Déchets solides, rejets d’égouts et de substances chimiques dans la mer. Au Liban, la pollution marine ne date pas d’hier. La crise des déchets remet le sujet sur le tapis et inquiète les scientifiques. Que risque-t-on vraiment à se baigner au Liban?
Au Liban, la pollution de la mer n’est pas un phénomène nouveau. En 2013 déjà, le journal français Le Monde écrivait: «Les eaux de baignade au Liban sont infestées de bactéries, faute de stations d’épuration».
Absence de stations d’épuration qui fonctionnent, pollution chimique et bactériologique avec 90% des eaux usées qui sont reversées directement dans la mer sans aucun traitement. Au Liban, les sources de la pollution marine sont multiples.
«On distingue ainsi une pollution biologique et une pollution chimique plus grave pour la santé car celle-ci ne peut pas être traitée» explique le docteur en médecine clinique, Pascale Abou Sleiman, interrogée par Magazine.
Infections et allergies
La première forme de pollution est notamment causée par les déchets solides rejetés dans la mer, mais aussi le lixiviat, liquide émanant des ordures qui sont rejetées, comme les égouts sans aucun traitement.
En 2013, à Ramlet el-Baïda, le taux de colibacilles d’origine fécale (bactérie) était déjà supérieur à 1 000 par 100 millilitre (ml). Passé le seuil de 100 unités, la baignade est considérée dangereuse.
Cette pollution biologique peut notamment entraîner des infections cutanées, des diarrhées, des infections respiratoires ou encore des allergies, selon le Dr Abou Sleiman.
La pollution bactériologique n’est pas la seule responsable des risques sur la santé des Libanais. Les rejets chimiques causent une autre forme de pollution marine. Des métaux lourds ont été détectés dans la mer: du mercure, du plomb ou encore de l’arsenic.
Pour Pascale Abou Sleiman, «ces substances qu’on retrouve dans la mer sont des matières bio accumulatives. Cela signifie que même si le taux relevé est jugé normal, cela ne veut pas dire qu’il n’existe pas de danger. Lorsque le taux est anormal, il est trop tard, ajoute la scientifique, la maladie a déjà commencé. Nous devons mener des études plus poussées pour savoir à quel point il est dangereux de se baigner dans cette mer polluée, car c’est l’exposition répétée qui fait craindre le risque de maladie au contact de ces substances bio accumulatives».
La dangerosité des métaux lourds pour l’homme est bien connue: ils peuvent causer des maladies respiratoires chroniques, un empoisonnement du système neurologique avec des crises telles que l’épilepsie, mais aussi des malformations congénitales, selon le médecin.
Pollution chimique
La crise des déchets a aggravé le phénomène de pollution notamment par les incinérations sauvages qui ont accru la pollution chimique de l’eau.
«Les incinérations sauvages ont créé des cendres volantes qui ont contaminé l’eau. Ainsi, des métaux lourds ont été retrouvés dans les sources d’eau du pays. Selon les résultats d’une étude de l’Institut de recherches agricoles au Liban «un maximum de bactéries, de plomb et de mercure a été retrouvé dans l’eau».
La présence de substances chimiques toxiques et de ces métaux lourds entraîne une contamination des poissons et donc de la chaîne alimentaire, toujours selon les mêmes sources.
Soraya Hamdan
Où se baigner?
Selon le directeur du centre marin, Gaby Khalaf, cité par le site environnemental Green area, «au Liban, toutes les plages situées aux alentours des grandes villes seraient polluées, en particulier celles de Beyrouth, Saïda et Tripoli. De Jounié à Ramlet el-Baïda, toutes les plages sont infestées, tandis qu’à Antélias, des milliers de bactéries prolifèrent. Amchit et Tabarja ne sont pas épargnées, mais le Akkar serait préservé», toujours selon la même source.