L’affaire des réseaux illégaux d’Internet prend de l’ampleur à la lumière des révélations qui filtrent de l’enquête en cours. Les pièces du puzzle se rassemblent peu à peu depuis que l’affaire a été rendue publique. Le plus dangereux est que l’institution militaire et des services de sécurité utilisaient ce réseau, lié à Israël, selon le ministre des Télécoms, Boutros Harb. Cela signifie que l’Etat hébreu a pu accéder à des informations sensibles concernant la sécurité nationale.
Ogero avait découvert une antenne de trois mètres, dirigée de Kornet el-Saouda vers Chypre, une installation qui nécessite une certaine expertise qui n’est pas assurée au Liban. D’autres antennes ont été repérées dans d’autres régions et les enquêtes se poursuivent pour en trouver d’autres. La révélation de la présence de fournisseurs illégaux d’Internet dans le pays a suscité l’étonnement général: comment ces réseaux ont-ils été installés sans que les autorités compétentes n’en prennent connaissance? Comment se sont-ils infiltrés parmi les réseaux légaux qui vendent des débits dépensant ceux qu’ils achètent auprès de l’Etat? Qui a fait entrer le matériel utilisé par les fournisseurs illégaux au Liban? Ce matériel est-il entré de manière légale ou illégale et pour le compte de qui? Comment se fait-il que personne n’ait détecté ce réseau de fibre optique et toutes ces installations à si haute technicité qui seraient présents au Liban depuis près de cinq ans et qui fournissent Internet à des institutions étatiques et sécuritaires?
Autant de questions débattues au cours d’une réunion urgente de la Commission parlementaire de l’Information et des Télécoms, en présence du procureur général près la Cour de cassation, le juge Samir Hammoud, du procureur financier, le juge Ali Ibrahim, du directeur général d’Ogero, Abdel-Monhem Youssef, et d’une équipe technique relevant du ministère de l’Information.
Le ministre des Télécoms, Boutros Harb, et le président de la commission parlementaire, Hassan Fadlallah, ont confirmé indirectement l’implication à haut niveau de personnes qui seraient fortement protégées.
Selon les informations fournies, les stations implantées sur les hauteurs des montagnes importent et distribuent des heures de connexion. La fibre optique est étendue dans plusieurs régions et sur des poteaux électriques appartenant à l’Etat libanais. Ces fibres sont sophistiquées et le réseau a été installé de Jbeil jusqu’aux portes de Saïda, en passant par Jounié, Jal el-Dib, Jdeidé, Achrafié et Choueifate.
Les révélations ont montré aussi qu’un câble sous-marin a été installé entre Nahr el-Kalb et Nahr Ibrahim, ce qui exige l’intervention de professionnels de haut niveau.
Confirmant les informations sur une éventuelle piste israélienne concernant ces réseaux, Boutros Harb a parlé de «preuves que les connexions illégales sont liées à Israël».
Quatre stations ont déjà été démantelées et l’affaire est désormais devant la justice. Le pouvoir judiciaire poursuit l’enquête. Jusqu’où ira-t-elle? Qu’est-ce qui pourra être découvert dans cette affaire liée à la souveraineté nationale et à la sécurité des Libanais?
Arlette Kassas