Magazine Le Mensuel

Nº 2892 du vendredi 12 avril 2013

Confidences Moyen-Orient

Confidences Moyen-Orient

Bachir se réconcilie avec son mentor
Le président soudanais, Omar Hassan el-Bachir, qui avait pris le pouvoir en 1989 par la force, a toujours été influencé par les mouvements islamistes présidés par Hassan el-Tourabi. Même après leur brouille, quelques années plus tard, le cheikh n’a jamais subi le sort des opposants politiques jetés en prison ou forcés à l’exil. Mais tout cela est du passé, puisque le général veut tourner la page en s’alliant à nouveau avec son ancien guide spirituel qui avait refusé de signer les accords d’Addis-Ababa entre les opposants de Bachir et les groupes armés du Darfour. C’est ce qui expliquerait sa décision de libérer tous les prisonniers politiques, considérés dans leur majorité, proches de Tourabi.

 

Les chiites indésirables en Egypte
Alors que le président égyptien, Mohammad Morsi, se félicitait d’avoir trouvé un accord avec Téhéran concernant le retour des touristes iraniens au Pays des Pharaons, des contestations se sont élevées contre ce projet. Des mouvements salafistes n’ont guère apprécié le fait que des touristes chiites circulent dans le pays et ils l’ont fait savoir en organisant des manifestations violentes autour de la résidence du chargé d’affaires iranien au Caire. Allant plus loin, ils ont menacé de bloquer l’accès à tous les aéroports prêts à recevoir des «rawafids», le surnom péjoratif donné par les extrémistes sunnites aux chiites. Dans de telles conditions, il est difficile de concevoir un retour à la normale dans le secteur touristique égyptien.        

Ahmad el-Tayyib le cheikh d’al-Azhar, a survécu à la manigance orchestrée contre lui par la Confrérie des Frères musulmans, après l’empoisonnement d’environ 500 élèves de l’école religieuse de la prestigieuse institution. Quelques heures après cet incident, le président égyptien, qui n’avait pas jugé nécessaire de visiter les familles des dizaines d’enfants tués dans un accident de bus l’été dernier, s’est rendu au chevet des victimes d’al-Azhar, pointant du doigt Tayyib qui serait, selon les Ikhwan, responsable de cette tragédie. Le lendemain, des manifestations ont été organisées au Caire contre le cheikh d’al-Azhar par la jeunesse des Frères musulmans. Mais c’était sans compter avec la sympathie dont jouit Tayyib auprès de la population égyptienne, qui a refusé cette mascarade et a pris part en masse à la manifestation, place Tahrir, en signe de solidarité avec le dignitaire sunnite.

Abdallah Ensour le Premier ministre jordanien, a formé, après de longues semaines de tractations, son deuxième gouvernement censé donner un nouveau souffle au programme de réformes du roi Abdallah Ibn el-Hussein. Mais cela n’a malheureusement pas été le cas, puisque les principaux groupes d’opposition ont été tenus à l’écart, rendant la situation politique encore plus confuse. Les islamistes et leurs ennemis jurés, les mouvements de gauche, sont tous deux restés hors jeu, alors que le nouveau Parlement n’a pas eu son mot à dire dans la nouvelle formation gouvernementale.   

En pointillé…
Les relations entre l’Autorité palestinienne et l’émirat du Qatar n’ont jamais été au beau fixe. Selon Ramallah, Doha avantage le Hamas aux dépens du Fateh. Au cours des derniers mois, Abou Mazen avait réussi à apaiser la situation avec l’émir du Qatar, cheikh Hamad Ben Khalifa Al Thani, malgré les vives protestations de l’Autorité. Néanmoins, après le sommet arabe de Doha, ces contacts sont revenus à la case départ. L’appel de l’émir à un mini-sommet arabe, consacré à la réconciliation palestinienne, a choqué Ramallah, qui n’avait pas été consultée au préalable. Plus grave encore aux yeux de l’Autorité, Doha a proposé que la Palestine soit représentée à ce sommet par deux délégations. Trop c’est trop. Les jeunes Fathawis à l’Université d’al-Khadouri ont protesté en brûlant les photos de l’émir.

 

Khalfan refait des siennes
Le général Dahi Khalfan, chef de la police de Dubaï, en veut toujours à la Confrérie des Frères musulmans qui tente, selon lui, de déstabiliser les pays du Golfe. Le général, qui avait tenu par le passé des propos très durs envers le mouvement islamiste, a, cette fois, pris pour cible le régime égyptien qui «se mêle des affaires internes des Emirats arabes unis, ce qui est inacceptable et intolérable». Khalfan a de même remarqué que le véritable but des Ikhwan était d’imposer un régime islamiste à travers le monde arabe et, plus particulièrement, dans les royaumes du Golfe. Le général n’a pas épargné de ses critiques les pays occidentaux pour leurs contacts et leur soutien aux Frères musulmans. Face à cette nouvelle attaque, Le Caire a riposté en convoquant en urgence le chargé d’affaires émirati pour lui demander des explications.    

