Magazine Le Mensuel

Nº 3001 du vendredi 15 mai 2015

En Couverture

Joutes verbales Hariri-Nasrallah. Une bataille qui divise les Libanais

A peine sayyed Hassan Nasrallah terminait son discours dans lequel il assurait que la bataille du Qalamoun aurait lieu, la réponse de l’ancien Premier ministre Saad Hariri ne s’est pas fait attendre. Il est clair que cette bataille ne fait pas l’unanimité entre les Libanais.

Non seulement Saad Hariri a violemment condamné la participation du Hezbollah à la bataille du Qalamoun, il a assuré qu’il n’était pas question d’accorder une couverture politique à cette aventure via le dialogue, ou via le cabinet en place. L’ancien Premier ministre a même utilisé un langage menaçant et accusé le parti chiite de servir l’agenda militaire de Bachar el-Assad en s’engageant dans une guerre dont l’objectif unique est de protéger le flanc ouest de son armée qui accumule les échecs. Il lui a aussi reproché d’attirer les braises syriennes, encore une fois, vers le territoire libanais. Les mises en garde de l’ancien Premier ministre ont focalisé sur trois aspects:
Le danger que l’implication du Hezbollah dans la bataille fait peser sur les otages militaires détenus par Daech et al-Nosra.
Les éventuelles répliques de cette bataille sur les villages frontaliers.
La position inconfortable à laquelle l’Etat et l’armée seront confrontés en cas d’agression contre les régions libanaises.
Cette altercation publique entre les leaders du Hezbollah et du Moustaqbal n’a pas manqué d’avoir des incidences sur la dernière session du dialogue de Aïn el-Tiné, où le thème du Qalamoun s’est imposé aux protagonistes à la lumière de l’annonce surmédiatisée de l’imminence de la bataille. Les interrogations exprimées par Hariri sur Twitter ont été reprises sous forme de réserves par ses représentants, qui ont soulevé la question du rôle de l’armée dans cet affrontement et ses conséquences sur la situation interne et celle de la réaction des ravisseurs des militaires détenus. La délégation du Moustaqbal s’est aussi interrogée sur le timing et l’objectif politico-militaire d’une telle aventure, susceptible d’alimenter la tension intercommunautaire, surtout si les combattants s’infiltrent sur le territoire libanais. Finalement, ont dit les représentants du Courant du futur, à quoi sert donc cette bataille surtout que la ligne frontalière libano-syrienne est désormais sous contrôle et que les groupes terroristes neutralisés n’ont plus les moyens de menacer la stabilité du Liban.
Du côté du Hezbollah, les milieux politiques estiment que derrière la campagne menée par le Moustaqbal se profilent des motifs régionaux liés à l’accord-cadre de Lausanne, qui avait déboussolé les pôles du Moustaqbal auxquels la Tempête de la fermeté, au Yémen, est venue apporter quelque réconfort, surtout après les revers du régime syrien à Idlib et Jisr el-Choughour. D’après ces mêmes sources, Hariri cherche à présenter ses lettres d’accréditation aux nouveaux dirigeants saoudiens, en renouvelant son pari sur la chute de Bachar el-Assad et sur l’établissement d’un nouvel équilibre stratégique dans la région. L’ancien Premier ministre confond ses vœux avec la réalité. Malgré les pertes enregistrées par le régime syrien au nord, les milieux pro-syriens refusent de les considérer comme un prélude à un total changement stratégique. Ils ajoutent: si l’Arabie veut protéger ses alliés au Liban via l’appui qu’elle apporte à la poursuite du dialogue avec le Hezbollah, elle n’écarte pas non plus l’activation de l’axe frontalier est avec le Liban à l’instar de ce qui s’était passé aux frontières turques et jordaniennes. Objectif principal? La prise de contrôle de la région de Masnaa par al-Nosra pour couper l’axe de ravitaillement principal entre le Hezbollah et la Syrie. Ce plan a eu pour conséquence l’accélération de l’opération militaire expresse dans l’Anti-Liban, et l’élargissement de l’espace vital de protection de cette zone stratégique par l’armée syrienne et le Hezbollah. Quant à la pression continue exercée sur les combattants du Qalamoun, elle vise à les empêcher de se regrouper pour exécuter un redéploiement à l’intérieur des frontières libanaises dans une tentative de transporter le conflit avec le Hezbollah au cœur des villages libanais. Ce danger n’est pas totalement éliminé tant que Riyad continue à vouloir instrumentaliser le Front al-Nosra.

Chaouki Achkouti

Neutraliser les réfugiés
Les notables du village de Ersal ont reçu une notification politique claire du Moustaqbal les informant que le dossier militaro-sécuritaire dans cette région est de la seule responsabilité de l’Armée libanaise et que l’unique possibilité d’intervention consiste à neutraliser les réfugiés syriens. D’après des sources proches du Courant du futur, le ministre de l’Intérieur, Nouhad Machnouk, a assuré le contact avec des personnes libanaises et syriennes influentes dans la région, pour leur proposer de déménager les camps de déplacés adjacents au jurd vers d’autres zones à l’intérieur de la Békaa. Il a aussi insisté sur le fait qu’aucun groupe libanais ou syrien, jugé dangereux par l’armée, ne pourra bénéficier d’une quelconque couverture.

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