Il en existe de toutes sortes: des taxis pour femmes, des taxis high-tech avec des prix qui varient d’une entreprise privée à l’autre. Qu’est-ce qui se cache derrière ce business du transport au Liban?
Selon l’Union des taxis au Liban, on compterait quelque 35 000 taxis dans le pays. Sur ces véhicules, certains conducteurs travaillent en indépendants ou avec des entreprises de taxis privées, qui leur apportent une clientèle régulière. Ces entreprises semblent proliférer ces dernières années. Dans l’annuaire, plus de 170 résultats sont affichés pour une recherche de compagnie privée de taxis au Liban. Comment expliquer cette tendance? Le Syndicat des compagnies de taxis privées ne compte, lui, qu’une trentaine de membres, comme l’explique Gilbert Abou Harb, directeur gestionnaire de l’entreprise Charlie Taxi et membre du syndicat. «Ces dernières années, tout le monde souhaite créer une entreprise privée de taxis, explique-t-il. Mais il faut se méfier, car ce ne sont pas toujours de vraies sociétés qui sont créées. Beaucoup de chauffeurs de taxis s’associent simplement, souvent dans l’illégalité et sans vraiment répondre aux critères impératifs pour former une véritable entreprise de taxis. Il faut, par exemple, avoir au moins 10 voitures et 10 plaques rouges, un bureau d’au moins 70 m2, un terrain pour accueillir les voitures…».
Il existe ainsi toutes sortes de compagnies privées au Liban: des plus ou moins légales, mais aussi des véhicules exclusivement réservés aux femmes, d’autres high-tech qui se dotent des nouvelles technologies pour faire face à la concurrence des applications telles qu’Uber. C’est une innovation que lance actuellement Charlie Taxi. «Nous lançons notre propre application qui permettra au client de commander un taxi en quelques clics. Nous avons nous-mêmes développé cette innovation durant trois ans et ce, au Liban», se réjouit le directeur gestionnaire de l’entreprise.
2 000 courses par jour
Charlie Taxi a été créée en 1999, au Liban, et compte quelque 180 véhicules pour 300 chauffeurs. «Nos conducteurs sont entièrement salariés et nos voitures nous appartiennent», souligne M. Abou Harb. L’entreprise effectue environ 2 000 courses par jour pour un tarif de 8 000 livres libanaises (L.L.) à l’intérieur de Beyrouth.
Mais toutes les sociétés ne fonctionnent pas de la même manière. A Queen Taxi, c’est le chauffeur lui-même qui paie chaque semaine le bureau pour lequel il travaille. «Nous lui apportons une clientèle et il nous ramène une commission sur ses courses, explique l’un des employés de la société, qui a préféré garder l’anonymat. Le chauffeur encaisse directement l’argent des trajets qu’il effectue, soit quelque 600 000 et 700 000 L.L. par semaine, et nous reverse entre 100 000 et 200 000 L.L. hebdomadaires. Pour le recrutement, il suffit de passer les trois jours d’essai et le chauffeur est embauché chez Queen».
La compagnie comptabilise quelque 500 courses par jour pour des tarifs qui oscillent autour des 9 000 L.L. pour des trajets à l’intérieur de Beyrouth.
Chez Allo Taxi, également leader sur le marché et fondée en 1999, le système est sur mesure. «Nous travaillons avec des chauffeurs contractuels qui nous paient par semaine ou par mois, en fonction de leurs besoins, et nous avons également des chauffeurs salariés», explique Roland Ghanem, directeur général adjoint.
Allo Taxi comptait 10 voitures à sa création. Aujourd’hui, l’entreprise en compte 300. «Nous recevons plus de 1 500 appels par jour, poursuit-il, pour 2 000 commandes et 6 000 clients au quotidien».
25% de croissance par an
Ce type de succès, couplé à l’absence de transports publics décents au Liban, explique, selon les entrepreneurs interrogés, la demande croissante de taxis privés au pays du Cèdre.
«Les Libanais et les touristes souhaitent se déplacer de manière sécurisée», explique le directeur de Charlie Taxi. «Au Liban, il n’existe ni métros ni véritable réseau de bus. Nous enregistrons une augmentation de notre activité d’environ 25% chaque année, note-t-il. Nous travaillons avec de grandes sociétés libanaises, notamment des médias, et récemment, l’arrivée des ONG internationales a également soutenu cette demande».
S’il est impossible de chiffrer le nombre de nouveaux acteurs qui se lancent chaque année sur ce marché, les professionnels interrogés soulignent que beaucoup de nouveaux entrepreneurs ne survivent pas.
«Ces nouveaux entrants sont séduits par un modèle facile à lancer et très rentable, explique l’employé de Queen Taxi. Cela dit, ce type d’entreprises n’est pas facile à gérer au quotidien. Donc, beaucoup de sociétés qui viennent d’ouvrir finissent rapidement par mettre la clé sous la porte.
L’une des raisons, la concurrence rude: une centaine d’acteurs pour un tout petit marché, sans compter l’arrivée d’Uber et des nouvelles applications mobiles qui s’ajoutent aux taxi-services».
S’il est donc facile de se lancer dans le business des compagnies privées de taxis, il n’est pas facile de perdurer.
Soraya Hamdan