En Syrie, en Afghanistan, en Irak, au Yémen et dans plusieurs autres pays où la guerre n’épargne rien. Des villes entières, témoins de civilisations passées, sont détruites. Musées, monuments, œuvres d’art… tout y passe. Afin de faire face à la destruction massive de la mémoire, des projets de préservation sont mis en place, des monuments, basés sur la photogrammétrie, une technique permettant de reconstituer, en 3D, des objets, des constructions, des monuments… en utilisant des photos.
Dans les zones de conflit, le patrimoine culturel n’est pas épargné par la destruction; il est souvent même une cible privilégiée. Détruire les preuves d’une culture et d’une civilisation passées revient à effacer une partie de la mémoire collective et réduire à néant une bonne partie des connaissances.
L’Unesco qualifie les récentes destructions dans les zones de conflit de «tragédie culturelle». Sans oublier la vente, au marché noir, de différentes œuvres d’art et de pièces représentant la mémoire culturelle de l’humanité. Divers projets initiés par des entreprises et des particuliers dans différents pays en guerre font appel aux spécialistes et internautes à travers le monde pour participer à la sauvegarde et à la récupération de ce patrimoine.
Le «Syrian Heritage»
Trouver une solution pour préserver le patrimoine syrien est au centre des préoccupations de plusieurs chercheurs et centres de recherche. Sur le terrain, une société française s’est donné pour mission d’utiliser les nouvelles technologies pour empêcher le patrimoine culturel syrien de sombrer dans l’oubli. Iconem, start-up française œuvrant dans le domaine du patrimoine, en partenariat avec la DGAM (Direction générale – syrienne, ndlr – des antiquités et des musées) a créé la plus grande base de données archéologiques en 3D consacrée à la sauvegarde du patrimoine syrien.
En manque de moyens et de technologies adaptés, les chercheurs et archéologues locaux peinaient à trouver une solution durable et efficace pour la protection des monuments. L’aide d’Yves Ubelmann, architecte-archéologue, et de Philippe Barthélémy, pilote, a été décisive et fait entrer la conservation du patrimoine dans une nouvelle ère.
Grâce aux deux fondateurs d’Iconem, une quinzaine de chercheurs locaux ont été formés à la photogrammétrie, technologie de numérisation 3D basée sur des images réalisées depuis des points différents d’un même monument à partir de drones. Les images sont ensuite analysées par des programmes permettant de reconstruire les monuments en 3D.
L’obstacle majeur rencontré par les différentes équipes est la difficulté de faire voler des drones dans certaines régions. Pour des raisons de sécurité, l’autorisation de les utiliser n’était pas toujours accordée.
A ce jour, plusieurs sites ont été complètement enregistrés et accessibles sur le site de la société comme la mosquée des Omeyades de Damas, Ougarit et le théâtre de Jableh bâti au IIIe siècle.
Mossoul, un travail participatif
Le sort du patrimoine culturel en Irak ne diffère par beaucoup de celui de la Syrie. Une catastrophe culturelle et des archéologues en manque de moyens et de solutions pour protéger toutes ces empreintes des civilisations passées.
Le projet Mossoul est une initiative culturelle spontanée dans la mesure où aucune organisation des équipes n’a été effectuée pour réaliser ce travail. Ce musée virtuel en 3D en construction fait appel aux internautes pour partager leurs photos des œuvres qui étaient exposées au musée, ainsi qu’aux experts en patrimoines et en programmation informatique afin d’aider à trier, stocker et créer les modèles en 3D.
Les contributions étaient fulgurantes. Les internautes de par le monde partageaient leurs photos et leurs informations et invitaient leurs contacts sur les réseaux sociaux à en faire de même.
Des experts de tous bords ont également participé à ce projet, parmi eux d’anciens employés du musée. Ces derniers ont aidé à authentifier et à trier un bon nombre d’images.
Seulement quelques jours après le lancement du projet, la première œuvre d’art en 3D est mise en ligne. La mise en ligne de l’œuvre Le lion de Mossoul a permis un partage massif de l’information concernant le projet.
Les fondateurs du projet espèrent encore plus de contribution de la part des internautes, ainsi que de spécialistes de photogrammétrie et de programmation informatique.
Laila Majhad