Badaoui la joue en solo
Le chef du parti égyptien al-Wafd, Al-Sayyed Badaoui, pourrait très bientôt se séparer de ses alliés dans l’opposition, puisqu’il envisagerait de quitter les rangs du Front du salut national. Badaoui aurait, en effet, le sentiment d’être mis à l’écart par ses alliés Mohammad el-Baradei et Hamdeen Sabbahi. Le successeur de Saad Zaghloul n’apprécie guère le fait que son parti soit traité en auxiliaire, alors qu’il formerait, selon lui, la base populaire du Front. Déjà en février, Badaoui avait envisagé la possibilité de se présenter aux élections législatives, alors que le Front avait décidé de boycotter le scrutin. Ce n’est donc qu’une question de temps avant de voir le principal bloc d’opposition déchiré à la plus grande satisfaction des Frères musulmans au pouvoir, qui gouvernent le pays d’une main de fer depuis plus d’un an.     

Qui a tenté d’assassiner Assaad?
Le chef de l’Armée syrienne libre (ASL), le colonel Riad el-Assaad, qui a échappé à la mort dans l’attentat qui lui a coûté une jambe, pourrait avoir été victime d’un règlement de comptes par l’opposition même. Des sources à Damas rapportent que le régime a été surpris par cet attentat, étant donné que les proches de Bachar el-Assad ne savaient pas où se trouvait au juste le colonel dans la province de Deir Ezzor. Ces mêmes sources affirment que le chef de guerre serait sur la liste d’assassinats du Front al-Nosra. Les leaders du Front qaïdoste n’apprécient guère la marginalisation que tente de leur imposer l’ASL et seraient déterminés à en finir avec les provocations des hommes d’Assaad. D’ailleurs, le colonel n’a pas nié la possibilité qu’il ait été victime d’un règlement de comptes interne, ajoutant néanmoins qu’à ce stade, il ne pouvait accuser personne d’être derrière l’attentat. Même pas le régime?            

Un député sorcier à Bahreïn
Les dernières élections législatives au royaume de Bahreïn, boycottées par les mouvements d’opposition chiites, ont abouti à l’élection de plusieurs députés salafistes. Mohammad Bou Qais est l’un d’entre eux. Seul problème, sa profession: sorcier. Ainsi, durant les quinze dernières années il aurait, selon ses propres déclarations, guéri plus de 200000 personnes de différents maux. Le parlementaire a même souligné, avec fierté, que plusieurs hauts responsables du royaume étaient des patients fidèles. «Je suis spécialisé dans le combat des djinns et dans 95% des cas, je suis victorieux, sauf si le djinn est obstiné et refuse d’obéir à mes ordres», dit-il. Il ne manquait plus qu’un ensorceleur au royaume de Bahreïn qui traverse des troubles politiques sans précédent!   

Mort mystérieuse
La guerre civile qui déchire la Syrie depuis plus de deux ans a déjà provoqué la mort de plusieurs dizaines de journalistes locaux et internationaux. Alors que l’opposition pointe du doigt le régime, accusé de tous les maux et responsable, selon elle, de tous les crimes, deux journalistes travaillant auprès de l’agence de presse gouvernementale Sana, ont été assassinés dans leur bureau sans que cela ne fasse la «une» des journaux. La raison en est simple: Le ministre de l’Information, Omran el-Zohbi, a ordonné aux médias de l’Etat de ne pas aborder ce sujet qui pourrait nuire au moral des troupes! Le régime syrien veut à tout prix assurer que la capitale est sécurisée et que la situation y est normale. Alors comment expliquer que les deux confrères aient succombé à leurs blessures dans une attaque au mortier, place des Omeyades, en plein cœur de Damas?       

2013 serait l’année de la réconciliation nationale dans la province semi-indépendante du Kurdistan, vu les tensions grandissantes avec Bagdad. Ceci serait dû au fait que les deux leaders historiques, Massoud el-Barzani et Jalal el-Talabani, ont décidé de conclure un nouvel accord stratégique visant à mettre un terme définitif aux anciennes discordes. Ainsi, le président Talabani, très malade, s’est assuré que son fils lui succédera à la tête de l’Union nationale du Kurdistan et qu’il jouira du soutien de Barzani pour le poste de président de la République. Les deux leaders se sont aussi entendus sur la possibilité d’organiser un référendum pour demander aux Kurdes s’ils soutenaient ou non l’indépendance de la province. Un scénario catastrophe pour le Premier ministre irakien, Nouri el-Maliki, qui n’aurait jamais pu envisager que les ennemis d’hier puissent sceller un accord à son insu. Mais, en politique, rien n’est vraiment impossible et Maliki vient d’en faire les frais.     

500 millions de dollars c’est le montant de l’aide financière américaine attribuée au gouvernement du Premier ministre palestinien Salam Fayyad. Cette décision a été annoncée en grande pompe par l’Administration américaine, alors que Fayyad se trouvait à Washington. Un passage triomphal puisque le président américain Barack Obama a demandé à rencontrer le responsable palestinien pour saluer «son courage et son attitude d’homme d’Etat tout au long des dernières années». Ces louanges, qui auraient dû propulser Fayyad à l’avant-scène de la vie politique, ont eu un effet contraire. Désormais, le président palestinien Mahmoud Abbas souhaiterait le remplacer à son poste. Il est hors de question que Fayyad vole la vedette au président, au moment où le mouvement Fateh demandait officiellement à Abou Mazen de virer ce personnage encombrant qui n’a jamais été apprécié par la base du mouvement. Le nom de l’homme d’affaires, Mohammad Moustafa, est déjà avancé comme probable successeur du Premier ministre haï par le Hamas, méprisé par le Fateh, mais adulé aux Etats-Unis.

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