l’évolution de la maladie et permettent de stabiliser la perte de la mémoire et de l’autonomie. Mais les effets sont plutôt à court terme. Ils existent au Liban et sont couverts entièrement par la Sécurité sociale et par le ministère de la Santé.
Tout au long du traitement, on peut constater une certaine stabilité de la maladie si ce n’est un léger pic d’amélioration au début du traitement sur le plan de la mémoire, de la concentration, de la vie sociale, du comportement… Cependant, à un stade avancé de la maladie, les médicaments ne fonctionnent plus. D’où l’importance du support et de l’aide fournis à l’entourage du malade.
En parallèle, à la prise de médicaments, il faut veiller à conserver autant que possible une activité cognitive. Les jeux de société et ceux nécessitant une certaine capacité intellectuelle sont conseillés (mots fléchés, jeux de dame, jeux d’échecs…), de même que les activités physiques.
Si guérir de la maladie est quasi impossible (puisque les cellules qui meurent dans le cerveau sont irremplaçables), il existe des moyens permettant de lutter contre les facteurs de risque favorisant l’atteinte de la mémoire. Ces facteurs sont l’hypertension artérielle, le diabète et le cholestérol. Une prise en charge adéquate de ces maladies est recommandée dans la prévention de l’Alzheimer.

 

Témoignages poignants
L’inactivité physique, ainsi que le faible niveau d’éducation contribuent également à la provocation de la maladie chez l’être humain. Les facteurs toxiques, à l’instar de la cigarette, peuvent être à l’origine de l’Alzheimer. Le tabagisme favorise les maladies vasculaires (au niveau du cerveau entre autres) et ces maladies conduisent à des troubles de mémoire et à des troubles de la concentration ne provoquant pas nécessairement la maladie d’Alzheimer, mais une maladie similaire à celle-ci. En traitant et en prévenant ces facteurs de risque, l’individu devient un peu moins exposé à souffrir d’un syndrome démentiel.
L’époux de Marie K. est frappé d’Alzheimer. Celle-ci explique que la découverte de la maladie de son mari l’a fortement déstabilisée: «J’avais l’impression que nous n’étions plus deux à vivre sous le même toit, mais bien trois: mon mari, la maladie et moi». L’Alzheimer s’était imposé dans leur vie de manière féroce, dictant sa loi, s’emparant de tous les souvenirs de son époux, laissant ainsi place à l’incohérence, la désorientation, le trou de mémoire, la dépression, la difficulté de langage et de communication. «J’ai compris toutefois, dit-elle, après un certain temps, que baisser les bras devant cette maladie et agir en spectatrice désespérée ne fera que nuire à ma vie et à celle de mon mari, parce que sa maladie est aussi la mienne». Elle consacre son temps à prendre soin de celui qu’elle aime «pour le meilleur et pour le pire».
Après dix ans passés avec sa mère souffrante, Georges S. affirme avoir déduit de son expérience personnelle que «seule la dédramatisation de la situation peut secourir les parents ou l’entourage d’un malade frappé d’Alzheimer. On peut passer de très bons moments avec le malade en ne le contredisant pas, en l’écoutant, en lui souriant et en lui parlant doucement». Selon lui, il faut savoir s’habituer et s’adapter aux changements de la personne atteinte d’Alzheimer, prendre du recul, la déculpabiliser si elle se trompe, la dynamiser et stimuler les liens sociaux.
«Qui es-tu? Que fais-tu là? Où est la cuisine? J’ai déjà 76 ans! Ça fait beaucoup, non?»… Des tas de questions insensées que pose le papa de Murielle H. «Il ne sait plus où se trouvent ses clés qu’il vient de déposer sur la table, ne sait pas où est ma sœur qui vient de passer aux toilettes et demande si elle est partie au théâtre, il enfile une chemise par-dessus une autre, refuse de boire pendant toute la journée parce que l’eau selon lui n’est pas potable…», témoigne Murielle. «Au départ, je croyais pouvoir sauver mon père. Je faisais tout pour lui faire revenir la mémoire. Un jour, arrivée à bout de forces, je compris qu’il m’était impossible de le guérir complètement, mais qu’il me fallait vivre avec et l’aider à évoluer. J’ai ainsi appris à être à l’écoute de moi-même et de mon corps pour être capable de prendre en charge mon papa. Je me confiais souvent au médecin, à des amis et à des proches qui me conseillaient, me soutenaient et me venaient en aide. Le proche du malade d’Alzheimer a besoin de parler, de se livrer à quelqu’un beaucoup plus que le malade lui-même qui, lui, n’est pas conscient de son état. De là, j’ai réussi à comprendre qu’il me fallait puiser dans toutes mes forces un changement de mode de vie pour pouvoir être présente auprès de mon père et l’aider à surmonter les difficultés».

 

Natasha Metni

Les symptômes
Le symptôme le plus fréquent réside dans l’atteinte de la mémoire du présent. S’ensuivent la perte des souvenirs, les distractions mineures, les troubles cognitifs sévères (confusions, irritabilité, agressivité, troubles de l’humeur, des émotions, des fonctions exécutives et du langage) et finalement, la perte de mémoire à long terme.
Les premiers signes de la maladie sont souvent confondus avec les aspects normaux de la sénescence, de la dépression, du stress ou d’autres pathologies neurologiques comme la démence vasculaire. Il faut donc distinguer entre l’Alzheimer et les autres maladies «mimiques». A savoir que les troubles de la thyroïde, une carence en vitamine B12, la dépression et les infections chroniques comme la syphilis, peuvent aussi causer une perte de la mémoire. La vitesse et l’évolution de la maladie d’Alzheimer sont variables d’un individu à un autre.

Une démence dans un groupe de maladies démentielles
La démence est un groupe qui comporte plusieurs groupes de maladies. La plus fréquente est la maladie d’Alzheimer. Ce n’est donc pas toute démence qui constitue la maladie. Certaines personnes peuvent être atteintes de démence vasculaire qui tire sa source de l’athérosclérose et présenter les mêmes aspects qu’un malade atteint d’Alzheimer.

Alzheimer ou schizophrénie?
En 1901, alors qu’Alois Alzheimer, psychiatre et neuropathologiste allemand, traitait un patient de 50 ans, Auguste Deter, il identifia le premier cas de la maladie qui portera son nom. Croyant au départ que Deter était schizophrène, et ayant suivi son cas jusqu’à sa mort en 1906, il découvrit qu’il ne s’agissait pas de schizophrénie et décrivit les altérations anatomiques observées sur son cerveau.

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