En novembre, place aux documentaires, à l’art et au patrimoine avec le lancement de la 3ème édition du Beirut Art and Film Festival. «Un festival unique en son genre qui vient prouver que l’art peut aller vers le public et rejoindre toute la société», selon sa présidente, Alice Mogabgab.
Du 6 au 25 novembre, une équipe de bénévoles dynamiques propose aux Libanais un bouquet de documentaires dédiés aux thématiques culturelles et artisti-ques, avec un hommage notable rendu au patrimoine libanais. Soucieux de contrer l’ignorance, la désinvolture voire la barbarie infligé à notre patrimoine, ces documentaires mettront à l’honneur les diverses richesses du Liban: les mosaïques de Saïda, la forteresse de Hasbaya, les dégâts irréversibles causés à Jeita. Le public pourra aussi découvrir un autoportrait de Khalil Salleby, des entretiens avec Paul Guiragossian, entre autres.
Le programme de cette troisième édition se déclinera aussi en projections, «intra-murales» au cinéma Metropolis, du 14 au 19 novembre et comporte aussi des projections itinérantes «extramuros» dans nombre d’écoles (avec le film Hergé à l’ombre de Tintin), universités et centres culturels sur l’ensemble du territoire.
Un foisonnement artistique qui donnera lieu à plus de 150 projections, qui fait bénéficier aussi quatre associations caritatives.
PATRIMOINE EN DANGER
Cette 3ème édition mettra un coup de projecteur sur un documentaire phare implanté dans le cœur de la thématique Patrimoine et barbarie – Héritages culturels en danger. Succédant à deux soirées-débats à Genève (Institut des Cultures arabes et méditerranéennes) et à Paris (Institut du monde arabe), le film de Jean-Luc Raynaud, Syrie dernier rempart du patrimoine, sera projeté à Beyrouth en grande première pour dénoncer la prise en otage du patrimoine. Car si les destructions du patrimoine de l’humanité orchestrées par l’Etat islamique sont abondamment dénoncées par les médias, de manière tout à fait compréhensible, le film de Jean-Luc Raynaud dénonce également les crimes commis par les armées officielles contre tous les joyaux de l’humanité en péril, en Syrie et en Irak, détruisant les vestiges des civilisations mésopotamiennes, romaines, etc. Des crimes en contradiction avec les accords de la Syrie avec l’Unesco. Le documentaire dénonce l’usage du patrimoine comme monnaie d’échange, comme moyen de pression dans la guerre et, face à cette barbarie, montre des individus qui tentent de sauver leur héritage parfois au détriment de leurs vies. Construction de murs pour défendre et protéger les monuments, projets de reconstruction des sites antiques, à Palmyre, à Bosra, à Alep, au Krack des chevaliers, à la mosquée des Omeyyades, etc.
LUTTER CONTRE L’OUBLI
Un «Coup de chapeau» est décerné cette année à Hady Zaccak, le jeune cinéaste à cheval entre le réalisateur et l’artiste contemporain, notamment pour ses documentaires ravivant le patrimoine et qui s’inscrivent totalement dans la thématique du festival. «Après la guerre il y a eu comme une amnésie. Personne ne voulait en parler, ni ceux qui ont entrepris la reconstruction de la ville, ni ceux qui ont «fait la paix». Nous vivons dans un pays où tout a disparu. Mes films luttent contre l’oubli», confie le réalisateur à Magazine. À travers six courts métrages réalisés en début de carrière, l’enseignant à l’IESAV donne la parole aux pionniers du cinéma libanais qui racontent les salles, les séances, les studios (Baalbeck, Haroun…). Il relate le cinéma de guerre au Liban, rapporte le regard des cinéastes sur les guerres libanaises (Le Liban à travers le cinéma) ou celui des intellectuels (Jalal Khoury, Borhane Alawiyé…) sur les métamorphoses de Beyrouth (Beirut… Points of View). Zaccak raconte l’Histoire (arrêtée dans les manuels scolaires à 1943) à travers ce qu’en rapportent des élèves de 3ème issus de cinq grandes écoles du Grand Beyrouth d’obédience différente (A history lesson). Il ressort les archives du passé qui se superposent au vécu d’un couple, dans Honeymoon 58.
Hady Zaccak assistera le 17 novembre à la projection de ses six documentaires. Il figure également à l’affiche du BAFF dans le volet extramuros avec la projection de son long métrage Marcedes (2011) qui retrace l’histoire du Liban des années 50 jusqu’à aujourd’hui, à travers les commentaires d’un chauffeur de taxi-service qui sillonne la ville.
Autre film à ne pas manquer, le 19 novembre, Manifesto de Julian Rosefeldt, où l’actrice Kate Blanchet incarne successivement treize personnages en une série de monologues élaborés à partir de manifestes célèbres d’artistes du XXème siècle.
Au programme
L’archéologie
Entre autres, sur Hasbaya, Jeita, Sidon, Pompéi, Palmyre…
La musique
Avec des projections sur les Beatles, Oum Kalthoum, Placido Domingo, etc.
Les arts plastiques
Avec un focus sur 15 peintres comme Bosch, Hockney, Van Gogh…
L’écriture
Cinq films dont on notera Hergé à l’ombre de Tintin qui sera projeté dans les écoles.
Le cinéma
avec un hommage entre autres à Gene Kelly.
Plus d’infos sur: www.bafflebanon.org
Gisèle Kayata Eid