Après l’immense succès des spectacles, Le porteur d’histoire, Les cavaliers, Les chatouilles, L’apprentie sage-femme… Persona Productions accueille, à Beyrouth, Des cailloux plein les poches, une comédie dramatique interprétée par Eric Métayer et Elrik Thomas.
D’une part, il y a ceux qui ne rêvent plus. De l’autre, ceux qui vendent des rêves, le rêve américain, Hollywood. Cela se passe dans un village en Irlande, dans le comté de Kerry, là où il n’y a pas grand-chose à espérer de l’avenir. Tout au long de la magnifique côte irlandaise, constellée d’îles aux rochers escarpés avec ses villages pittoresques, et qui a déjà souvent servi d’arrière-plan à de nombreux films américains, «les paysans et les chômeurs du cru, élevés depuis l’enfance dans le culte de John Wayne et Maureen O’Hara, écrit Télérama, noient chaque soir au pub leurs souvenirs perdus». C’est là justement qu’atterrit une superproduction hollywoodienne pour tourner un film à gros budget.
Un goût de «whisky tourbé»
Baptisé La vallée tranquille, le film est un énième mélodrame folklorique et romantique avec des fermiers miséreux, des aristocrates rapaces et l’amour rédempteur entre la fille du châtelain et le fils du métayer, comme l’explique le metteur en scène, Stephan Meldegg, dans la présentation de l’œuvre. Et c’est vers les habitants de la région qu’ils se tournent pour les rôles de figurants.
Charlie et Jake, deux traîne-savates du coin, au passé tourmenté et à l’avenir bouché, sont contents d’avoir décroché quelques semaines de figuration à 300 livres par jour. On peut sans doute s’imaginer, comme le relève Le Nouvel Observateur, que «les naturels de ces deux planètes, show-business hollywoodien et cambrousse irlandaise, à des années-lumière l’une de l’autre, ont du mal à communiquer. Et que les malentendus (vont) se compliquer». Mais Charlie et Jake sont loin de se douter à quel point ce tournage perturbera leur vie et celle du village. Quand on regarde de trop près la fiction, le réel vous rattrape et le réveil peut être brutal…
Deux comédiens, seize personnages
Charlie et Jake sont interprétés par Eric Métayer et Elrik Thomas, et à eux seuls, ils interprètent tous les personnages du tournage, les seize personnages de cette comédie dramatique, à la fois drôle et bouleversante. «L’intérêt de cette fresque cocasse et cruelle, écrit encore Le Nouvel Obs, vient aussi de ce qu’elle est jouée par deux comédiens seulement. Au-delà de leur performance, la réduction de la partition permet de mieux percevoir la mélodie. Ça déchire comme un verre de whisky tourbé».
Au départ de cette aventure, il y a le livre de l’auteure irlandaise Marie Jones, Stones in his pockets, véritable succès international qui a été joué dans plus de trente pays à ce jour, et qui a remporté de nombreux prix partout dans le monde. Ensuite, il y a l’adaptation française d’Attica Guedj et Stephan Meldegg, ce dernier se charge là également de la mise en scène. Créée en 2003, cette première adaptation remporte un immense succès, autant auprès du public que de la critique. Le spectacle est nommé cinq fois aux Molière 2004, notamment dans les catégories du meilleur spectacle, meilleur metteur en scène, meilleure adaptation et meilleur comédien pour Eric Métayer. En 2015, dans la programmation Off du Festival d’Avignon, l’équipe présente une nouvelle version des Cailloux plein les poches. Et c’est à nouveau le triomphe.
A nouveau une performance saluée, un duo de comédiens qui, «sous la houlette de Stephan Meldegg, font éructer, râler, cogner, rire, boire, rêver, séduire et mourir une vingtaine de personnages hauts en couleur». Rien qu’à jeter un coup d’œil sur le parcours artistique d’Eric Métayer et Elrik Thomas, c’est l’attente aiguisée; des planches à l’écran, le grand écran et le petit, des matchs d’improvisation à la mise en scène, Eric Métayer, dont les Libanais ont déjà croisé le nom à la mise en scène justement des Chatouilles d’Andréa Bescond que Persona Productions a déjà présenté au Liban, est le complice d’Elrik Thomas, au parcours tout aussi riche, se frottant à la mise en scène au théâtre, au cirque, au stade ou à la rue. En attendant «ce feu d’artifice permanent», de «rire, d’essuyer une larme l’instant d’après, de rire à nouveau», «au-delà de la légèreté de l’intrigue, c’est toute notre société qui est remise en cause».
Nayla Rached
Du 23 au 26 juin, au Théâtre Monnot.
Billets en vente à la Librairie Antoine et en ligne: www.antoineticketing.com
Photos: Alizée Chiappini